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Citation de Luniver


Samuel Vimaire rêvait d’indices.
Il voyait les indices d’un mauvais œil. D’instinct, il ne leur faisait pas confiance. Les indices, ça gênait. Et il ne faisait pas confiance aux gars qui, dès le premier regard sur un inconnu, déclarent à leur compagnon d’une voix hautaine : « Ah, mon cher, je ne peux rien vous dire sinon que c’est un tailleur de pierre gaucher qui a servi plusieurs années dans la marine marchande et a récemment connu des revers de fortune », puis débitent un tas de commentaires dédaigneux à propos de cals, de posture, d’état des chaussures, alors que les mêmes commentaires exactement pourraient s’appliquer à un homme qui porte ses vieux vêtements parce qu’il a effectué un peu de maçonnerie chez lui pour une nouvelle fosse à barbecue, qui s’est fait un jour tatouer en état d’ivresse à dix-sept ans et qui a eu le mal de mer sur un trottoir mouillé. Quelle arrogance ! Quelle insulte à la diversité infinie et chaotique de l’expérience humaine !

Même chose avec les indices plus statiques. Les traces de pas dans le parterre de fleurs sont sûrement, dans le monde réel, celles du laveur de carreaux. Le cri dans la nuit provient sûrement d’un type qui, en se levant de son lit, a méchamment marché sur une brosse à l’envers.

Le monde réel est beaucoup trop réel pour laisser de jolis petits indices. Il recèle trop de choses. Ce n’est pas en éliminant l’impossible qu’on parvient à la vérité, aussi improbable soit-elle, mais, procédé autrement plus difficile, en éliminant les possibilités. On travaille d’arrache-pied, on pose patiemment des questions et on examine tout. On marche, on parle et on espère de toutes ses forces au fond de soi que les nerfs d’un type vont craquer et qu’il va se livrer.
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