Quand Célestin entra, Raymond était entrain de terminer un croissant qu’il trempait salement dans une tasse de café, tout en lisant un document étalé devant lui.
- On nous laisse le choix, Célestin. On peut partir, mais on peut aussi rester ici, des flics, il y en a toujours besoin.
Célestin jeta un coup d’œil sur le formulaire officiel, accrocha son chapeau au perroquet et s’assit face à son collègue.
- Moi, je pars.
- T’es dingue. Tu veux aller te faire tuer ?
- Je me sens pas de rester ici, quand les copains seront en première ligne.
Raymond haussa les épaules.
- C’est toi que ça regarde.
- Il n’y a pas que lui que ça regarde.
Les deux inspecteurs se retournèrent vers leur chef, Auxence Minier, un grand gaillard au cou de taureau qui venait d’entrer dans la pièce.
- Si tu pars, Célestin, je perds un de mes meilleurs éléments.
- Merci pour moi ! fit Raymond.
- Toi, Raymond, tu manges trop : tu as du mal à courir.
Il se tourna vers Célestin.
- Alors, c’est sûr ? Tu nous laisses tomber ?
- Je ne suis pas indispensable, patron.
- Sans doute que non, mais ça va pas être drôle, ici. S’il y a le moindre problème de ravitaillement, d’épidémie, de panique … Et je te passe les espions en tous genres, les putes et les escrocs !
- Et la solidarité nationale ?
- Qu’est-ce que tu crois, Louise ? C’est comme d’habitude, chacun pour soi et Dieu pour tous. Tâche de pas t’en prendre une !
Minier esquissa un sourire, envoya une bourrade chaleureuse à son adjoint et quitta le bureau.