Tony Blair

J’ai toujours apprécié Tony Blair du peu que j’en entendais parler dans les médias.



Il ressort de ces mémoires que c’est un humaniste, un homme profondément de gauche, mais qui a su rénover son parti en l’amenant plus au centre de façon à gagner les élections, ce qui est quand même le but de la politique, même si dire ça est un peu tabou à gauche. Bref, ça n’a pas plu à tout le monde, mais ça a marché, ça faisait 18 ans que les conservateurs étaient au pouvoir, et il a ensuite été réélu deux fois.



On n’échappe pas, à chaque occasion, au couplet : « Sur ce dossier, l’aide de Machin a vraiment été décisive, c’est un homme exceptionnel, on n’aurait rien pu faire sans lui », mais bon c’est la règle du genre, je suppose.



On apprend plein de choses sur le fonctionnement des institutions britanniques. On appréhende un point de vue interne sur les évènements de ses mandats, qui font l’objet d’un chapitre chacun : la mort de Diana, le processus de paix en Irlande du Nord, le Kosovo, le 11 Septembre, l’Irak.



Les chapitres sur les réformes du pays sont intéressants même si ce n’est pas le nôtre, car cela peut toujours donner des idées (ou montrer d’où viennent les idées qu’on voit parfois importées chez nous).



Les chapitres purement politiciens, sur l’accession au pouvoir, les campagnes électorales, et le duel Blair-Brown, qui aboutit finalement à la victoire de Brown, la démission de Blair, le retour au Old Labour, et logiquement la défaite des travaillistes face aux tories de David Cameron, sont passionnants également.



Je pense qu’il y a de bonnes leçons à tirer de ce livre, il a été écrit pour ça. A plusieurs endroits on trouve des conseils ou des maximes. Par exemple dans le chapitre « Paix en Irlande du Nord », Blair nous explique en 10 points comment on peut parvenir à un accord entre des gens qui ont plutôt l’habitude de s’entretuer (Je cite en prenant quelques libertés) :



1- Il faut qu’il y ait un cadre construit autour de principes rassembleurs. Revenir aux principes de base : De quoi parlons-nous exactement ? Quel est notre objectif ? Quel est le fond du problème ?



2- Il faut s’atteler à la tâche jusqu’au bout. Sans relâche. Avec acharnement. Jour après jour.



3- Les petites choses sont parfois essentielles. Votre mandat comprend tout ce qui est important aux yeux de ceux que vous servez – et ce sont eux qui le définissent. Si c’est important pour l’une des parties, c’est important pour moi



4- Être imaginatif. Utiliser les points de détail, ensemble ou séparément et, au besoin, en inventer quelques une pour débloquer le processus.



5- Le conflit ne sera jamais résolu si on laisse les parties se débrouiller toutes seules. S’il leur était possible de trouver elles-mêmes une solution, elles l’auraient déjà fait. Elles ont besoin d’une aide extérieure. CQFD.



6- Ne pas oublier que pour les deux camps, résoudre le conflit est une longue route, un processus, pas un événement. Il faut à chacun du temps pour abandonner le passé.



7- Le chemin vers la paix sera immanquablement barré par ceux qui croient que le conflit doit se poursuivre. Il faut se préparer à ce genre d’obstacles. Ne pas se laisser décourager.



8- Les leaders jouent un rôle essentiel. Tout processus de paix implique de prendre des risques politiques, parfois énormes, et de faire preuve de courage politique, voire de courage tout court. La qualité des leaders est cruciale.



9- Les circonstances extérieures doivent jouer en faveur de la paix, et non l’inverse.



10- Ne jamais laisser tomber. Un processus de paix n’est jamais figé, il avance ou bien il recule. N’oubliez jamais ceci : mieux vaut essayer et échouer que ne pas essayer du tout.



C’est ce qu’est ce livre : un testament, pour l’Histoire.