C'est pourtant bien l'été
rien ne manque la lumière
les arbres les sourires la musique
les jeunes filles en fleur
le soleil qui surveille
et s'occupe des convives
tout est tendre éternel
ondoyant tel un regard langoureux
à peine le galet froid va-t-il tomber
de cette fissure infime
telle une larme tu vas couler
hors du tableau
(" Cent poèmes")
LA MONTAGNE AIGRIE
un jour cette montagne aigrie s’ouvrira
et une rivière lumineuse se déchaînera
dans la soif
comme un sanglot ou comme un rire
je ne saurais dire
un jour
le silence s’essoufflera
il appellera ses vagues
il ira se retirer dans les profondeurs
auprès de ses affreux naufrages
un jour
tu auras une coupe à boire
et une voix pour parler
alors tel un voleur
dépêche-toi
car la solitude
cruelle mégère
pourrait rentrer à l’improviste
/ Traduction Ioannis Dimitriadis
Un poème qui n’a pas eu de chance
ce poème n’a pas eu de chance
il avait été écrit pour trois amis
trois hommes de cœur
le premier a disparu à l’étranger
le second s’est fait sauter la cervelle à l’armée
le troisième a fini par accepter l’ordre des choses
depuis le poème brûle la nuit
comme une cigarette oubliée
il va tout seul
dans le silence
comme un enfant pieds nus
qui grelotte de froid
/Traduit du grec par Ioannis Dimitriadis.
LE CHAUFFEUR À LA CHEMISE BLANCHE
le chauffeur à la chemise blanche
à quoi voulez-vous qu’il ressemble
dévalant
traversant la nuit
à quoi voulez-vous qu’il ressemble
sinon à une hirondelle qui a tardé
et s’empresse de regagner son nid
le chauffeur à la chemise blanche
soudain qu’est-ce qui lui prend
qu’est-ce qui lui prend de serrer
d’une telle rage le volant
comme pour se projeter au ciel
comme pour se pétrifier au siège
le chauffeur roule vite
il ouvre les fenêtres
et s’approche à toute allure
du virage dangereux
des bras qui l’attendent
il se moque
il ouvre les fenêtres
et jure
il jure doucement
comme en prière
C’EST POURTANT BIEN L’ÉTÉ
c’est pourtant bien l’été
rien ne manque la lumière
les arbres les sourires la musique
les jeunes filles en fleurs
le soleil qui surveille
et s’occupe des convives
tout est tendre éternel
ondoyant tel un regard langoureux
à peine le galet froid va-t-il tomber
de cette fissure infime
telle une larme tu vas couler
hors du tableau
L’AUTRE BOUT
voici la plaine ensanglantée
parmi les coquelicots
qui se traîne
et se lamente
voici ton dernier regard
qui soutient les semailles
qui soutient avec douceur la lumière
(que fait ici toute cette lumière ?)
à l’autre bout
voilà ton dernier mot
herbe sauvage
au pied du silence
LIBERTÉ
seules les fleurs aiment vraiment
la liberté
elles parlent d’elle en cachette
à l’oreille du vent
mais lui ne garde pas le secret
il embaume