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Critiques de Viviane Campomar (12)
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Les étoiles de Tchernobyl

Divine surprise ! Lors de la dernière masse critique de Babelio, j'ai reçu le livre de Viviane Campomar, les Etoiles de Tchernobyl, éditions le chèvre-feuille étoilé.

Viviane Campopmar est scientifique, poète et littérateur, ce qui ne semble pas évident au premier coup-d'oeil, mais elle parvient à concilier l'ensemble avec bonheur pour notre plus grande joie.

Les étoiles de Tchernobyl, un opus de 76 pages qui donne la parole à des témoins de la catastrophe de 1986, trente années plus tard, propose deux lectures différentes de cet événement qui a marqué la planète.

Des anciens, starojily, refusent de quitter le village de Pripiat, tandis que leurs enfants sont évacués sur Kiev, en principe pour trois jours disent les autorités, puis au bout d'une semaine, « (...) un responsable du parti vint nous prévenir que nous ne pourrions pas retourner chez nous, que la zone autour de la Centrale restait contaminée durant plusieurs semaines encore et que ces mesures n'étaient que prophylactiques (...)»

L'écriture de Viviane Campomar est simple et fluide, sans fioritures, elle parvient à matérialiser par ses mots, la différence entre deux Russies (deux URSS devrais-je dire) . Celle des anciens qui ont connus la guerre - le village de Pripiat a été exterminé par les Nazis - et qui, en dépit de toutes les critiques, sont reconnaissant envers l'Etat et le Parti de la renaissance de la Russie.

La Centrale en est le symbole, elle qui a apporté la lumière et le progrès dans la région et jusqu'à Kiev.

«La Centrale faisait partie de ces réussites, n'avait-on cesser de leur seriner : elle offrait de l'électricité en autonomie absolue à toute cette région qui avait tant souffert de la seconde guerre mondiale. Un bien précieux, cette électricité. Toutes ces villes, et peut-être même Kiev , éclairées le soir par la seule magie d'une usine unique.»

En face, les enfants n'ont pas ces références, ils comprennent leurs parents, mais subissent plutôt les contraintes de ce régime qui leur ment et les réduit à une migration sociale, géographique et professionnelle, sans explications, sans compensations.

«(...) j'avais conscience de mentir, ne croyant pas moi-même à ces paroles lénifiantes et officielles qu'en bonne soviétique, je faisais miennes.» dit Macha l'infirmière, la fille de Mitia et Dacha lorsqu'elle présente le drame à ses enfants.



Vivivane Campomar propose une vision sans fard du mensonge d'état, qui rappelle la notre, quand les autorités françaises professaient, sans crainte du ridicule, et avec toute l'onction de certains membres de la communauté scientifique, que le nuage de Tchernobyl n'avait pas traversé notre territoire.



Séparés de leurs enfants Dacha et Mitia vivent à Pripiat, avec leurs rêves et leur ignorance, insouciants du danger et sûrs de leur bon droit : « Mitia et Gricha venaient d'entamer une bouteille de Vodka de qualité trouvée dans les réserves abandonnées du village, qu'ils ne se seraient jamais payée et pensaient garder pour les grandes occasions, mais plus rien à perdre désormais, quelles occasions pourrait-il y avoir désormais.»

A Kiev, leurs enfants et Alexeï, continuent à vivre, incapables de faire le deuil de parents promis à la mort mais encore vivants, peut-être, bien que disparus à tout jamais à leurs yeux : «Alors même qu'on nous évacuait, la mort nous suivait, ombre fidèle et malveillante, qui se riait de notre terre nourricière qu'elle avait entièrement pourrie.»



Les deux lectures des événements alternent :

…tantôt Mitia et Dacha dont un narrateur rapporte l'histoire.

« Il ne lui avait pas parlé (…) il l'avait enveloppé de ses bars (…) Ils avaient regardés (…) Chaque soir Dacha sort (…) Ils n'étaient que deux couples de starojily (…) Là, le caractère utilisé est une police Garamond, large et espacée, à l'image des deux starojily, perdus dans leur inconscience du danger et se raccrochant à des rêves du passé.

…tantôt Macha, leur fille déplacée à Kiev, qui s'exprime en bookman old style une police droite, verticale, ramassée, austère. Macha est un « je » et un « nous » … « J'ai tout de suite compris (…) Mon impuissance incommensurable (…) J'avais trente ans et j'étais infirmière à l'hôpital de Pripiat. (…) Je compris alors que nous étions des pestiférés (…) Je ne leur avais laissé qu'un message insignifiant (…) »

Cette façon de rapporter les témoignages renforce l'opposition entre les deux visions de l'URSS, celle du passé, glorieux mais disparu, celle d'un avenir réel mais incertain.



Le récit, court, lu avec avidité, intérêt et étonnement agit comme un puissant déclencheur de questions et nous rappelle à notre conscience de citoyens pour ne pas oublier.

Qu'est devenu Pripiat aujourd'hui ? Il y-a-t-il toujours des habitants ? Les liquidateurs, ces soldats du Césium, ont-ils tous disparus ? Pourquoi ne parle-t-on jamais de Tchernobyl ? le danger du nucléaire est-il maitrisé ?



Outre l'intérêt de son contenu, ce livre est également un bel objet. Un petit livre faussement carré de 12 cm par 13, agréable à regarder et à toucher, conçu et mis en page par Marie-Noël Arras avec une illustration de Danièle Maffray.

Merci aux éditions du Chèvrefeuille étoilé pour la qualité de la fabrication de ses livres !



Si vous le pouvez, lisez le livre de Viviane Campomar.








Lien : http://desecrits.blog.lemond..
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Les étoiles de Tchernobyl

Un tout grand merci aux Editions Chèvre-feuille étoilée et Babelio pour ce petit livre que j'avais très envie de découvrir. Un récit qui nous parle des conséquences de l'accident nucléaire de Tchernobyl.



J'avais été fort émue à la lecture de "86, année blanche" de Lucile Bordes (mon avis est ici) et j'avais envie d'avoir une autre vision.



Nous sommes dans la région des marais de Pripiat, à environ 20 kilomètres de la centrale. Cette région a déjà payé un lourd tribut lors de la seconde guerre mondiale. L'incendie éclate dans la nuit du 26 avril 1986. Dacha, Mitia et leurs amis Fédia et Verotchka, enfants durant la guerre, feront de la résistance et refuseront de quitter le village lors de l'évacuation. Le village sera détruit mais ils resteront, à quoi bon partir, ils sont à plus de vingt kilomètres de la centrale, c'est loin, pourquoi

partir ? Les radiations, c'est quoi ? Elles sont invisibles, inodores. Pourquoi partir ? la terre est si généreuse.





Trente ans plus tard, ils témoignent. Toujours en vie comme par miracle. Ils nous parlent de leur solitude.



Macha, leur fille est infirmière. Au moment du drame, elle a dérobé un flacon d'iodure de potassium pour sauver son mari, ses enfants. Elle est tenue au silence.



"Je cousais ma bouche au fil chirurgical"



Les habitants sont relogés, considérés comme des pestiférés, c'est difficile. Les enfants de Macha voient autour d'eux les dégâts causés par les radiations. Ils s'interrogent, pourquoi pas eux ?



Un petit récit émouvant à lire absolument.



Pour rester dans le même thème je vous conseille la magnifique Bd d'Emmanuel Lepage : "Un printemps à Tchernobyl"



Ma note : ♥♥♥♥
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En lui, quelque chose de l'Algérie

Devant cet ovni qualifié de roman, le lecteur reste perplexe. Il y a pourtant bien un début et une fin, puisqu’on suit les étapes de la vie de Roger Stopek, à travers les souvenirs de sa fille, Valérie, qui tente de démêler à posteriori, l’écheveau d’une existence marquée par les regrets, les non-dits, les secrets verrouillés d’un père tant aimé. Elle n’est pas sûre de bien se souvenir, et lui-même est-il sûr de bien se rappeler, dans sa tentative de reconstituer, en vrac, les souvenirs qui « bredouillaient » en lui. D’où ces images impressionnistes, furtives, un peu irréelles. Qui relèvent davantage du lavis ou des arcanes délicates des peintures à l’encre de chine, quand la matière même, brûlante, violente et odorante du village de Draria, appellerait des couleurs contrastées. Sauf, peut-être,le bleu, le bleu du ciel africain ou de la Méditerranée, le bleu fondu des souvenirs. Cette distance, constante, avec ce passé obsédant donne toute son étrangeté poétique au récit.

Roger Stopek est un homme seul, son couple dysfonctionnel, qui se maintient du fait sans doute de son propre renoncement, le renvoie à ses fantômes. Son passé pied-noir, il éprouve le besoin vital de le transmettre à sa fille, sa complice, lors de leurs échappées à deux, une transmission sacrée, charnelle, dont elle ne prendra conscience que plus tard, Mais le conte africain va tourner au cauchemar, avec la guerre d’Algérie, la sale guerre, une période glauque qu’il ne veut partager avec personne. Or Valérie a grandi, elle demande des comptes, juge avec l’intransigeance de sa jeunesse, jusqu’à interpeller ce passé pied-noir à l’aune de l’injustice. Comment osait-elle s’ériger en procureur, elle qui ne savait pas, qui se tenait loin de ces années, de cette terre tant aimée où ils avaient bâti leurs rêves ? Alors, oui, subsisterait dans ce parcours jalonné de ruptures, celui d’un « dépatrié, », des blancs, des mystères, des évènements tragiques qu’aucun petit cahier jauni ne dévoilerait, après la mort du père.



Reste, pour toujours, « ce quelque chose de l’Algérie qui voltigeait autour de lui », dans « l’émotion primordiale du père » : ces martinets en liesse, ces migrants saisonniers qui traversaient la Méditerranée, lien indéfectible entre les deux rives, ces oiseaux porteurs de vie, de renouveau, d’enchantement, qui dépliaient l’âme meurtrie du père. Est-ce pour cela que Roger Stopek s’intéresse aux oiseaux, au point de leur consacrer son temps de bénévole ? Jusqu’à ce dernier matin, où la mort viendra le cueillir au pied d’un arbre, son carnet à la main, pour une migration sans retour ? Et il faudra ce héron cendré, qu’ils avaient surpris tous les deux, Valérie et lui ,pour dépasser les divergences, les soupçons, la culpabilité. La pure beauté de la scène, transcende l’effroi des souvenirs barbares, tous deux ont baissé la garde, ils se laissent emporter par « ce souffle de grâce »cette apparition sublime. « Le héron s’envola dans un froissement infime. Quelque chose de l’Algérie voltigeait désormais en eux. »

On aimerait penser que cette dernière vision, épiphanique, habitait l’âme de Roger Stopek au moment où elle prit son envol.



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En lui, quelque chose de l'Algérie

propos d’En lui quelque chose de l’Algérie, de Viviane Campomar.

par Francis Vladimir

La blessure de guerre pour roman, d’une guerre qui ne dit jamais son nom, travestie en opérations de pacification. Une guerre niée puis occultée par les autorités, la bien-pensance de l’époque, et par ceux qui, consentants ou forcés, furent envoyés sur le terrain. De l’Algérie, on a dit l’histoire de la colonisation, civilisation pour les uns, joug pour les autres. Les uns ce furent les Français qui s’y étaient installés et qui, pour la plus grande majorité d’entre eux, partageaient un quotidien chaleureux, un voisinage partagé avec les autres, les ressortissants, les natifs du pays. Ce qui fait la chair du roman de Viviane Campomar, c’est un effluve, un parfum, une senteur de l’autre rive de la Méditerranée, échappés d’une mémoire recroquevillée sur elle-même.

Celle de Joseph Stopek, descendant d’un hongrois, passé par Malte, qui gagnera sa nationalité française. De ces événements à vif pour ceux qui les traversèrent, la conduite d’opérations éprouvantes, traumatisantes, demandée aux soldats du contingent envoyés pour un interminable service militaire, ou les épreuves sans fin des populations, il n’est évoqué que le silence, le non-dit balbutié, la sidération secrète de celui qui, après s’être formé à la médecine en métropole, où il débarque en 1949, reviendra sur sa terre natale pour s’acquitter de son devoir d’un côté mais affronter ses propres congénères, de l’autre.

De cette trajectoire meurtrie au fer rouge, l’auteur ne jette dans son roman que quelques notes comme si l’explicitation eût surligné à tort l’évidence de la catastrophe. Pour aborder à l’indicible, il fallait déjouer, dévier, décaler pour que le narrateur et le lecteur puissent faire du roman une lecture apaisée. Car l’histoire refoulée commence un 08 mai 1945 à Sétif « Et les massacres ? Les massacres de Sétif et les milliers de morts juste pour quelques drapeaux un peu trop verts brandis pour communier dans la victoire, cette victoire à laquelle tous avaient participé… » Rappel nécessaire. En déstructurant l’histoire de Joseph qui ne retient de la guerre, pour l’essentiel, que la seconde, celle 1939-1945, qu’il connut enfant et jeune adolescent, la romancière s’applique à lever le lièvre de l’impossibilité d’affronter la réalité suivante, cette autre guerre qui fut celle d’Algérie. Elle déplace – dit prosaïquement- le curseur du récit, focalisant notre intérêt sur les liens de Joseph Stopek avec sa fille Valérie.

De la toute petite enfance de celle-ci, marquée par une mère absente, retirée de ses obligations de mère, froide, sans chaleur à son égard, dénuée de tout intérêt et compassion pour l’histoire de déracinement et d’éloignement de son propre époux, médecin à Clermont-Ferrand, en des années où la notabilité égoïste engonçait dans une respectabilité revendiquée. Avec ce lien père-fille, le roman avance sur un fil d’équilibriste. Celui d’un père, pied-noir, s’effaçant, se voilant la face, par peur inavouée des démons et fantômes, confronté aux heurts des événements, face aux interrogations à fleur de lèvres de sa fille, qui naissent des livres sur l’histoire de l’Algérie trouvés à la bibliothèque municipale. « Valérie encaisse. La crudité des phrases trop construites lacère le monde baigné de miel de son père. Il lui faut se rendre à l’évidence, Roger Stopek ne lui a servi qu’un gruyère chronologique. Lui pourtant si droit, si intransigeant. Avec ses mots minables qui morcelaient l’Histoire, ses stratégies de contournement désolantes. La tenait-il pour demeurée, pour ne lui émietter que les reliefs de sa vie ? »Incapacité pour le père de dire, découverte tardive et muette, pour la fille, de cette période.

C’est à ce fil d’Ariane que Viviane Campomar s’attache dévidant la douleur cachée pour les chers disparus qui peuplent la première partie du livre, et celle de l’arrachement volontaire à un pays, sans retour possible, à une terre de soleil, de mer et de ciel bleus, de migration. Comme celle des oiseaux que la passion ornithologique de Joseph nous rend familiers dans des pages d’une sensibilité douce, à la grâce légère. Valérie grandit sous nos yeux de lecteur. Elle grandit encontre et se transforme à vue ou plus loin, du côté de Bordeaux où elle fait ses études. L’éloignement apparent qu’elle met entre elle et Joseph n’est jamais qu’une nécessité pour retrouver et s’inventer son père, s’apaiser elle-même.

De sa propre bouche elle ne pourra entendre sa vraie histoire – sa fuite en avant, ses manies cachées, son malaise constant – biaisée en cela par la mort soudaine de Joseph et l’attitude soupçonneuse de sa mère. Le deuil convoque alors les contradictions de l’enfance, du départ et du retour, de l’abandon définitif du pays, des liens familiaux, de l’amour paternel, des correspondances et du cahier secret, de la dernière lettre, mettant à nu la blessure et soulevant un coin du voile. De cet oubli dans les mots tus, où la banalité s’impose, reste cependant à Valérie, la fille profondément aimée, la transmission enfin consentie, le legs d’une existence, la rencontre fugace d’un père et de sa fille, la présence obstinée de la nature. « Un héron cendré… L’instant s’était figé dans ce sortilège. Valérie et son père suspendus à cette beauté pure, avaient baissé leur garde. Plus rien n’existait que cette somptuosité naturelle, plus de divergences plus de désordres plus de chagrins. Cette chance qu’il fallait saisir, cette connivence inattendue dans ce souffle de grâce. Le héron s’envola dans un froissement intime. Quelque chose de l’Algérie voltigeait désormais en eux.» La révélation de la vie.

Francis Vladimir



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J'irai mourir à Odessa

Le titre de ces nouvelles, reprenantcelui du septième et dernier récit, souligne le fil rouge qui relie ces variations poétiques, parfois nostalgiques, autour des fragments de vie dans l'Union soviétique (devenue Russie) des seventies et au-delà : Odessa, la ville fervente, solaire et marine, triomphe dans "La ballerine de l'escalier Potemkine", malgré la noirceur de la nouvelle, noirceur distillée à petites doses, comme un poison lent, avant la révélation finale. Dans le gigantesque marché du Privoz, au sud de la ville, les tchourtchkella, au jus de raisin, à la saveur sucrée, côtoient les oriekhi, les étals de poissons séchés rivalisent d'odeur avec les épices d'Orient.

Ailleurs, les personnages, jeunes, sont nimbés de ce halo unique que donne le souvenir. L'auteure trouve les mots justes pour évoquer les instants cocasses, émouvants, énigmatiques, voire terrifiants qui émaillent ces différents récits, avec souvent, un ton moqueur. "C'est une histoire d'amour à la sauce Pouchkine, pimentée d'absolu, --une recette pour les Russes."

Et même si le Domovoï, cet être démoniaque qui hante les datchas inhabitées, semble avoir atteint son but , en séparant les tourtereaux venus se réfugier là, il n'est peut-être pas si méchant, au fond, car il aura servi de révélateur à un couple mal assorti...

La danse, la musique, la peinture, la poésie enfin, avec l'ombre de la grande Marina Tsetaveïa, scandent ces récits empreints d'une tendresse profonde pour le pays et les gens, tendresse que l'auteure dissimule (mal) sous une ironie complice.

Pour qui aime ce pays, le plaisir que donne la lecture de ces nouvelles est intact. Pour les autres, c'est une occasion de lever un petit coin du voile et d'approcher un peu cet univers russe, si particulier et si attachant.
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Pourvu que tu m'aimes

Quand les relations fraternelles sont conflictuelles...

Mathilde n'a jamais aimé sa sœur : "Avec Clara, j'en avais soupé de ces manières dédaigneuses", "elle affichait la plus grande hostilité à mon égard". Le carnet trouvé, dans lequel Clara la traite de "conne" (et sa mère de "godiche"), lui confirme qu'elle n'a pas de scrupule à avoir. Elle ne s'en est d'ailleurs jamais cachée ("l'amour fraternel n'est pas un devoir"), mais maintenant que son aînée est décédée suite à une chute de cheval, "le sujet dérangeait"...



C'est en plongeant dans l'histoire familiale ("un passé que j'ignorais") avec sa grand-mère Mina que Mathilde va réussir à mettre des mots sur ce qu'elle ressent. Car l'adolescente comprend vite que le problème est plus profond : "Ma famille m'a paru boiteuse. Quelque chose clochait, quelque chose de tabou". Tout en partant sur la piste d'un secret familial ("Le petit" ?), elle réalise qu'on peut "se tromper en jugeant quelqu'un" (en l'occurrence Apolline qui n'est "pas si hautaine que je l'avais cru") puis elle va se débarrasser de cette colère qui l'aveugle. Son quotidien à la pension lui fera également croiser d'autres histoires de fratrie. Au final elle sera délivrée de sa culpabilité ("cette mort t'a rendu la vie plus respirable") et "la haine a disparu de mon cœur" : c'est ce qu'on appelle le pardon.



L'histoire se termine par la rencontre du passé et du présent ("Ce serait stupide que des générations continuent à se détester pour une ancienne tragédie...") autour d'une héroïne plus ouverte aux autres, qui renoue avec ses parents et s'ouvre à l'amour : "Tu en as fait, du travail sur toi-même, en quelques mois...", conclut Mina !
Lien : https://www.takalirsa.fr/pou..
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Pourvu que tu m'aimes

Mathilde essaie de se reconstruire après la mort de sa grande soeur avec qui elle ne s'entendait pas .

Ce roman parle de haine , de culpabilité, de secrets de famille . Son thème principal , le deuil , est touchant mais un peu trop survolé. En même temps , ce livre est destiné à un jeune public ...
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Cette nuit-là

Un très beau texte. Une histoire dessinée par petites touches, avec beaucoup de subtilité, d’intelligence et de pudeur. Sur ce sujet délicat du sentiment maternel, du lien ou de son absence –on ne peut pas en dire plus sans dévoiler l’intrigue, et ce serait dommage – on pourrait craindre mélo et pathos : à aucun moment Viviane Campomar ne tombe dans ce piège. Elle se contente de montrer, ou plutôt elle réussit à montrer et à faire naître chez le lecteur des évocations, des images, des émotions et des questions. Les personnages sonnent juste et on s’y attache, même à ce personnage principal si peu immédiatement attachant et qui conserve jusqu’au bout toute son opacité. Un roman lu d’une traite et qui résonne encore, la dernière page tournée.
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Les nouvelles sont bonnes

Que de douceur. Que de tendresse. Tous ces souvenirs qui ont fait de l’humain ce qu’il est. L’enfance se place dans une vie. Le souvenir peut faire un accroc dans les trames d’une vie. Pour l’un, les souvenirs d’enfance ne trouvent un écho que dans le gris de l’âge. Un souvenir d’une grande fragilité qu’il a fallu préserver face aux aléas de la vie. Il a fallu le chouchouter et l’interroger interminablement jusqu’au crépuscule de l’âge. Pour l’autre, un souvenir monstrueux, douloureux qui met la personne face à elle-même. Face à son vide intérieur. Face à ses renonciations. S’en sort-elle grandie? Pas vraiment. Mais les questions, les doutes, semblent sans réponse. Pourtant, elle reconnaît la violence de ses capitulations et les regrette. Des capitulations qui lui démontrent le vide de son existence.



Que faire quand les souvenirs se délitent, pièce par pièce, dans un abîme sans fond? Quand les êtres aimés se fondent dans un brouillard sans nom? Ce recueil nous susurre que l’homme est fait des souvenirs. Peu importe le rôle joué. Les mots se font délicats. Parfois tristes. Mais toujours avec des relents de déception qui touchent le lecteur au plus profond de son « Moi ». Les auteurs nous font traverser des souvenirs au parfum de détresse, de regrets, de rêves échoués. Ils nous disent que l’humain est l’aboutissement de son passé. Avec ou sans écueils. Que d’amour. Que de poésie. Que de force. Que de douloureuse tendresse. De messages murmurés ou criés à la face de l’humain, si fragile.



Le lecteur, au fil des récits, se promène d’un souvenir à l’autre. D’une histoire à l’autre. Discrètement. Sur la pointe des pieds. A la découverte de la spontanéité de chacun. Il apprécie la force des sentiments. La douceur et la diversité des ressentis. Les courts récits se font ritournelle et emportent le lecteur dans la magie, la richesse des souvenirs offerts. Ce qui fait de lui un intrus émerveillé, triste mais présent. Mais curieux. Ivre de vie. Face à ces mots qui sont vie, les auteurs nous invitent, discrètement, à faire de petites escapades, telle l’abeille qui butine un champ de fleurs. Et ce n’est que du pur bonheur de lire à travers les lignes du passé.
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En lui, quelque chose de l'Algérie

Un roman touchant, lumineux sur l’importance de la mémoire et la transmission. Comment partager ses souvenirs quand s'y mêle les joies de l'enfance, l'horreur d'une guerre et la blessure de l'exil?

Alternant les voix du père et de la fille, Viviane Campomar tisse les fils de cette transmission qui se réalise à petites touches, avec une grande pudeur.

Si ce livre m'a touchée, s'est sas doute parce que je me suis reconnue dans ce lien à la mémoire paternelle qui tente de partager le souvenir d'un paradis perdu.
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J'irai mourir à Odessa

PRIX DE LA NOUVELLE d'ANGERS 2020



Odessa : ville ukrainienne au bord de la Mer Noire, mais surtout, ville mythique que les Russes idéalisent depuis toujours... Viviane Campomar s'empare de ce rêve-là pour nous entraîner dans un voyage entre les années 70 et aujourd'hui, et entre l'Union Soviétique, l'Allemagne de l'Est, Paris et une Odessa résolument contemporaine... Une Odessa entre réel et imaginaire, au coeur d'un tourbillon de danse, de musique, de poésie, de peinture. Dans ces sept nouvelles, l'actrice pose un regard amusé sur une galerie de personnages savoureux qui se jouent de la réalité et sur les petits travers de sociétés prises dans la folie de l'Histoire.
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Cette nuit-là

Cette nuit-là de Viviane Campomar aux Editions de Janus



L’inengendrée



C’est un livre qui nous laisse un goût « a-mère ». Selon le préfixe latin « a », privé de…

Ca fait quoi d’être privé de mère ? demande ce livre et d’y répondre.

L’absence de la mère laisse entendre l’absence à soi-même. Il ne suffit pas d’être mis au monde.

Ca fait quoi de ne pas être ?



« L’autre » personnage central de « Cette nuit-là », n’a pas eu de mère, sa seule figure d’attachement, c’est sa soeur qu’elle ne voit jamais. « L’autre » devient mère, elle a dix huit ans.

Dès le début, le pire s’annonce. Quel visage prendra-t-il ?

Il s’approche à pas de loup, pendant que le lecteur plonge entre les lignes, il veut et ne veut pas savoir.

Viviane Campomar évite la noyade en entrelaçant deux voix, celle de « L’autre » et celle de Marianne, sa voisine, structure pulmonaire qui permet de reprendre souffle, deux polices différentes, deux points de vue sur l’histoire, vue du dedans, vue du dehors.



Vue du dedans, nous sommes dans « L’autre » qui raconte la biologie de la solitude, l’altération des sens, la réciprocité impossible, comment l’organisme sonne incohérent à chaque pas, chaque mot, chaque geste.

Marianne, la voisine de « L’autre », la regardera parfois comme une petite souris de laboratoire, pas normale, quelque chose en moins. La vie peut-être ? Pourtant « l’autre » ne manque pas d’instinct de survie. « L’autre » donne le change, elle se calque sur ce que les gens attendent d’elle.



William Faulkner écrit dans les Palmiers Sauvages : « Oui, pensa-t-il. Entre le chagrin et le néant je choisis le chagrin. »

« l’Autre » a été choisit par le néant…



Ecrire le choix du néant est le choix de l’auteure, elle parvient au fil des pages à faire ressentir à son lecteur quelqu’un qui ne ressent rien et croyez-moi, ça fait bizarre. Comment vivre sans ressentir les choses ? Est ce vraiment possible ?

« Tu as toujours vécu dans le présent. Le passé t’indisposait. Et tu ne voulais pas fixer le présent. » dit « L’autre » à propos d’elle-même en ateliers d’écriture, car dire « je » lui est difficile, elle dit « tu » à propos d’elle-même; si peu d’émotions, si peu de sentiments, comment dire « je » ?



Dès lors, que devient le passage à l’acte quand « L’autre » dénuée de « je » et d’empathie agit ? Quelle est sa part de responsabilité ?



Devant ce personnage qui a manqué de chance dès sa naissance, un frisson contre-transférentiel m’anéantie.

Je glisse de la fiction au réel.

J’avoue, je travaille en maison d’arrêt, et la question du passage à l’acte se pose à moi bien souvent : « qu’est ce qu’il (elle) fait pour être là entre ces murs ? ».



Et ce livre, dans un style neutre, sans emphase nous trace la mince frontière entre le passage à l’acte et le recours à l’acte.*

A nous de le voir.



Viviane Campomar a opté pour un regard aviaire, elle nous fait voir de très haut les évènements, personne n’est accusé, ni « L’autre » ni même la vie. Marianne regarde « L’autre » de façon chirurgical. Elle se questionne beaucoup : « Comment se comportait-elle le soir chez elle ? ( … ) Qu’est ce qui enrayait à ce point ses réflexes de mère ? »

Le commissaire Théo, lui même quand il découvre l’invraisemblable ne juge pas. Il ne sait pas vraiment à vrai dire ce qu’il voit. Il a trouvé l’enfant intérieur de « l’autre » mais que faire ? Que lui dire ?

Le lecteur entend aussi l’enfant intérieur de « l’autre » mais comment répondre ?

Plutôt que la justice, n’est-ce pas à la médecine de prendre en charge « l’autre ? »

















Que ce livre soit édité aux Editions de Janus n’est pas un hasard. Janus, le dieu des clefs, des portes, qui regarde devant et derrière, qui est bifrons ( à deux têtes).

Les Editions de Janus ont prêté leur double tête à celle qui n’en a pas, malgré les apparences, ni tête, ni corps. Au monde sans y être. Viviane Campomar et les éditions de Janus tentent un coup de force et ils y arrivent, grâce au temps de la fiction, « l’autre » existe et s’exprime, du moins, montre sa rachitique réalité.

Celle-là même que je peux pressentir parfois au détour d’un couloir en maison d’arrêt. Ni tête, ni temps, juste un corps qui me frôle, inhabité.



La réponse, s’il doit y en avoir une, à « Cette nuit-là », c’est d’aimer nos enfants.







« Recours à l’acte : manifestation de toute-puissance face à un objet externe susceptible de réveiller le traumatisme irreprésentable et suscitant ainsi une menace d’anéantissement. » Claude Balier, La psychanalyse et les “agirs” » Société Psychanalytique de Paris

www.spp.asso.fr/wp/?p=7932






Lien : https://www.editions-janus.fr/
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