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Citation de Osmanthe


Elle pensa soudain à He Wuji : "Je l'invite à manger un bol, voilà tout !" Cela faisait plusieurs années qu'il l'aidait, de l'aiguisage des couteaux à l'entretien de son lopin de terre.
Elle fit cuire les nouilles rapidement, de sorte qu'elles fussent un peu croquantes, puis les sortit de la casserole. Elle ôta son tablier et partit en petite foulée chez son voisin. He Wuji était en train de balayer sa cour. Elle lui prit le balai des mains et dit :
- Viens avec moi.
- Que se passe-t-il ? Je n'ai pas encore dîné. Ça peut sûrement attendre.
Yang Fenfang le tira en silence par la main.
- J'ai fait cuire trop de nouilles, j'en ai fait deux bols au lieu d'un. Viens m'aider à les finir, d'accord ?
Elle avait dit cela en riant. Il sourit à son tour, sans un mot.
- Eh bien ? Tu ne me remercies pas ?
- Tu m'invites pour finir tes nouilles, ce n'est pas une invitation sincère. Pourquoi te remercier ?
Ils se regardèrent et rirent de bon coeur. Leurs éclats s'élevèrent en volutes vers le ciel et se dispersèrent gracieusement...
Yang Fenfang disposa les deux oeufs au plat dans un petit bol qu'elle tendit à He Wuji, des deux mains. Celui-ci ne fit pas de manières, et les avala sans autre forme de procès.
- C'est bon ?
- Très ! Tu ne sais pas aiguiser les couteaux, mais tu es bonne cuisinière.
Ces mots remplirent Yang Fenfang de satisfaction. Elle prit son bol et commença à manger.
He Wuji termina son bol en quelques bouchées. Voyant que Yang Fenfang n'avait pas fini le sien, il posa ses baguettes. Embarrassé, il se leva. Il alla à la table aux tiroirs pour allumer la radio, qui diffusait une chanson cantonaise. "Les nuages colorés poursuivent la lune". Les nuages flottaient dans le ciel, l'eau coulait dans les coeurs, c'était mélodieux et doux. Il avisa un roman sur la table, le prit et commença à le feuilleter. A sa surprise, une photo tomba par terre. Il se baissa pour la ramasser au moment où Yang Fenfang s'approchait de lui. Ils étaient face à face.
- Qui est-ce ?
- Liu Qingsheng.
- Qu'est-ce qu'il fait ?
- C'est un militaire, un capitaine.
- C'est un ami de la famille ?
- Non.
- Alors pourquoi tu as sa photo ?
- C'est ma soeur qui me l'a donnée.
Les questions s'enchaînaient avec naturel et les réponses étaient franches, une vieille habitude entre eux depuis leur enfance.
- C'est un prétendant qu'on te présente ?
- Hum...
- Tu l'as rencontré ?
- Non, pas encore.
- Quand vas-tu le rencontrer ?
- Dans deux jours.
- Tu as envie de le rencontrer ?
Cela tournait à l'interrogatoire. Yang Fenfang sourit tristement.
Soudain, il lui prit les deux mains et les serra très fort, riva ses yeux dans les siens, à la fois honteux et timide. Il avança d'un pas, puis l'attira vers lui de toutes ses forces, pour poser ses lèvres sur son oreille et murmurer :
- N'y va pas, je te veux.
Il lui embrassa les yeux, les joues, elle résista un peu mais très vite sa passion la gagna. Il l'embrassa sur les lèvres, les tendres lèvres de Yang Fenfang, avec douceur et force. Un seul baiser et en un instant son corps était étrangement différent, comme embrasé. Et le coeur de He Wuji déborda, bouleversant le cours de sa vie tranquille. Il n'avait jamais songé à épouser Yang Fenfang et maintenant il la désirait tellement ! Il lui chuchota à l'oreille :
- Fenfang, ne pars pas avec lui, tu me feras cuire des nouilles, j'aiguiserai tes couteaux.
- Hum, hum.
Elle n'avait pas la force de répondre.
Leur baiser renforçait leur excitation. Au bout d'un long moment, Yang Fenfang se dégagea de son étreinte puis s'écarta de lui avec force. Elle se retourna, prit son visage dans ses mains et se mit à sangloter, les larmes coulant entre ses doigts. He Wuji étendit ses longs bras pour l'enlacer de nouveau. Ses mains caressèrent sa poitrine, pleine et douce comme ses lèvres. Il enfonça son visage au creux de son cou et se mit aussi à sangloter. Leurs larmes se mêlèrent, les digues se rompirent et l'innocence de leur jeunesse fût emportée.
- Demain soir, attends-moi.
He Wuji essuyait de ses doigts les larmes de Yang Fenfang.
- Ne viens pas.
- Si, je viendrai.
- Non, ne viens pas !
- Si, je dois venir !
Elle articula, mal à l'aise :
- J'ai peur.
- Tu as peur de moi ? Nous nous connaissons depuis toujours. C'est plutôt de lui que tu devrais avoir peur.
Yang Fenfang comprit qu'il parlait de Liu Qingsheng. Face à sa détermination passionnée, elle ressemblait à un flocon de neige tombant du ciel.
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