Voici donc la thèse : elle est que, depuis ses tous premiers pas, le scoutisme catholique français portait en germe des débats irrésolus et probablement insolubles, débats qui se sont fait jour avant même que les Scouts de France fussent fondés, qui ont ressurgi vingt ans après leur fondation, ont agité les décennies suivantes et ont finalement engendré une explosion dans les années 1960. Les cendres de cette explosion ne sont pas retombées et ne retomberont pas, car ce qui a allumé la mèche est beaucoup plus grave, fondamental même, que les seules questions que posait le scoutisme de Baden-Powell. C'est la société et la nation françaises, leur histoire, leur évolution ; c'est l'Eglise, son histoire en France et son évolution ; c'est un siècle de mutations, d'idéologies et de guerres. S'il y a trois grands mouvements catholiques aujourd'hui, c'est qu'il y avait trois frères dans le même berceau. Ces frères ont grandi. Ils ont tous trois quitté le foyer commun et fondé des foyers propres. Il n'est pas toujours facile d'être du même nom et de tempéraments différents. Le génie français, qui est un génie de parole, de concept et de désaccord, a fait le reste. Frères irréductiblement différents, mais frères quand même.
Ce à quoi nous sommes appelés, nous le savons quand nous savons qui nous aimons. Notre vocation, c'est ceux que nous aimons.