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Citation de Osmanthe


Les jeunes filles et les jeunes femmes savent toutes également faire ce métier. Leur charge n'est en rien inférieure à celle des hommes, ni leur allure plus lente. Elles sont spécialisées dans le transport des produits frais. Peut-être est-ce que l'on trouve que les denrées imprégnées d'eau conviennent particulièrement au genre féminin ; les hommes en tout cas, n'affichent que mépris à l'idée de porter ce genre de marchandises. Ces "maîtresses femmes" sont grandes et gracieuses ; leurs chevelures noires d'encre, enduites de brillantine, se laissent aisément lisser, ou comme on dit localement, "une mouche s'y posant se tordrait la patte". Elles portent un large chignon derrière la tête, qu'elles entourent d'un ruban rouge qui se remarque de loin. Elles trouvent toujours quelque chose à piquer sur le côté de leur chignon. Pour la fête de la "Pure Lumière", elles y mettent une boule de saule, qu'elles réalisent en mordant le bout de jeunes branches de saule ; elles parviennent ainsi à donner aux feuilles jaune tendre et à l'écorce des branches la forme d'une toute petite boule. Pour la fête du cinq du cinquième mois lunaire, elles fichent dans leurs cheveux une touffe de feuilles d'armoise. A l'époque des fleurs fraîches, elles mettent une fleur de gardénia ou de laurier-rose. Et lorsque ce n'est plus la saison des fleurs, c'est une fleur découpée dans du tissu rouge qu'elles piquent dans leur chignon. Comme elles portent la palanche tout au long de l'année, leurs vêtements s'usent vite aux épaules. Ils sont souvent rapiécés, mais les pièces ne sont pas de la même couleur : ce contraste est devenu, pour ainsi dire, la caractéristique de l'habillement des femmes de Danao. Les paniers de leurs palanches remplis de chataîgnes d'eau violacées, de macles bleu-vert, de racines blanches de lotus, vingt jeunes femmes marchent en se suivant, effleurant le sol de leurs pas comme le vent caresse les saules. Quel spectacle magnifique !
Elles gagnent de l'argent comme les hommes, marchent et s'assoient comme eux. Lorsqu'une bourrasque survient, elles s'assoient, les jambes croisées largement ouvertes. Comme les hommes, elles mettent, pieds nus, des sandales de paille ; seule différence, leurs orteils rouges, passés à la balsamine. Elles ne s'interdisent pas un langage cru : elles parlent de la même façon que les hommes, et se servent des mêmes mots pour injurier les gens. Quand elles chantent des airs de travail, elles n'écartent pas des morceaux comme : "la fille est une valve !".

Extrait de "La chronique de Danao"
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