Éponine Simonet

Daehyun était un petit homme adorable. Il faisait certes un mètre soixante-dix à dix sept ans, mais c'était un mètre soixante-dix d'amour et de douceur à longueur de journée.

Il était fier mais il savait surtout ce qu'il allait faire ce soir. Leur échange de regard était espionné par leur groupe d'amis. Une personne qui venait de faire son entrée dans le bowling les regardait. Elle n'arrivait pas à détourner les yeux alors que cela lui brisait le cœur, elle s'infligeait un supplice à elle- même parce qu'elle était incapable d'accepter cela. Les yeux d'Eunjun devinrent rouge. Rouge, la couleur de la passion et de l'amour, cette couleur prenait tout son sens lorsqu'on voyait ses yeux humides de tristesse et de douleur.

Daehyun craignait de n'avoir pas assez de conversation avec Armin mais en fin de compte, les silences en disaient plus que leurs paroles. Ils avaient compris qu'ils se sentaient tous deux à l'aise en présence de l'autre. Ils allaient pouvoir continuer à se parler normalement par message, rien n'avait changé. Ils en étaient certains.

Derrière l'écran, c'était facile de s'inventer une personnalité et une vie.

"Bonne nuit" était devenu une litote, deux mots qui disaient peu mais qui laissaient entendre bien plus.

Ce robot, ce pirate informatique, cet individu, homme ou femme, avait bouleversé son quotidien sans même le savoir, avec deux simples mots répétés inlassablement à toute heure du jour et de la nuit ; «Bonne nuit ».

Il échangeait avec une personne inconnue, cela pouvait être n'importe qui. Un psychopathe, un malade mental, un violeur, un sadomasochiste, un meurtrier ou bien d'autres choses qu'une personne saine d'esprit ne pourrait imaginer..

Il n'avait pas l'envie d'être amoureux pour le moment, il avait bien trop de choses à faire. Il n'avait pas le temps d'aimer quelqu'un, les cours lui prenaient tout son temps libre et ce mystérieux inconnu aussi d'ailleurs. Il obnubilait ses moindres pensées.

– Un problème, Daehyun ?
– Mmh... Pas vraiment, marmonna-t-il en réponse.
– Alors pourquoi ce soupire qui aurait pu provoquer la tornade du siècle ?

L'amour est une maladie qui rend fragile face à l'être aimé, mais qui rend aussi incroyablement fort. C'est un sentiment paradoxal, un sentiment qui a une signification bien plus forte que son propre sens. Aimer, ce mot signifie tout et rien, on n’aime pas une personne comme on aime manger une pomme et pourtant le même mot est utilisé.

Il faut du courage pour se lancer dans une relation comme celle-ci. Aimer un homme lorsqu'on est soi-même un homme n'est pas facile. S'engager avec quelqu'un, c'est donner tout son être en gage. Ce n'est pas une décision qu'on prend facilement.

Avouer ses sentiments était la chose la plus difficile que Jason avait eu à faire dans sa vie. C'est plus fort que soi, on ne choisit pas la personne qu'on aime. Will avait comparé cette amitié à celle de Montaigne et La Boétie mais ce qu'il y avait entre eux était loin d'être un coup de foudre de l'amitié. C'était un coup de foutre réel, un seul regard et ils ont été foudroyé par la plus rude des maladies, aucun vaccin pour les soigner.

L'amour pouvait faire mal autant que cela pouvait rendre heureux. Eunjun et Max en étaient la preuve. L'un était heureux et l'autre souffrait et pourtant cela était provoqué par la même personne.

Deux cœurs qui voulaient désespérément s'unir de toutes les façons possibles. Plus rien n'existait, les voix fortes des gens autour, le bruit des boules qui roulaient sur les pistes, les verres qui teintaient lorsqu'ils s'entrechoquaient et les murmures moqueurs de leurs amis respectifs, n'existaient plus.

Il savait qu'il était beau, il n'avait pas cette fausse modestie, il s'en servait beaucoup mais il restait bienveillant. Il n'était ni méchant, ni gentil, il était un jeune homme banal. Il pouvait offrir tout ce qu'il possédait tout comme il avait ses moments de colère. Un adolescent comme tous les autres, pourtant si peu ordinaire aux yeux de Max.

Il était d'ailleurs le genre de personne qui tombait toujours sur une heure miroir en regardant son portable. Mais pour l'instant, ce qu'il regardait et adoré, c'était le petit blond aux joues rebondies face à lui. Il était magnifique, d'une douceur que la barbe à papa elle-même ne pouvait égaler. Max regardait les autres jouer sans les juger, qu'ils perdent ou qu'ils gagnent n'avait aucune importance, la vraie victoire était le souvenir d'un moment de bonheur partagé avec d'autres personnes.

Il ressentait un amour dévorant pour un jeune homme qui était nul au bowling et dont les joues étaient toujours plus rouge qu'une tomate bien mûre au soleil. Il aimait le faire rougir, il aimait le regarder échouer dans ses tirs lors de ses parties de bowling. Trois semaines étaient passées après leur rendez-vous qui avait tout déclenché dans son cœur et son cerveau. Son cœur et sa raison étaient d'accord sur ce point.

Le problème de Max était qu'il ne savait pas ce que ressentait Jason à son égard. Il avait bien remarqué que Jason ne voulait pas d'une simple amitié entre eux. Mais comment savoir s'il désirait lui aussi partager une relation sérieuse et plus intime ? Le seul moyen était de lui en parler mais les risques étaient eux aussi bien présents et le blond ne voulait pas perdre son amitié avec Jason. Si on analysait la situation de cette manière, il était préférable qu'il ne dise rien et qu'il garde les choses telles qu'elles étaient encore aujourd'hui.

Certaines personnes sont faites pour être simplement nos amis, d'autres sont faites pour nous faire vivre bien plus qu'une amitié, il faut simplement savoir reconnaître les deux. Une heure plus tard, Jason avait gagné la partie et pourtant il avait essayé de laisser Max gagner. Il lui avait donné de nombreux conseils. Malheureusement, le plus jeune n'avait réussi qu'une seconde fois un strike avant de refaire tomber sa boule dans la gouttière. Il restait le rayon de soleil nul au bowling et Jason trouva cela étrangement adorable.

Pour être honnête, Jason s'en fichait du poids d'une personne, tout ce qui comptait était sa personnalité, s'il se sentait bien dans son corps et s'il était en pleine forme. Bien sûr, il avait abordé Max pour sa beauté et son sourire sans même le connaître ; mais pour sa défense il était attiré par lui bien plus que de raison.