Asmodeus Mogart était saoul, pas assez saoul à son goût, mais bien trop pour que quiconque pût s’accommoder de lui. Ce n’était pas très important, cependant ; même si le petit bar de Reno était toujours là, Mogart était resté un peu hors phase, juste assez, en fait, pour être toujours dans le plan d’existence qui lui avait été assigné, mais avec une vitesse temporelle accélérée. Ce qui lui donnait totalement accès à l’alcool en stock dans le bar, tandis que les quelques personnes présentes et l’holocauste qui se préparait dehors semblaient immobilisés. C’était évidemment une illusion, et il le savait ; mais c’était une illusion agréable.
Quand la fin du monde est proche, et que vous n’avez plus aucun espoir, vous vous asseyez dans un bar, vous écoutez un fou ivre, et vous le prenez au sérieux. Ça ne pouvait pas faire de mal, ils commençaient à être plus qu’un peu ivres eux-mêmes.
Les moyens utilisés et le matériel requis vous paraîtraient de la magie noire. Je suis bien placé pour le savoir – je crois bien que je suis le modèle de la plupart des diables et démons de ce monde-ci. Donc, pensons-y comme à de la magie, une complète magie. Votre science se consacre à découvrir le fonctionnement des choses, et c’est une façon confortable de faire de la recherche – mais tout cela revient nécessairement à déterminer les lois artificiellement établies pour cet univers par le département des Probabilités. Ces lois ne sont pas valables partout. Ne prenons donc rien pour acquis, et acceptons tout cela comme étant de la magie.
Un beau gros astéroïde passant très près de la Terre. Quelle chance ! On allait voir, on y découvrirait d’énormes richesses minières – un vrai trésor, avait-on dit. Filant vers le Soleil en une orbite parabolique funeste qui l’amènerait trop près du brasier. Il serait réduit en cendres, toute cette richesse perdue. Combien plus intéressant de relever le défi, d’essayer d’en faire un nouveau satellite de la Terre, assez éloigné pour qu’il ne cause pas de dégâts, bien sûr, mais assez proche pour pouvoir être miné et exploité facilement par une Terre dévastée.
Les lois sont très simples, et fondamentales – le péché est défini par ces règles comme tout ce que vous pensez être un péché, dans certaines limites, évidemment. On tient compte de la folie, et tout un ensemble de règles sociales, apprises dès le berceau, définissent ce qu’est la conscience claire. La différence est que si vous commettez un péché, dans votre petit coin, vous pouvez vous sentir coupable, mais ici le péché reçoit immédiatement une punition divine. Merveilleuse expérience de conditionnement pavlovien…
La plupart des gens étaient partis, ou se cachaient dans leur maison, ou priaient dans les églises, espérant quelque délivrance. Elle n’avait jamais eu l’esprit bien religieux, mais elle avait songé à se joindre à eux, en fin de compte. Une fois tous les autres espoirs évanouis, l’église était tout ce qui restait.
Sans hésitation, la femme posa la braise sur la peau de Balthazar, juste au-dessous de la hanche ; la peau grésilla en dégageant une odeur infecte. Même Walters fut stupéfait par la brutalité délibérée du geste.
La réaction du démon, cependant, fut tout à fait inattendue. Au lieu de hurler de douleur, il sembla presque aller à la rencontre de la braise, et son visage prit une expression de ravissement.
« Non, Oona !» cria Mac en enlevant le morceau de bois brûlant des mains de la femme. « Baal aime douleur ! » C’était donc bien vrai. Ce démon était vraiment un malade.
Personne n’a assez de puissance pour changer les règles du monde, encore moins de l’univers où il ou elle se trouve – mais nous pouvons nous mettre à plusieurs si quelque chose de monstrueux arrive et qu’il faut arranger les choses.
La justice divine frappe également chacun. Et ça fonctionne plutôt bien : laissez tomber une pièce d’or, ici, et tout le monde va se précipiter pour vous la rendre.
Nous ne pourrons pas vous introduire dans les bons univers tant que vous ne serez pas physiquement et temporellement harmonisés avec leur vitesse temporelle.