Francoise Thom vous présente son ouvrage "Poutine ou L'obsession de la puissance" aux éditions Litos.
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Ainsi l'imprégnation par le soviétisme, l'influence délétère de la "zone" engendrent une misanthropie généralisée, la haine de soi et la haine de l'autre, ce qui entraîne une très importante conséquence politique. Si l'on considère l'homme comme intrinsèquement pervers, vénal et enclin au crime, on ne peut le vouloir libre, le régime politique doit avoir pour but essentiel de l'empêcher de nuire, et seule une dictature peut s'acquitter cette tâche. p. 23
Citation de Lénine (1913) :
"Pour nous les frontières n'ont pas d'importance, ce qui compte est de conserver l'union des travailleurs de toutes les nations pour lutter contre la bourgeoisie de toutes les nations."
La nation est absente dans cette conception : n'existent que les grandes puissances, leurs élites avec les territoires qu'elles contrôlent. Poutine préfère d'ailleurs la notion d' "Etat civilisation". La souveraineté est avant tout à ses yeux la capacité d'inclure les autres de sa sphère d'influence. C'est pourquoi le président russe pense l'espace post-sociétique (voire l'Europe entière) comme un terrain où s'affrontent les groupes contrôlés par le Kremlin et les groupes contrôlés par les Occidentaux, les Etats-Unis surtout. La Russie se sent existentiellement menacée par le voisinage avec des pays qui ne sont pas soumis à des régimes sous influence du Kremlin. L'une des motivations sous-jacentes de la politique étrangère russe est la volonté de cloner à l'extérieur (et pas seulement dans l'espace ex-soviétique) le système poutinien, avec tout ce que cela implique : oligarques locaux corrompus "amis de Poutine", liens avec la criminalité organisée, propagande de la haine, manipulation des élections, complotisme, etc. Pour réaliser cet objectif, le Kremlin met en oeuvre les moyens traditionnels de la politique impériale de la Russie tsariste : création d'Etats clients, incorporation des élites périphériques dans l'establishment de la métropole, cooptation des élites des pays visés, promesses de garanties de sécurité en échange de la vassalisation, utilisation de l'intimidation et de la force.
p.138-139
La Russie se sent existentiellement menacée par ce qui n'est pas elle et ce qu'elle ne contrôle pas. Elle compense ce sentiment de vulnérabilité par l'agressivité, finissant par susciter une réaction des pays occidentaux, réaction qui va à son tour alimenter sa paranoïa. Ce cercle vicieux s'explique par la réaction pré-politique des relations internationales, qui celle des hommes du Kremlin (et d'une bonne partie de la population russe). p.185
Comme les hommes sont à ses yeux des pantins, Poutine a pour priorité le perfectionnement des techniques de manipulation : "il y a trois moyens d'agir sur les hommes, a-t-il un jour déclaré sur un ton badin, en 2000. Le chantage, la vodka et la menace d'assassinat." La parole, pour lui, n'exprime pas des pensées ou des sentiments, elle est un pur instrument servant à se rendre maître de la volonté d'autrui, à "recruter" l'interlocuteur, ou bien une couverture visant à tromper l'adversaire. L'exigence de vérité n'existe pas pour lui, et quand ses interlocuteurs se choquent de ses mensonges, il y voit une hypocrisie. Cet homme, que son épouse a un jour comparé à un "vampire" est incapable de percevoir le monde autrement que comme un rapport de force et ses relations avec autrui autrement que comme des opérations de manipulation, de séduction, de contrôle, de soumission et d'humiliation. Il divise ainsi le genre humain en deux catégories : les gens sur lequel il a barre (parce qu'il les a "achetés", parce qu'il est en mesure de les faire chanter, ou les deux), qu'il considère comme faisant partie de son réseau, comme étant "des nôtres", et ceux qu'il ne contrôle pas, à l'égard desquels il sera toujours méfiant, quelque bien disposé qu'il soit par ailleurs. Comme il envisage le genre humain sous l'angle du chantage possible, son attention se porte spontanément vers le sordide, le scatologique et l'obsène. Évoquant un jour Schubert devant un groupe d'écoliers, le président russe ne trouva rien de mieux que de leur rappeler que ce compositeur était mort syphilitique du fait de ses mauvaises fréquentations féminines. Des hommes, Poutine ne perçoit que la bassesse, les tares et les failles. Toute la propagande du Kremlin s'inspirera de cette vision, qu'elle s'efforcera d'exporter hors des frontières de la Russie.
p. 64/65
De 1960 à la fin des années 1980, 35 millions de peine ont été prononcées. En 1997,on compte encore 900 000 détenus en Russie. Aujourd'hui, un homme russe sur quatre a connu la détention, dans certaines villes sibériennes un sur deux, voire toute la population masculine. La "zone" a imprégné la société russe. Cette influence est attestée dans l'évolution de la langue depuis la fin des années 1980: celle-ci s'est "criminalisée" à tel point que l'argot des prisons et la novlangue des truands ne choquent plus personne, le président Poutine lui-même en fait largement usage.p.12
En bon officier du KGB, Poutine conçoit la politique comme une suite d'opérations spéciales. Les participants n'ont besoin de savoir que ce qui les concerne directement ; l'information doit être strictement contingentée, et seule la direction a le droit d'accéder au tableau complet. p. 65