Donc il est résolu, destin inexorable,
Qu'une éternelle nuit me rende misérable !
Père de la clarté, dieu des Perses, soleil,
Vis-tu jamais un cour dans un trouble pareil ?
Mon frère ne vit plus, et je vois son image,
Oropaste n'est plus, et je vois son visage ;
Et tout ce que je vois incertain et douteux,
M'empêche de les voir, et les montre tous deux.
Je crains peu tous les traits de leur faible courroux ;
Vous êtes seule à craindre, et je ne crains que vous ;
Vous êtes ma Princesse, et toute ma puissance
Serait contre vos traits sans force, et sans défense.
Qu'est-ceci, d'où me vient cet avis salutaire ?
Est-ce amour, est-ce haine, est-ce zèle, ou colère ?
Est-ce pour m'avertir, est-ce pour m'alarmer ?
Je connais son grand cour, j'en dois tout présumer.
Dans l'effroyable état où ton crime m'a mis,
Je me vois sans parents, sans Dieux, et sans Amis.
Ah ! sentiments mêlés de joie et de murmure,
Qui vaincra de vous deux, ô devoir ! Ô Nature !
Ozias, parlant au chœur des Bétuliens
Peuples impatients étouffez ce murmure : quelques maux, quelque soif que Bétulie endure, soumettez-vous toujours aux décrets éternels et soyez malheureux sans être criminels.
Ozias
La vertu de Judith, un nom si respecté, m'ont fait tout oublier, et rang et dignité; et je sens malgré moi, lorsque sa voix m'appelle, certain charme secret qui m'entraîne vers elle.
Judith
Qu'aux deux bouts de la terre à jamais on publie qu'une femme elle seule a sauvé Bétulie, et qu'un peu de beauté fut le fatal écueil où le tyran a vu briser tout son orgueil.
Misaël
Présumez-vous si fort de vous, de vos appas ?
Judith
Présumez-vous si peu du Ciel qui me l'ordonne ?