AccueilMes livresAjouter des livres
Découvrir
LivresAuteursLecteursCritiquesCitationsListesQuizGroupesQuestionsPrix BabelioRencontresLe Carnet

Éd. Cosmophonies [corriger]


Livres populaires voir plus


Dernières critiques
Les Terres Rouges

Coup de foudre pour Ile Eniger, dont l'écriture a suscité en moi une émotion poétique renouvelée. C'est au détour d'une critique de Moovanse qu'elle m'apparaît, hologramme de mots déambulant par citations éparses. Je le suis, parcourant le fil des émotions qu'elle a tissés, toile sensible et vibratoire où dialoguent le désir d'incendie et le "petit matin mouillé". L'inconnue m'échappe d'abord. L'entrevoir ne suffit plus. Je veux pouvoir lire et relire, m'approprier son sel, explorer ses secrets.

J'entre enfin dans Les terres rouges. Ce recueil me semble une clef. L'écriture ne serait-elle pas cela même qui permet d'attiser la passion, d'en capter la source dans "l'eau d'un baiser, l'arbre d'un dos, le sel d'un aveu" ? De la sublimer par un subtil agencement où se rejoignent l'être et le monde ? Ainsi me voilà la spectatrice privilégiée de cette alchimie, qui transforme la page vide, peu à peu, en un jardin printanier. "J'écris, dit-elle, je mouille mes doigts à la flache du ciel, les appuie fortement sur le papier. L'encre révèle une famine".

Le désir de nommer les choses, de leur accorder une place, semble inassouvi. Ce qui procure la joie d'exister, comme la vague, va et vient dans un éternel mouvement, "emmène le bonheur" à l'image des étoiles qui "filent". La poète évoque alors la figure absente, celui qui ne s'inscrit que dans les mots et l'attente désormais : "je te voudrais là" ; celui qu'elle appelle "l'homme de mes cahiers", qui laisse la trace d'une sensualité et d'un désir encore prégnants: "Le souvenir respire/Et ma nuque brûlante/Garde trace de toi". L'écrire, c'est l'invoquer, convoquer la sensation de l'étreinte, la réinventer, rester vivante…

Je quitte Les Terres rouges, enrichie par l'expérience d'une lecture qui fut à la fois une promenade au pays des mots et un réel moment de complicité avec le poète.
Commenter  J’apprécie          132
Les Terres Rouges

Quand on dit "c'est de la bonne littérature féminine" ou "c'est une poétesse de qualité" il y a toujours un fond de mépris machiste et un sous-entendu de cucuterie vaguement gnangnan ou de sentimentalisme de fond d'alcôve qui a le don de m'exaspérer..



Ile Eniger est une femme, un poète et elle est à peu près aussi gnangnan qu'un Eluard qui viendrait de rencontrer Gala, ou qu'un Aragon à qui on dirait du mal d'Elsa, si vous voyez ce que je veux dire...



Quel feu, quelle flamme, quelle force exacte dans le mot, quelle nuance dans la couleur, quelle évidence dans l'image, quelle musique dans le vers, quel muscle dans la phrase chez ce petit bout de femme discrète, réfugiée dans l'arrière-pays niçois entre les "terres rouges" et la mer bleue!



Ile Eniger dit la passion amoureuse avec une violente sensualité, un désir impérieux et une pudique discrétion pourtant.



Elle dit sa mère disparue avec tant de douceur que le dialogue entre elles se renoue dans une sorte de vie perpétuelle - celle que donnent seuls la poésie et l'amour inconditionnel.



Elle dit surtout le mystère formidable de la nature, fait d'un silence troué de cigales et d'oiseaux, elle dit la présence hiératique de ce pays de pierres chaudes; elle chante les "Terres rouges" de l'Estérel, terres de passion et de chaleur face au grand enroulement bleu des vagues qui bercent, attirent, fracassent éternellement la terre aride qui la borde.



C'est très beau, cela se savoure à petites gorgées comme on sirote un vin blanc sec et glacé, avec quelques olives, sous le pin parasol ou le chêne vert, après un bain de vagues vivifiant et agité, un bain de remous salés entre les récifs déchiquetés et tranchants comme des mâchoires de squale



Merci à Moovanse, la marine, de m'avoir fait découvrir cette voix si personnelle et si forte...
Commenter  J’apprécie          275

{* *}