| Yokay le 13 août 2023
Bonjour à tous
J'ai donc relu ce roman, que j'avais lu il y a très longtemps, et comme je ne me souvenais pas de l'intrigue ni de la fin, je l'ai presque découvert. Pour info j'ai une vieille version, ancienne traduction. Je l'ai trouvé très prenant tout de suite. Le contexte totalitaire, l'ambiance glaciale, sclérosée, de méfiance, de délation, d'absurdité, tout est parfaitement décrit et rendu. J'ai eu un coup de mou sur les 40 pages du traité politique de Goldstein, car c'est une redite à peine plus développée de tout ce qui a déjà été amené précédemment dans l'histoire. Cette partie m'a un peu saoulée et ralentie. Et la fin est à la hauteur du récit, la machine à broyer les âmes est implacable. Pas de fin miraculeusement heureuse pour faire plaisir et rassurer le lecteur. C'est parfait.
Hasard heureux qui m'a fait le lire avec un regard halluciné : Comme je suis partie en vacances en Bulgarie, j'ai emporté et lu un auteur Bulgare ds le cadre du challenge Globbe-trotteur. Et il se trouve que livre dont je disposais n'est pas un roman mais le récit biographique de l'auteur ("L'homme surveillé", de Vesko Branev) qui en 1957 a tenté de fuir l'emprise du KGB lorsqu'il était à Berlin est en passant à l'ouest, et s'est fait capturer, et rapatrier en Bulgarie où il a d'abord été emprisonné et interrogé puis libéré, et a vécu sous la surveillance invisible et quasi constante de la Sécurité d'Etat durant 40 ans, jusqu'à la chute du mur de Berlin en 1989. Il raconte la lecture de son dossier secret dans les années 2000, quand il a eu accès aux archives. La surveillance et les délations effectuées par ses proches, contraints de le faire s'ils ne voulaient pas subir le même sort, devenir traitres à la patrie. L'autocensure de tout ce qu'il dit et écrit, pour ne pas déplaire aux diktats du parti et tout simplement trouver du travail et survivre. Le roman de Georges Orwell a été écrit en 1948 (il a inversé les derniers chiffres pour situer son action et donner le titre). Vesko Branev décrit l'invasion de son pays par les russes en 1944, et la mise en place effective du totalitarisme en 1948 (dissolution du parlement, interdiction de la presse indépendante, impossibilité d'avoir des informations objectives sur le reste du monde, élimination des opposants et intellectuels, nationalisation de tous les commerces). Georges Orwell est allé au bout extrême de la description du processus totalitaire, mais souvenons-nous que celui-ci a eu réellement lieu dans ses grandes lignes sous les années de l'emprise de Staline. Le plus flippant est donc cela : ce roman de SF dystopique a eu lieu et a encore lieu dans certains endroits du monde ! La nouvelle forme de surveillance est en cours, les "télécrans" qui savent tout de nous, nous les avons dans la poche. Les caméras dans les rues qui peuvent suivre une personne partout où elle va, c'est en place en Chine. Ce grand roman visionnaire qui s'est inspiré très tôt du fascisme et des dérives du communisme, reste entièrement d'actualité. Il est bon de l'avoir en tête. Je suis ravie de l'avoir relu.
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