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Critique de 79Hyena


Ce livre n'est pas un témoignage sur la guerre, c'est une histoire d'amour, intense et pleine de souffrance, entre les deux protagonistes du roman. Les mauvaises herbes dont parle le titre ce sont les inadaptés, les marginaux, à l'image de cette fille et de son père, fondamentalement libres et dissidents ; une mauvaise herbe est une herbe qui pousse là où elle ne devrait pas, ce qui est le sentiment partagé par les deux personnages.


L'exil occupe une place importante dans ce roman, puisque la jeune fille y sera confronté à l'âge de douze ans, forcée de quitter son Liban natal pour émigrer en France. Mais c'est l'exil intérieur qui prend beaucoup plus de place, Dima Abdallah nous montre à quel point on peut se sentir étrangers aux autres, même dans un environnement familier. Hostile et violent, le monde dans lequel évoluent ces deux personnages ne leur correspond pas, ils le rejettent et le critiquent farouchement.

Le père, un intellectuel aux tendances libertaires, est une personne libre et en souffrance au milieu de la guerre confessionnelle qui sévi à Beyrouth, à laquelle il est complètement étranger. Sa fille, quant à elle, est à la marge de ses camarades et amis, semble à côté de la plaque, n'arrivant pas à s'adapter aux autres, que ce soit durant son enfance à Beyrouth ou plus tard lorsqu'elle grandira à Paris. C'est de cette différence qu'ils parlent dans ce roman, à quel point elle est dure à vivre dans un univers qui se veut uniforme et réglé comme du papier à musique.

"Je me fais l'impression d'un cube qu'on essaye de faire entrer dans un moule rond et étroit. On a beau tourner le cube dans tous les sens, ça n'entrera pas, on a beau en limer même un peu les coins pour les arrondir, ça reste un cube." (p.66)


Le sujet central de ce roman est finalement la relation père-fille ; la mère et le petit frère sont tous les deux très peu présents dans le roman, tout comme la guerre civile qui n'est finalement qu'abstraite. Un véritable huis-clos s'installe entre les deux personnages, dont le dialogue s'articule autour de la distance qui s'installe petit à petit entre eux, de la fêlure des liens qui unissaient leur famille, de leur incapacité à s'adapter à un monde devenu fou, le tout conduit par un fil botanique ; ils se retrouvent dans cet amour des plantes au quotidien, dans ces mauvaises herbes auxquelles ils s'identifient.


C'est un premier roman au style percutant que Dima Abdallah fait paraître chez Sabine Wespieser. Une très belle histoire sur les inadaptés de ce monde, une ode à la liberté et à l'amour, une très belle découverte pour la rentrée littéraire 2020.


"Je suis d'la mauvaise herbe,
Braves gens, braves gens,
C'est pas moi qu'on rumine
Et c'est pas moi qu'on met en gerbe..."
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