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Critique de Fleitour


Le bleu entre le ciel et la mer pourrait être un livre de plus sur la Palestine, un livre de plus sur les luttes qui agitent les palestiniens et les Israéliens pour la survie de deux peuples. En réalité le livre de Suzan Abulhawa est singulier. Ce livre est une histoire de femmes, de femmes palestiniennes qui ont tout perdu en 1948, et qui cherchent à se reconstruire dans ces camps de réfugiés.

Chacune des femmes présentes dans cette saga raconte un parcours personnel, leurs combats forment le décor douloureux et incontournable de leur destin.

Glaçant, le début du livre revient sur l'attaque israélienne du village de Beit Daras mis à feu et à sang. C'est le début de l'exode pour rejoindre Gaza et tenter de reconstruire une famille dans l'exil. C'est Nazmiyé la fille aînée qui s'occupera de la mère vieillissante, et qui deviendra le pilier de la famille.  "Il n'y a que ma femme qui soit plus belle que l'océan.p 92 "

Émouvante est la jeune Mariam, la soeur aux magnifiques yeux vairons qui passe ses journées à écrire en compagnie d'un ami imaginaire. La mémoire de Mariam hantera la vie de la famille après sa disparition dans des circonstances dramatiques.

Poignante sera la vie de Nour la petite-fille de Mamdouh, son Jddo, Mamdouh s'est installé aux États-Unis, il va connaître la fortune, mais Nour, elle, connaitra tous les aléas de l'exil, toutes les épreuves qu'une jeune fille peut rencontrer quand on est livré à elle-même dans un environnement hostile. C'est la mort de son grand-père qui va lui donner Nzinga, une femme qui aura l'audace de l'enlever aux griffes de son beau père.

Accablante est devenue la vie de Mazen le fils révolté." Mazen avait bondi pour protéger son père, se dressant au-dessus de la mêlée, et quand un des sionistes infiltrés pointa une arme contre sa tête, Mazen se raidit avec une détermination sans faille," Mazen révéla un courage qu'il avait toujours espéré posséder au fond fond de son coeur.

Vos balles n'atteindront jamais mon humanité. P 95

Farouche apparaît la détermination de toute la famille pour reconstruire. "Nous nous mîmes à tirer profit des vestiges du jour, à édifier des maisons à partir des décombres, à nous baigner là où les poissons nageaient, à créer de l'amour à partir de rien, a chargé nos lance-pierres et à fouiller dans les ordures pour récupérer de quoi faire des cocktails Molotov".p 159

Euphoriques seront les habitants de Gaza quand Mazen fut enfin libéré, le soldat israélien capturé allait être échangé contre un millier de prisonniers politiques palestiniens.

Heureuse Nour qui n'était pas fâchée cette fois d'avoir un gros ventre. Elle vit une rivière et le petit garçon de ses rêves apparu, pour la leçon d'arabe, Khaled s'écria-t-elle ! C'était toi durant tout ce temps ? Et Nour se réveilla au son de l'appel à la prière.

"Livrés à cette solitude, nous nous rendions compte à quel point nous étions minuscules à quel point notre terre était petite et vulnérable. Mais, du fond de notre dignité outragée, nous entendîmes tel un murmure les paroles prononcées jadis par une vieille femme : cette terre un jour se relèvera." p399

Chaque matin, ma téta Nazmiyé accrochait le ciel, semblable à un drap bleu, p65, cette incantation poétique me semble plus en harmonie avec le message de Suzan Abulhawa, plus authentique que le « par la volonté d'Allah le miséricordieux nous surmonterons tout ceci ». p 205

Suzan Abulhawa a choisi de nous envoûter par la qualité de ses images par la force de ces femmes dont elle raconte l'histoire. Des femmes qui sans cesse construisent et reconstruisent sans se soucier de gagner ici car elles savent au fond d'elle-même qu'elles gagneront demain. Gagner pour une femme palestinienne c'est rassembler une famille, une grande famille autour de la grand-mère et du grand-père autour de téta Nazmiyé et mon grand-khalo de Mamdouh, leur Jddo, quand les fils et les filles sont enfin de retour.

Un très beau livre d'une énergie désarmante.
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