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Critique de LiliGalipette


Hazel et Fiver sont deux frères lapins dont la seule préoccupation est de chercher à manger en compagnie de leurs amis. Leur vie aurait pu se poursuivre sur ce mode idyllique, mais Fiver est doté d'un don de prémonition : « If I start feeling there's anything dangerous, I'll tell you. » (p. 18) le jeune lapin est en quelque sorte les yeux et les oreilles de la garenne, et son frère Hazel a toute confiance en ses capacités. « He can often tell when there's anything bad about, and I've found him right again and again. » (p. 23) Et voilà qu'un projet immobilier est prévu sur la garenne. Chief Rabbit, grand maître de la communauté des lapins, ne prête pas foi aux avertissements de Fiver et refuse de quitter la garenne. Mais Hazel et Fiver ne comptent pas attendre l'arrivée du danger et décident de trouver un nouveau lieu où s'installer. Ils sont suivis de nombreux lapins pour qui ce voyage sera la plus extraordinaire des aventures.

Ce fut un vrai plaisir de suivre les péripéties de ces adorables petits mammifères dont les prénoms originaux résonnent très joliment sur la garenne : Hazel, Fiver, Dandelion, Bigwig, Hawkbit, Silver, Buckthorn, Toadflax, Cowslip, etc. Cette longue odyssée pour atteindre les garennes de Watership Down est pleine de dangers et de difficultés. Pour ces petits mammifères, traverser une route ou franchir une rivière sont de grandes épreuves. « To rabbits, everything unknown is dangerous. The first reaction is to startle, the second to bolt. » (p. 34) Oui, les lapins sont peureux. Non, ils ne sont pas des héros sans peur et sans reproche. Mais, peu à peu, ils vont surmonter leurs terreurs, éprouver leur courage et oser l'incroyable.

Ce roman n'est pas simplement un texte de littérature jeunesse. Richard Adams développe un univers riche et complet dans lequel les lapins ont un langage propre avec des idiomes originaux. Les lapins ont également une religion particulière et une mythologie riche de légendes dont le lapin El-Ahrairah est le fabuleux héros. Entre roman d'aventures et conte philosophique, Watership Down est un texte frais, pétillant, drôle et émouvant. Les jeunes lecteurs ne bouderont pas leur plaisir, mais les adultes y trouveront aussi de quoi se régaler.

Cette lecture m'a rappelé un dessin animé que j'ai regardé des dizaines de fois avec mon frère et mes soeurs. Si vous ne connaissez pas Les animaux du bois de Quatre-Sous, je vous le conseille ! Et je savais que j'avais déjà entendu parler du roman de Richard Adams. Grâce à Internet, bingo ! le livre est cité dans le film Donnie Darko où un grand lapin maléfique fait des siennes auprès d'un adolescent. Encore un chef-d'oeuvre que je vous conseille !

Voici un billet avec peu de citations, mais j'ai été bien prise par la lecture et par mon dictionnaire franco-anglais. Et puis on me reproche de donner des citations non traduites, alors je m'abstiens ! J'ai vu que le roman a été adapté plusieurs fois, mais je n'arrive pas à mettre la souris sur une version sous-titrée ou traduite. Alors, appel aux bonnes âmes : je ne suis jamais rassasiée de lapins, en tout bien, tout honneur !

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RELECTURE DE NOVEMBRE 2018

Dans la garenne de Sandleferd, au cœur du Hampshire, les lapins mènent une vie paisible. Mais le jeune Fyveer a le pressentiment terrible d'une catastrophe. « Mais la chose arrive... On n'y échappera pas. Je t'assure, l'herbe est pleine de sang... » (p. 17) Hélas, Cassandre aux longues oreilles, il n'est pas pris au sérieux par le Maître de la garenne. Seul son frère, Hazel, croit en ses visions et accepte de quitter au plus vite les lieux. Suivis de Rubus, Rahmnus, Bigwig, Dandelion, Pipkyn, Léondan, Spidwil, Akraan et Silvère, Hazel et Fyveer se lancent dans l'aventure de leur vie, à la recherche de la garenne qui saura les abriter. Cette courageuse petite troupe traverse des rivières, affronte de nombreux ennemis, creuse des terriers, s'allie à d'autres animaux, combat des garennes perverties, affronte mille dangers et souffre mille blessures. « L'insupportable et terrifiant voyage reprit son cours, interrompu seulement par de nouvelles alertes. » (p. 74) Guidés par les visions de Fyveer et entraînés par le courage d'Hazel, les lapins atteignent la colline de Watership Down, mais leurs aventures ne s'achèvent pas là. L'épisode le plus épique est sans doute celui où les lapins convainquent les hases d'une autre garenne à les rejoindre. Cet enlèvement des Sabines – pardon, des lapines – a tout d'un exploit mythologique. Les épreuves rapprochent les membres de la nouvelle garenne. Chaque personnage a des qualités propres : loyauté, courage, obéissance, sagesse, etc. Certes, ces animaux n'échappent pas à leur nature profonde de proie. « Pour les lapins, tout ce qui est inconnu est dangereux. Leur premier réflexe est de sursauter, le second de déguerpir. » (p. 36) Mais les petits animaux à longues oreilles ne sont pas peureux et ils savent se battre avec une férocité étonnante pour leur survie et la protection de leur garenne.

Quel plaisir d'avoir relu ce livre dans la nouvelle traduction des éditions Monsieur Toussaint L'Ouverture. Ma première lecture était en version originale et j'avais manqué bien des merveilles dans ce roman incontournable. Il y a de magnifiques descriptions de la campagne anglaise qui ont largement élargi mon lexique botanique. J'ai également pu saisir toute la beauté et toute la subtilité les légendes qui parlent de Shraavilshâ, le héros mythique des lapins qui s'oppose sans cesse au roi Darzine ou au prince Arc-en-Ciel, mais qui ne perd jamais le soutien bienveillant de Krik, seigneur absolu qui brille dans le ciel. En français, il est également plus facile de comprendre la langue des lapins : vous aussi, vous comprendrez rapidement ce qu'est un kataklop ou un vilou ou ce que signifie faire raka et farfaler.

Ce que j'apprécie particulièrement dans ce roman, outre le fait qu'il met les lapins à l'honneur, est que tout est vu à hauteur de moustaches. Ainsi, un développement immobilier qui retourne le sol de la garenne est vu comme un cataclysme divin, et la terrible scène de massacre des lapins par les hommes en a toute la triste envergure. À plusieurs reprises, le narrateur omniscient pointe les différences entre les humains et les animaux, toujours au désavantage des premiers. « Il y a tant d'horreurs sur la terre... / Et elles viennent des hommes. [...] Les autres vilou se contentent de suivre leur instinct, et Krik les inspire autant qu'il nous inspire. Ils vivent ici-bas et doivent bien se nourrir. Les hommes, eux, ne s'arrêteront pas avant d'avoir détruit la Terre et éradiqué les animaux. » (p. 186) Plaidoyer pour la vie, voire manifeste antispéciste avant l'heure, Watership Down célèbre la nature et ses habitants et ne manque pas d'accuser les bipèdes convaincus de leur supériorité. « Les bêtes [...] ne se comportent pas comme les hommes. S'il faut se battre, elles se battent ; s'il faut tuer, elles tuent. Elles ne passent pas leur temps à inventer des moyens d'empoisonner l'existence des autres créatures ou de leur faire du mal. Elles sont pétries de bestialité et de dignité. » (p. 279)

Bref, cette relecture m'a enchantée et elle ne sera pas la dernière. En dépit de sa violence, ce roman a quelque chose du texte-doudou. Il est plaisant d'y revenir pour retrouver des personnages que l'on aime et une histoire qui réchauffe le cœur.
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