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Critique de ATOS


ATOS
19 septembre 2013
Lire, écrire. Lire ce qui est écrit. Écrire ce qui a été lu, ce qui est lu, ce qui sera lu.
Écrire et lire. Lire et écrire. Encore. Toujours.... Voyons un peu pour mieux savoir.
Pourquoi, comment, pour quoi, vers quoi lisons nous ?
Le lecteur est un promeneur solitaire qui marche en amitié. Il ne connaît pas la solitude.
Tout au contraire, la solitude d'un lecteur n'existe pas.
On est toujours en amitié lorsqu'on lit.
Trouver, retrouver, trouver, se retrouver.
La lecture est un acte de confirmation. La recherche d'un temps venu, revenu.
Le livre est un appui, il nous porte, le livre est le compagnon de tous nos voyages.

Les lectures de Marianne Alphant. Sa lecture.
Insatiable lectrice. Intarissable de lectures. Lire inlassablement.
Lectrice éperdue. folle de mots comme on peut être folle de joie, folle d'amour. Éprise de livre, de l'esprit des livres.
Des incipits, des titres, des noms d'auteurs, de personnages, de lieux, foules innombrables, visages, voix, images.
Prendre le livre, ouvrir le livre, et puis entrer. Et souvent, encore le reprendre. Parce qu'il revient.

Celui qui lit intensément, le lecteur, celui qui ne peut concevoir sa vie sans livre, sans lecture, qui ne peut déambuler dans le siècle sans un livre entre les mains, qui garde en lui l'importance de ce qu'il a lu, qui espère l'infinie possibilité de ce qu'il lira, celui qui est en lecture constamment, sait, comprend tout ce que Marianne Alphant est entrain de nous confier en amitié.

On se rappelle des instants de lecture comme on se rappelle de certains baisers, de certains jardins, de certains matins. On se souvient quel livre vous accompagnait « ce jour là », celui qui vous a tellement manqué « cette nuit là ».
Cette phrase qui est entrée en vous au moment d'un bonheur, ou à l'endroit même où est tombé le jour.

Le lecteur est un marcheur, il sait ce qu'il ne connaît pas encore. Alors il marche. Il se demande lui même, parfois, si à tant galoper il ne veut pas tout simplement fuir le siècle, s'en échapper, l'oublier, tant son comportement peut paraître compulsif, addictif. le marcheur pense, réfléchit. Pourquoi marcher ?
L'acte de lire n'est ni dépendant, ni involontaire. C'est le contraire. C'est un acte d'émancipation, la perte de toute dépendance.

On plonge dans un livre, on n'y chute jamais.

Le lecteur marche, il ne veut pas s'arrêter de marcher. Il ne fuit pas, il ne quitte rien, il va, il rejoint. C'est le livre qui le porte là où il se doit.

Il marche, et, parfois, un coup de mauvais sort, vient le heurter de plein fouet. le coeur et l'âme lui dérobent ses sandales ailées. Il cesse de marcher. Il chute. La colonne cérébrale est touchée, le livre tombe de ses mains. le deuil le rattrape, le devance parfois, le lecteur se sent dépassé.. La douleur est toujours la prière d'un deuil.
On s'arrête. Lire, encore ?
On ne peut plus marcher parce qu'on ne sait plus comment se relever. Cloué à terre. «  je lisais, que m'est il arrivé » ?
Avant, on lisait, on savait lire, on lisait comme on respirait. C'était tellement naturel qu'à se voir ainsi impuissant à lire, on ne sait plus vraiment qui on est.
On peut faire autre chose, bien sûre, on peut vivre sans lecture.
On peut vivre sans lecture, oui, mais pas quand on sait qu'elle est le conditionnel de l'écriture.
Lire c'est marcher , écrire s'est avancer.
Si je ne marche pas je n'avance pas. Je ne lis pas, tout s'arrête. Ma mémoire, mes instants, mes possibles, je n'écrirai plus.
« Passage de la lecture à la relecture par l'écriture  : Passer du geste de patience au geste d'impertinence. » dit Georges Didi-Huberman.
Reprendre la lecture comme on réapprend à marcher. Relire, lire, repartir. Chausser ses bottes de sept lieues, rejoindre pour retrouver. Ne pas tomber, ne pas sombrer. Ne pas abandonner. Sortir de la nuit.
"And what's her history ? - A blank, my lord." ( Twelfth Night, or What You Will- W.Shakespeare)

On parle souvent de moment de lecture, on devrait penser à ces mouvements de lecture. Lecture de livre, de peinture, lecture de musique, lecture d'images.
Incipits, fragments d'images. Livres, questions d'images. Problèmes. Résolutions parfois.

Quand commence t on vraiment à lire ? Acte de circonstance, acte de conséquence ? Quand a eu lieu le premier pas ? L'origine, le commandement de se mettre en marche ?
Grand père lisait, mais il lisait quoi ? Où sont ces livres ? Il y a lectures comme lectures, comme il y a chemin et chemin. Chemin de route et chemin de ronde. Un lecteur n'est pas un liseur... Ce que tu lis te construit. Peut on connaître un homme par ses lectures ?
« Vous faites de la musique, Monsieur, mais vous n'êtes pas musicien ». Pourquoi ces livres, grand père, pourquoi ces auteurs là... Pourquoi avoir oublié ceux là ?

Que m' a-t- on lu, qu'a- t -on omis de me lire, que m' a- t -on donné à lire, quand ai-je été capable de lire moi même, ma première lecture, mon premier livre, là où tout a commencé. Quand ai je été libre de Pouvoir lire ?
On numérote, on note, on fait des fiches. On s'y perd parfois, on suit le chemin, on découvre des pistes, on s'y retrouve, malgré tout, encore et pour toujours.
Chemin, carrefour, croisement, de la lecture. de tout voyage naissent les rencontres.
Au hasard des rencontres. Au hasard de nos livres. Hasard ? Vraiment ? «  Je suis un enfant trouvé » , faut il y voir la main du destin, la marque de l'absence ?
On prend la main, on la saisit, on la serre, et on la garde le temps de toutes nos nuits.

J'ai découvert l'existence de l'écriture de Marianne Alphant en écoutant la conférence  "Lire, voir, écrire", durant laquelle l'auteure s'entretenait avec  Georges Didi-Huberman..
Je ne peux que vous conseiller de suivre, de lire, cette conférence. Ce qu'elle contient est important :
«  La lecture est une expérience de perte. On entre dans ce qui n'est pas nous. On en ressort avec ce qui restera en nous. C'est un paradoxe. Un passage. »
http://www.dailymotion.com/video/xdjlf7_georges-didi-huberman-lire-voir-ecr_creation#.UWQAvuC-dE9

« Un livre me touche quand il touche à ce qui me laisse abandonné ».

Un livre est comme une main. Il se tend, s'ouvre, se donne, s'offre, vous prend, vous entraîne, vous confie, vous guide, vous porte, vous indique, vous retient parfois.

Le livre , cette petite main dans la nuit.

Au grand jour, maintenant, je peux vous l'écrire  la: « Petite Nuit » de Marianne Alphant m'a profondément touchée.

Astrid Shriqui Garain


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