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Critique de Warrenbismuth


Rappel rapide : un triple assassinat a lieu en août 1952 dans le département rural des Basses-Alpes, en pleine montagne, du côté de Lurs, aux abords d'une ferme familiale, celle de la famille DOMINICI. Les victimes : les trois membres d'une famille anglaise, les DRUMMOND, sauvagement assassinés, à l'arme à feu pour les deux parents, à la crosse de fusil pour leur petite fille de 10 ans. Les enquêteurs sont immédiatement sur les dents, l'affaire s'annonce complexe… et surmédiatisée.

Un flic, SEBEILLE, donne ses informations au compte-goutte, les médias extrapolent, s'empêtrent, évasifs et pourtant définitifs à chaque ruade, la concurrence est vive ainsi que la surenchère. Une famille vit cet affrontement au quotidien, les DOMINICI. Z'ont pas l'air blancs comme neige ceux-ci, avec le patriarche Gaston, 76 ans mais encore vif et peut-être menteur, ce qui est d'ailleurs le cas de son fils Gustave. Les soupçons vont donc rapidement se tourner vers les habitants de la Grand'Terre, les DOMINICI.

Ce sordide fait divers fut en France l'un des plus mémorables et des plus retentissants du XXe siècle, par un acharnement de la justice, des médias et des accusateurs. L'impasse est faite sur une possible histoire d'espionnage dont les ramifications iraient bien au-delà de cette départementale alpine. Pourtant il existait des indices, des pistes, sir DRUMMOND étant un ingénieur très connu pouvant receler de lourds secrets (d'Etat ?). Rien ne fut fouillé en profondeur, au contraire de la vie des DOMINICI, offerte comme une tête sur un billot.

La force de ce récit-témoignage de Jean MECKERT est multiple. Déjà, il se rendit sur place juste après la barbarie, a écouté, interrogé en tant que journaliste. Ensuite il a refusé de prendre part aux thèses de confrontations entre les pro et les anti-DOMINICI, s'en tenant aux faits et aux preuves (maigres). Il ne condamne ni Gaston, ni Gustave, ne les innocente pas non plus. Il flaire, note les détails, les incohérences, les non-dits, les silences. MECKERT ne juge pas. Son précieux témoignage paraît en 1954, c'est-à-dire avant même l'ouverture du premier procès, donc baignant toujours dans le jus de l'affaire, sans franchement de recul, ce qui en donne un documentaire quasi en direct, dans le feu de l'action.

MECKERT n'oublie pas que Gustave DOMINICI est connu pour être un fervent communiste, ce qui en fait un coupable idéal. La politique est d'ailleurs au coeur de l'affaire, comme s'il ne pouvait y avoir d'autre explication rationnelle. Les témoins ne manquent pas, paraissent même étonnamment trop nombreux et trop bavards : combien ont eu l'air de se promener sur une départementale de haute montagne une nuit à une heure du matin alors que par coïncidence on assassinait ?

Sur place le grand Orson WELLES s'est également emparé du sujet, tournant un reportage inachevé sur les lieux du crime, documentaire intéressant à plus d'un titre. Jean GIONO a assisté au procès et rédigé « Notes sur l'affaire Dominici » qui reste aujourd'hui encore une référence. Nombreux furent les supports tout à fait réussis (je pense au film « L'affaire Dominici » de Claude BERNARD-AUBERT réalisé en 1973, avec l'immense Jean GABIN dans le rôle principal). Une affaire démesurée qui par ses nombreux formats vous hante une vie entière. Mais ici chez MECKERT le texte est écrit peu après le drame.

Jean MECKERT ajoute du contenu : des traits biographiques tracés rapidement pour chaque protagoniste de l'affaire, ce qui tend à mieux repérer les acteurs, sans jugement, mais au feeling. Il donne une dimension humaine à ce fait divers d'une rare démesure.

L'affaire DOMINICI ne fut jamais élucidée.

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