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Critique de Carolina78


Cayetano Brulé, le détective de la série créée par Roberto Ampuero, guette au Café Azul Profundo, à Santiago du Chili, un client potentiel dont il ne connait pas l'identité et qui souhaite le voir de toute urgence pour lui parler de « Delenda est Austrolopithecus ». L'individu a précisé qu'il aurait un attaché-case. Ponctuellement, à 22h, heure fixée pour le rendez-vous, apparaît un homme distingué avec un attaché-case.
Pan pan ! Augustin Leucona – c'est le nom du client potentiel – est abattu par balles à bout portant devant les assistants médusés, juste le temps d'apercevoir une moto avec deux passagers prendre la fuite.
Curieusement, le lendemain Cayetano Brulé reçoit une grosse somme d'argent en guise de paiement anticipé de ses honoraires. Il entreprend une enquête rocambolesque, truffée de coïncidences troublantes et de rebondissements invraisemblables, qui va le conduire en Suède, à Cancun au Mexique, en passant par Cuba. Augustin Leucona, s'apprêtait à dévoiler des informations sensibles, au sujet de « Delenda est Austrolopithecus ». Quésako ? C'est une affaire d'état, avec en filigrane la guerre froide, où trempent la CIA, des réseaux d'espionnage et contrespionnage, des multinationales, des agents doubles, des narcotrafiquants…

L'intrigue se veut divertissante, elle n'est que la vitrine ou le montage opéré par Roberto Ampuero pour nous parler de lui et surtout de ses idées politiques.

Je me suis bien faite avoir ! Quand j'ai plongé avec gourmandise dans le Café Azul profundo, je ne savais rien de Roberto Ampuero, je pensais avoir affaire à un bon polar chilien. J'en sors nauséabonde.

Cayetano Brulé est le double de papier de l'auteur. C'est un quinquagénaire exilé cubain, bon vivant, qui aime la bonne chère, les belles filles. Il est bedonnant, affublé de grosses lunettes noires à double foyer, décoré avec de grandes moustaches. Il est habillé de façon anachronique avec une cravate à petits pois, l'auteur pense ainsi nous le rendre attachant. Sinon, il passe plus de temps à manger et à boire qu'à enquêter, et nous avons droit à luxe de détails sur des spécialités culinaires. Malgré son âge avancé et son physique ingrat, il réussit à rendre follement amoureuse la belle jeune suédoise, Kim, aux longues jambes fines bien galbées. de l'aveu même de Roberto Ampuero, il s'accorde des petites faveurs que seule la fiction lui permet !

Le récit se déroule dans des pays que l'écrivain connait bien. A vingt ans, après le coup d'état de Pinochet, le 11 septembre 1973, il s'est déclaré exilé politique ce qui lui a permis d'obtenir des bourses d'étude en Allemagne de l'Est et à Cuba, puis il s'est marié à Margarita Cienfuegos, a côtoyé Fidel Castro et la nomenclature cubaine. Après son divorce, il a vécu à Stockholm et enseigné à l'université d'Iowa. le Café Azul profundo a été rédigé à Stockholm et Iowa City entre janvier 2000 et août 2001.

Donc, dans le café Azul Profundo, il est question de bouffe, d'alcools, de came, de drague, et surtout de politique !

Roberto Ampuero n'a de cesse de vitupérer contre les militants de gauche qui, dès le retour de la démocratie, ont occupé des positions enviables. Quel est le problème ? le problème c'est qu'il a été oublié ! Qu'à cela ne tienne, il aura son heure de gloire, comme soutien de Sebastián Piñera, multimillionnaire, ultra libéral, président du Chili de 2010 à 2014 et 2018 à 2022, il n'aura plus de quoi être envieux en devenant successivement ministre de la culture, des affaires étrangères, ambassadeur au Mexique et en Espagne…

Les Etats-Unis ont massacré le Chili mais pas de la façon dont Monsieur Ampuero le dit ! Ils n'ont pas commandité la révolte du peuple Mapuche. Les indiens Mapuches ont été expropriés de leurs terres par les Chiliens et les Argentins à la moitié du XIXème siècle. Ils revendiquent légitimement justice. C'est un conflit très grave, source de beaucoup de violences qui perdure de nos jours. La région Araucanie est interdite au tourisme.

La communauté internationale s'accorde à citer en exemple le Chili pour son développement économique, mais quel en a été le coût humain ? Les assassinats, les tortures, les disparitions sous Pinochet ont trouvé leur prolongement dans la paupérisation de la population. Je n'appelle pas ça le progrès, j'appelle ça de la régression !

Comme j'ai l'habitude quand je termine un livre, je vais sur Google pour prolonger ma rencontre avec l'auteur. Pour Roberto Ampuero, je trouve une chaine où il peste contre Gabriel Boric, l'actuel président, élu le 11 mars 2022. Faudrait savoir Monsieur Ampuero, vous êtes politicien ou écrivain ?

Roberto Ampuero, est comme Mario Vargas LLosa ultralibéral « momio » (momie) comme on dit au Chili, mais comme écrivain il ne lui arrive même pas à la cheville.

Pour une fois, je peux justifier ma note : une étoile pour m'avoir permis de pratiquer mon espagnol et fixer mes idées, les quatre étoiles qui manquent pour m'avoir énervée et contrainte à faire une critique ennuyeuse non littéraire.

Bon vent à Cayetano Brulé, ça sera sans moi ! Je file retrouver Julio Cortazar.
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