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Critique de 5Arabella


Le récit de ce livre nous entraîne à Višegrad, petit bourg de Bosnie, à la frontière avec la Serbie, où Ivo Andric lui-même a vécu quelques années. le roman est centré sur le pont du titre, de sa construction au XVIem siècle, jusqu'au bombardements qui vont l'atteindre en 1914.

Entre temps, il en aura vu des choses ce pont, car sur la kapia, petite place située dans le milieu du pont se concentre une large part de la vie publique de la communauté, et plus exactement des communautés. Les musulmans, orthodoxes, catholiques, juifs, cohabitent, sans se mélanger, chaque communauté a ses règles, son histoire, ses drames, ses souffrances qu'elle n'hésita pas à faire payer aux autres lorsqu'elle en a les moyens.

Les personnages se succèdent dans les tempêtes de l'histoire. Et tout d'abord, le constructeur du pont, Mehmed Pacha Sokoli, enfant chrétien enlevé par les Turcs en guise de tribut, devenu grand vizir, et qui décida de construire à cet endroit qu'il avait connu enfant un pont. Et tous les autres, qui se succèdent dans les siècles tourmentés. Les générations passent, et seul le pont résiste au temps, image de la beauté durable du rêve de l'homme qui défie le destin qui l'emporte dans le néant. A cette force immuable, s'opposent les vains et éphémères désirs des hommes, leurs haines et ambitions.

Les communautés vivent en s'ignorant, en profitant des moments où elles ont le dessus sur les autres, sans essayer de comprendre ni encore moins d'accepter l'autre. Des siècles de haines et de souffrances, sans aucun véritable dialogue.

Difficile après cela de parler de réconciliation et d'amitié entre les peuples, il faudrait arriver pour cela à dénouer des noeuds de ressentiment tellement vieux, qu'ils ne semblent pas avoir de début.

Et tout cela est magnifié par l'écriture d'Andric, si simple et si modeste à première vue, mais si on si penche de plus près, d'une grande recherche et poésie, d'une limpidité de cristal, d'une grande clarté et évidence.

Une lecture essentielle, pour essayer de comprendre peut être un peu une partie de notre continent, mais surtout pour le plaisir de suivre un grand conteur (lors de son discours du Nobel, pour décrire son art il évoqua les Mille et une nuits) nous dérouler des histoires venues du fond des âges, et qui semblent ne plus avoir ni patrie, ni datation.
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