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Critique de mariecesttout


Avec en exergue cette phrase de Susan Sontag, "Dans la vallée des larmes, étends tes ailes."

Il s'agit d'un récit, celui d'un médecin urgentiste qui apprend, à 35 ans, qu'il est atteint d'un cancer, un lymphome digestif, d'assez mauvais pronostic.

"Pendant quelques années, on voit par les livres, et les livres conduisent vers des brancards et des lits. On le sait, on l'oublie et on se laisse entraîner: on vogue loin de la souffrance, là où rien ne meurt pour se régénérer selon la grande roue de la biologie. Cette masse de connaissances enivre et fait admirer la beauté de l'ordre et la logique de ses défaillances, jusqu'à ce qu'on se retrouve, gêné et maladroit, pour la première fois devant un regard où se lisent la peur d'avoir mal, l'angoisse de savoir, l'angoisse tout court.
Malade, c'était la distance du biologiste que je recherchais: je me plaçais loin de moi et descendais vers l'élémentaire, je faisais face en pensée à cette tumeur et contemplais ce qui menaçait de me désorganiser."

Vient le moment classique du traitement, les interventions, la chimiothérapie.
Et des aides, pour supporter l'angoisse, à chacun les siennes.
Et puis..:
"Au printemps suivant, mon cancer était déclaré en rémission complète. Et là, gourmand de tout et beaucoup plus jeune qu'avant, sans avoir eu besoin de signer de pacte, j'étais un faune sorti d'hibernation."

Après le vide complet, une sorte de deuxième naissance. Avec recherche de sensations et d'émotions multiples, des aventures sexuelles , au départ dans un désert.
A la recherche finalement de sensations comparables sur le plan intensité à celles qu'il vient de vivre. Ce n'est bien sûr plus possible.

"Pour devenir un être cosmique, il fallait errer, ramper, avoir soif, que les yeux brûlent, que la sueur irrite le visage; il fallait chercher de l'ombre, craindre la solitude et regretter de toutes ses forces d'être là; il fallait voir l'horreur du désert et s'y savoir prisonnier; et puis il fallait avoir la chance de s'en tirer…
Rechercher ce qui s'était montré une fois ne pouvait qu'être sacrilège -une imposture. Je ne devais rien désirer. Ni survivre, ni mourir, ni voir.
Le voyage commence lorsqu'on ne choisit plus. Mon désert, c'était un lit d'hôpital."

Une fois compris cela, la vraie re-naissance peut commencer.

Fort beau , honnête et lucide récit d'une expérience vécue jusqu'au bout dans ses conséquences mêmes, et un très bel hommage, encore une fois, à Primo Levi:

"Primo Levi m'aidait à tirer de mon expérience une autre leçon. Comme tout homme jeté dans un des cercles infernaux, sous cette menace continue qui l'y terrorise et à laquelle il s'habitue au point de ne plus la discerner de lui-même, comme tout homme qui se trouve enclos dans une parcelle de ce Mal et qui s'en sort, je portais désormais quelque chose d'infiniment plus important que moi."







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