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Critique de montmartin


2016, des parents, des enfants, des curieux, dont les yeux se fixent sur Hannah institutrice qui vient d'être arrêtée par la police, dans sa salle de classe. Pendant son audition au commissariat elle se souvient.

Retour en 1987, dans le Pas-de-Calais, Hannah a cinq ou six ans, sa famille habite dans une petite maison des mines. Les bacs en zinc, les toilettes à l'extérieur, le poêle à charbon. Les corons, la solidarité, l'intimité partagée. Madame Vache l'institutrice et la découverte de la langue française. La mine qui tire sa révérence, la dernière remontée des mineurs.

L'attrait de la télévision, le collège et le temps des copines, la surveillance incessante du père. L'Amérique, le lieu du rêve de tous les possibles. L'horreur du monde, la guerre en Irak à la télévision comme un grand jeu vidéo avec ses frappes chirurgicales et ses dommages collatéraux dans la population civile. Elle ne comprend rien aux dingueries du monde adulte.

La terminale et la découverte de la philosophie, une science où l'on aime se poser des questions sans fond. La petite fille qui ne se reconnaît plus dans le corps de la femme qu'elle devient. Les études supérieures, la grande ville, elle découvre que tout le monde n'est pas comme elle, elle a honte de sa provenance, elle a mal à sa famille.

Et puis un jour, elle lit Germinal et quelque chose se passe.

Le père qui a quitté la terre sèche et brûlante de son village, la femme qu'il vient d'épouser, son enfant qui vient de naître, il a tout quitté, pour creuser un trou dans une mine. Les mots du père retranscrits tels quels dans un cahier pour expliquer l'histoire de trois mille Marocains envoyés dans les mines du Nord de la France avec la complicité du roi Hassan II et jetés comme des pommes pourries à la fermeture des puits. Des hommes déracinés, traités comme des bêtes, le corps et le coeur déchirés en deux parties.

Une ode à la diversité de la langue française, aux bibliothèques, à la magie des livres. L'admiration d'une fille pour le combat de son père pour faire reconnaître ses droits par la France. Une réflexion sur la désobéissance, sur le métier d'enseignant, sur la montée de l'islamisme et de l'extrême droite sur fond d'attentats terroristes et de la peur qui s'installe dans le pays. Sur le bonheur de ne rien posséder.

Quelques fac-similés de documents d'époques éclairent le propos, le dernier, de la direction du personnel des houillères, intitulé « conseils à la maîtrise concernant le comportement envers les ouvriers nord-africains » termine ce roman social et engagé, résolument ancré dans notre société, porté par une écriture vivante, militante et émouvante.

Un merci infini aux éditions de L'Aube et à Babelio de m'avoir permis de lire ce grand roman en avant-première.
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