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Critique de Presence


Ce tome fait suite à Hard time, c'est le deuxième écrit par Brian Azzarello et il contient les épisodes 151 à 156 de la série mensuelle parus en 2001.

John Constantine est sorti de prison et il souhaite aller mettre les choses au clair auprès des frères du décédé, à savoir leur expliquer qu'il est innocent du meurtre. Il se trouve donc aux États-Unis sur la route en Virginie. Comme tout bon citadin européen, il n'a pas de voiture, mais comme il n'a pas le permis c'est assez logique. Il prend un café et fait du stop pour rejoindre sa destination. La conduite se fait de nuit et régulièrement il aperçoit des cadavres d'animaux sur le bas coté. Son premier conducteur le lâche au milieu de la cambrousse et les occupants de la voiture suivante semblent avoir des projets pour lui. Une fois arrivé dans le patelin, il retrouve les 2 frangins et Rose, une femme qu'il a connu autrefois en Angleterre quand il jouait dans Mucous Membrane. À partir de là, John va jouer au chat et à la souris avec les 2 frères et cette dame, au milieu d'événements dérangeants et de motivations difficiles à cerner.

Brain Azzarello s'est essentiellement fait connaître sur la série "100 bullets" (à commencer par Première salve), une série noire. Il apporte sur Hellblazer le même ton, ce qui peut décontenancer les fans de la première heure de John Constantine. Si l'horreur est toujours là et si le ton est toujours aussi noir, cette histoire ne comporte presqu'aucun élément de magie. D'un autre coté, il faut bien comprendre qu'une série aussi longue que celle-ci ne peut rester intéressante et survivre que si chaque scénariste est autorisé à donner son point de vue sur le personnage. En l'occurrence, c'est ce que fait Azzarello, et il le fait plutôt bien. La séquence d'ouverture capture très bien le fait que John Constantine est un anglais qui doit se dépatouiller avec les différences culturelles des États-Unis (et pourtant Azzarello est le premier scénariste américain à écrire les histoires du personnage). Pour la suite de l'histoire, Azzarello dose savamment les informations qu'il distille pour obliger le lecteur à chercher le lien entre les séquences, la logique et les manigances qui se cachent derrière les événements. John Constantine n'a rien perdu de sa capacité à manipuler les uns et les autres pour arriver à ses fins et il n'a pas peur de se salir les mains et ça ne le dérange pas que les salauds payent très cher leurs exactions. Ce qui ne semblait pas gagné d'avance et qui se trouve à la fin, c'est qu'Azzarello a glissé un soupçon de réalité sociale dans son récit. Pour être complet, il faut dire que ce scénariste a adopté un style narratif assez décompressé pour permettre au dessinateur d'avoir le temps d'installer une atmosphère.

Et justement le style de Marcelo Frusin présente des particularités marquées et pleines de caractère. Il a également collaboré avec Azzarello sur la série Loveless. La première particularité qui frappe est qu'il utilise un encrage assez soutenu, mais avec des formes plutôt rondes (ce qui est inattendu puisque les rondeurs évoquent plus le monde de l'enfance que celui des adultes). Mais ces rondeurs sont contrebalancées par l'ombre exagérée des regards qui intensifie les expressions des visages, ainsi que par les rictus de John Constantine. Frusin le dessine régulièrement en train de sourire et de montrer les dents de la mâchoire supérieure ce qui indique qu'il prend un plaisir sadique à manipuler son interlocuteur. Rapidement également, le lecteur constate que Frusin prend un malin plaisir à représenter les personnages en ombres chinoises. Loin d'être un raccourci graphique pour avoir moins à dessiner, ce choix visuel s'avère parfaitement adapté pour aiguiser l'appétit du lecteur. Au lieu de tout lui montrer, il laisse dans le vague les détails que tout voyeur aimerait connaître. de cette manière, les nuits de Virginie semblent habitées de beaucoup d'horreurs tapies dans l'obscurité. Les grimaces des 2 frères sont emplies de menaces non formulées, etc. Frusin a trouvé le parfait équilibre entre ce qu'il montre et ce qu'il suggère, et les ambiances en deviennent glauques à souhait.

À condition de ne pas s'arcbouter sur une vision monolithique du personnage de John Constantine, cette aventure plonge le lecteur dans une noirceur qui n'a rien de manichéenne et le titre tient toutes ses promesses (il fait référence à la maxime qui veut que la route qui mène aux enfers est pavée de bonnes intentions). La même équipe guide John Constantine pour la suite du voyage dans Freezes over.
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