De temps en temps, grâce à Dieu, les caractères héréditaires sont comme des boomerangs dotés d’un défaut de trajectoire.
À partir d’un état d’âme déterminé, pensa-t-il, le moindre symbolisme retentit aussi lugubrement que le glas dans les cachots de notre esprit.
À quoi pense un homme au réveil ? Que lui livre l’entente de l’inconscient avec la réalité ? Quel est l’objet de ses premières et vagues réflexions, alors qu’il s’efforce de rétablir son autorité sur la vérité ? Quels sont les images, les sons, les murmures, les tumultes qui affluent à son esprit ?
Il songe probablement à sa propre personne, ou à la femme qui dort à ses côtés.
Il pense peut-être à ses enfants. Ou à ses parents, à sa maîtresse, à son petit déjeuner, à un ami en difficulté, aux échéances de ses impôts, au dîner entre amis du samedi suivant, à son mal de dos, à la politique, à ses contretemps professionnels, à la voiture neuve que son concessionnaire lui a proposée en leasing, à Dieu, aux buts marqués la veille au soir, à sa maison de campagne, à ses vieilles ambitions enlisées on ne sait où, aux chevilles d’une collègue, aux films de Christopher Nolan, à la motion de coït avancée par la lascivité fugace de son érection matinale.
Pas Davide.
Davide pense à la mort.
Cela se produit peu après 6 heures. Il ouvre les yeux, recouvre le minimum de netteté intellectuelle nécessaire pour affronter la perspective du néant éternel et rive son regard au plafond.
Il n’est pas fou.
Il n’est pas gravement malade.
Il n’est pas non plus déprimé.
Certes, il rencontre des problèmes avec son supérieur direct, le docteur Martinelli, prince de la médecine toscane, virtuose de la neurochirurgie, qui semble le prendre pour cible depuis un moment.
Certes, il a des ennuis avec son voisin, Massimo Lenci, propriétaire de la boîte de nuit qui a troublé pendant plus d’un an la paix du quartier tranquille où il vit, dans le sud de Lucques, avant qu’une injonction salvatrice de la mairie ne vienne rétablir le calme.
Rien d’irrémédiable, bien sûr. Pas de quoi le ranger parmi les éternels affligés, les thanatophiles ou les candidats au suicide.
Et pourtant, Davide pense à la mort.
Il considère cela comme une sorte de rituel, un antidote aux périodes compliquées qu’il traverse régulièrement depuis plus de quinze ans. Il ouvre les yeux, fixe le plafond en bois et réfléchit aux conséquences du terme de la vie.
(INCIPIT)