Le Fils

Elle les aime ses deux fils, oui, mais les aime-t-elle également cette mère pétrie de conformisme, d'idées reçues, d'a priori, formatée par la famille, la profession, la religion, et la société bien pensante d'une province embourgeoisée jusqu'à la nausée. Une bonne mère au dessus de tout soupçon qui s'agenouille chaque dimanche devant une statue de sel mais reste muette face à la détresse et au silence de son fils.
Car c'est bien ce qu'on éprouve, la nausée, devant cette fuite et cet aveuglement. Être mère c'est aimer, sans restriction, sans condition, jusqu'à la garde de son coeur, de ses sentiments, jusqu' à donner sa vie pour son enfant. C'est accepter que cette chair qui est la nôtre soit différente (et ne devrait on pas, au lieu d'en avoir honte, être fière de cette différence du moment qu'il l'assume ?). Un fils ou une fille homo, ce n'est ni un malheur, ni une bénédiction, juste une option de bonheurs différents. Par ses mots de tous les jours, ses questions directes, Marine Bachelot-Nguyen nous force à la sincérité, à la remise en question de nos certitudes et de nos convictions et on pleure avec cette mère qui pleure le Fils qu'elle a finalement accepté d'aimer tel qu'il était. Mais trop tard.