La modération est un acte éminemment complexe qui coïncide mal avec les conditions de travail de celles et ceux qui l'exécutent. La masse de contenus publiés tous les jours sur les plateformes exerce une pression sur les conditions de travail, et rend difficile la garantie d'un temps minimal d'interprétation.
La modération des contenus sur les réseaux sociaux et les espaces d'échange en ligne est aujourd'hui devenue une véritable industrie, qui emploierait plus de 100 000 personnes dans le monde. Le marché est diversifié et se décline à travers différents modèles. Certaines entreprises du web ont des services en interne dédiés à la modération. Il existe également des prestataires externes spécialisés, qu'une plateforme peut solliciter pour effectuer des tâches de modération ponctuelles ou permanentes. À ces deux formes d'organisation s'ajoutent les plateformes de microtravail, qui visent à payer à la tâche des internautes volontaires pour effectuer à distance l'évaluation de contenus.
La conception américaine de la liberté d'expression trouve son origine dans la notion de « libre marché des idées » qui structure l'organisation du débat public aux États-Unis. Cette vision de l'espace public postule que la libre concurrence des idées est le meilleur moyen de faire émerger la « vérité » dans le débat et que, face à la confrontation d'opinions divergentes, les citoyens, en tant qu'êtres rationnels, se rallieront logiquement à la proposition vraie, juste ou souhaitable. Selon cette conception, la censure n'est jamais une solution efficace pour combattre des discours problématiques : c'est par l'opposition d'arguments contraires que l'on fait taire les avis fallacieux, donc en produisant des contre-discours plutôt qu'en interdisant.