Citations sur La petite Bédéthèque des Savoirs, tome 26 : Le Roman-Photo (8)
Le roman-photo a quelque chose de fondamentalement collectif. On n'y trouve pas d'auteurs comme au cinéma.
Le genre n'a pourtant jamais cessé de se renouveler et de s'adapter, dans la forme et dans le fond, toujours au plus porche du quotidien de ses lecteurs.
Le genre n'a pas bonne réputation. C'est une lecture pour adolescente rêveuse, femme au foyer, vieille fille de province ou lectrice souffrant de bovarysme.
L'humour bête et méchant d'Hara-Kiri trouve sa forme privilégiée dans le roman-photo. Plus humoristiques, moins intellos que ceux de la contreculture situationniste, ils n'en dénoncent pas moins à grands coups de poing dans la gueule la culture des tabous et des préjugés qui étouffaient la société française d'avant mai 68. Gébé, auteur de bandes dessinées, est fasciné par l'image fixe dont on peut s'imprégner, à l'instar des photos d'exploitation affichées à l'entrée des cinémas. Pour lui, la photographie, par rapport au dessin, apporte un effet de réel supplémentaire aux histoires, même les plus invraisemblables.
Il existait à l'usage des amateurs, des manuels qui expliquaient toutes les ficelles du métier : choix du sujet, rédaction d'un scénario, story, choix et direction des acteurs, règles de base des diverses étapes techniques (photographie, mise ne page, impression…), le tout d'un point de vue très axé sur la technique. Ces livres ne s'adressaient pas à des artistes en herbe, mais à des jeunes à la recherche d'un métier.
En 1949, Michelangelo Antonioni réalise un court documentaire sur le roman-photo qui dresse un portrait du genre au succès populaire immédiat : histoires d'amour, rêve, évasion, luxe, exotisme faisant particulièrement rêver en cette période d'après-guerre.
Si le genre est considéré comme mineur, il offre une diversité insoupçonnée. Le roman-photo qui fut au cœur de la culture visuelle des années cinquante peut nous apprendre encore bien des choses sur notre rapport à l'image moderne.
Nous Deux, le magazine, est plus obscène que Sade. - Roland Barthes