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Critique de CDemassieux


Le Médecin de campagne a des allures de pause narrative dans l'oeuvre De Balzac, qui fait couler sans éclats, comme un ruisseau de montagne, l'histoire qu'il raconte. Certes, ce roman ne se hisse pas à la hauteur des Père Goriot, Eugénie Grandet ou du diptyque Illusions perdues / Splendeurs et misères des courtisanes, mais il serait injuste de lui nier ses qualités intrinsèques, à savoir une ode à la vie simple et la nature. Car : « L'amour pour la nature est le seul qui ne trompe pas les espérances humaines », dit le texte.

Le lecteur progressiste d'aujourd'hui, friand d'anachronismes – au point, peut-être, d'exiger qu'on cause de la souffrance animale lorsqu'on évoque les chasseurs-cueilleurs du Paléolithique ! –, verra sans doute dans ce récit une vision réactionnaire de l'existence. Car, ici, la fiction ne tend qu'à un but : exposer un idéal de société selon les convictions de l'auteur qui, je le rappelle, écrit son roman sous la Monarchie de Juillet. Une telle proposition aura donc de quoi faire bondir : « Les prolétaires me semblent les mineurs d'une nation, et doivent toujours rester en tutelle. […] La tutelle des masses me paraît donc une chose juste et nécessaire au soutien des sociétés. »

Le Médecin de campagne représente ainsi une mine d'or pour qui voudrait en savoir plus sur les convictions tant sociales, politiques que religieuses de l'auteur, qui en profite pour écorner son époque du désenchantement, sombrant dans l'individualisme, après les ouragans collectifs de la Révolution, du Consulat et de l'Empire : « Maintenant, pour étayer la société, nous n'avons d'autre soutien que l'égoïsme […] Nous sommes dans le siècle des intérêts matériels et du positif. Ce dernier mot est celui de tout le monde. Nous sommes tous chiffrés, non d'après ce que nous valons, mais d'après ce que nous pesons. » Étrange écho à notre société du XXIe siècle…

Dans ce livre du temps arrêté par les montagnes, qui entourent avec bienveillance le phalanstère du docteur Benassis, il est un souvenir qui plane, telle une divinité, c'est Napoléon, dont le plus bel hommage demeure celui d'un de ses soldats, un campagnard racontant, avec une familiarité touchante, l'épopée de son héros. le fantôme de Napoléon est encore doublement convoqué à travers Genestas d'une part, officier d'Empire qui n'a jamais renié son amour pour l'Aigle, et le docteur Benassis d'autre part qui, en sa qualité d'homme providentiel, est surnommé le « Napoléon de notre vallée ».

Lorsque le monde de Benassis est solidement établi dans le récit, les principaux protagonistes se découvrent alors en racontant leur passé, à commencer par le docteur. Ainsi, on découvre un tout autre Benassis, qui fut un temps la proie des tentations de la capitale, sachant que : « Les émotions de Paris sont cruelles pour les âmes douées d'une vive sensibilité. […] Tout est piège et douleur à Paris pour les âmes qui veulent y chercher des sentiments vrais. »

Autant de confidences qui convergent vers cette idée très chrétienne : la rédemption. Parce que les hommes et les femmes sincères dans leurs regrets cherchent le repentir par quelque action bénéfique aux autres. Raison pour laquelle Benassis deviendra « une soeur de charité pour tout un pays ».

Le Médecin de campagne pourra donc paraître simpliste dans ses développements. Toutefois, il n'en reste pas moins un roman attendrissant et fort bien écrit. Mais c'est De Balzac qu'il s'agit, pas du dernier prix Goncourt !






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