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Critique de LesCahiersdeCorinne


Chitra Banerjee Divakaruni distille dans chacune de ses oeuvres une écriture magique où elle fait marier le rêve, le réel, l'imaginaire, le fantastique dans une prose harmonieuse. Plonger dans ses livres, c'est entrer dans un monde où les barrières de la rationalité s'envolent pour laisser la place à d'autres possibles, moins terre à terre et plus énergisants. J'avais déjà énormément apprécié cette sensation dans La Maîtresse des épices, et je l'ai retrouvé ici avec plaisir.

Dans ce récit, une polyphonie de voix colorées et empreintes chacune d'une personnalité complexe s'enchaîne, s'entremêle et se croise. Mère et fille font résonner l'écho de leurs coeurs pour nous emmener à la découverte de leurs cheminements, de leurs vies et des choix qui les ont guidés tout au long de leur existence. Cette échange de voix rapide et parfois étourdissant fait progresser l'histoire et nous donne envie de poursuivre la lecture sans nous interrompre. L'une des beautés de ce récit est l'importance accordée au rythme : rythme du quotidien, rythme de la nostalgie, de la plongée dans le passé, rythme du pinceau mais aussi de la musique, muse de Sonny, l'ex-mari de Rakhi. Au fil de la lecture, notre esprit vogue dans des temporalités, des espaces et des battements de coeurs multiples. Cela donne beaucoup de saveur au récit.
Et en parlant de saveur, elle est au centre de tout : du salon de thé aux cuisines indiennes qui viennent chatouiller nos narines, dilater nos pupilles de ravissement et éveiller nos papilles, on embarque dans des parcours gustatifs qui sont d'autant plus relevés par les contextes dans lesquels ils se déploient. Situés au début des années 2000 pour le temps présent, l'auteure situe ces personnages dans l'actualité de l'époque et les fait s'inscrire dans les événements de manière subtile mais forte.

On se promène entre le passé et le présent, l'Inde et les Etats-Unis, tiraillé de toutes parts par les regrets, les espoirs, les envies, la joie, l'amour, avec tout au bout, l'envie de profiter pleinement de l'instant, sereinement et en appréciant ce que nous entoure. Rakhi est un personnage écorché mais pleine d'amour, on s'attache beaucoup à elle et en dépit des émotions paradoxales qu'elles traversent en quelques minutes parfois, elle arrive à canaliser notre concentration. La galerie de portraits qui composent son paysage quotidien contribue à donner encore plus de force au récit, à le vivifier et le colorer. Bella, la meilleure amie, Sonny, l'ex-mari aussi insupportable qu'attendrissant, son père, qui la touche et l'irrite au plus haut point, Jona, la petite fille spontanée et malicieuse, la méchante dirigeante du café Java, qui va l'obliger à transformer sa boutique si elle espère survivre. Tous viennent faire rebondir le récit à point. Mais c'est surtout à partir du moment où Rakhi va entamer la lecture du journal intime, avec l'aide de son père, que l'histoire s'accélère et se densifie, que les éléments se recomposent et que la peinture prend vraiment forme.

Il n'y a que la fin qui m'a un peu laissée perplexe, sûrement car je n'ai pas eu toutes les réponses à mes questions (quelle curieuse je fais !) et que beaucoup de points restent en suspens. Mais c'est aussi en ça que La Reine des rêves est un vrai moment de vie, où l'on ne contrôle pas tout, où l'inconnu fait aussi partie du quotidien et tant mieux.

Un livre que je vous recommande chaudement, tant pour l'histoire que pour les émotions qu'il nous fait vivre.
Lien : http://wp.me/p12Kl4-qE
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