La folie, disait Foucault, c'est "l'autre" de la raison. Les symptômes de la maladie mentale s'opposent toujours, d'une manière ou d'une autre, à la norme sociale.
La propagande hygiéniste profile, en contre-champ des bonnes pratiques, des faciès à mettre au pilori (le père alcoolique, le libertin ou la prostituée, le tuberculeux crachoteux ou la ménagère malpropre) qui illustrent autant d'attitudes irresponsables du point de vue de la communauté.
Aujourd'hui enfin, la "dépressivité" massive éclaire l'angoisse collective d'une dépression économique imprévisible dans le contexte du marché mondial. Pire, la mutation actuelle du marché du travail reposant d'abord sur l'intelligence, l'adaptation et la mobilité, exige des travailleurs qu'ils soient habités en permanence d'une pensée "positive". Ce qui menace donc, ce sont les "idées noires", le cauchemar captivant, la faiblesse dépressive, ce trouble psychique comme nouvelle vulnérabilité, "l'autre" actuel de la raison économique.
Passer d'une approche étiologique à une approche épidémiologique, c'est induire un autre processus réflexif et actionnel : ce qui importe est moins le motif principal (incohérence génétique, aberration chromosomiques, accidents, traumatisme social) que l'interaction de facteurs de risques entre eux et avec les facteurs personnels dans une situation donnée. On passe ainsi d'une conception causale (ou multicausale) du handicap à une approche complexe de la situation de handicap.
Les espaces de sociabilité exigent des individus qu'ils "s'oublient" un peu, au moins dans la forme, pour rejoindre l'espace collectif des conventions locales. La "politesse" sociable exige de plus que l'acceptation des conventions locales n'apparaissent pas comme une imposition contraignante, ni comme une transcription automatique dans les formules énoncées "sans âme".