Michele comprit que les habitudes figent le monde et la vie. Et qu'il avait suffi de monter dans un train à un horaire différent pour comprendre que tout était en mouvement.
Pense seulement que la vie est toujours un risque, pour tout le monde. Si tu fais attention et que tu utilises ton cerveau, c'est un risque contrôlé. À n'importe quel moment tu peux t'arrêter et revenir en arrière... à moins que tu sois mort. C'est tout. Or tu ne me sembles pas mort.
La vie ne finit jamais de faire des cadeaux, dit-elle d'une voix pétrie de tranquillité et de vieillesse. Parfois elle nous a apporté des douleurs dont nous nous serions passés. D'autres elle nous a fait goûter de grands moments de bonheur.
Le chambres d'hôtel ont quelque chose de commun avec les wagons des trains: ce sont des parenthèses de la vie accordées en prêt, des lieux de transit pour des identités différentes et inconnues qui se relaient entre un départ et un retour, jour après jour, dans l'attente d'un réveil ou d'une arrivée. Ils appartiennent à tout le monde et à personne, comme le hasard ou le destin.
Il avait remonté les montres, se laissant draper par le tic-tac rythmé qui lui rappelait le bruit de la pluie sur les voies, quand il attendait le train les soirs d'hiver, debout sur le quai.
Ne pas pouvoir pleurer ça fait mal, tu sais? Parce que la douleur ne sait plus par où sortir et elle te reste à l'intérieur, enchaînée, elle marche dans ton sang, comme une bête en cage qui fait les cent pas, toute la journée et le lendemain et le lendemain... Et toi tu voudrais la faire sortir, tu voudrais t'en libérer, mais tu ne sais plus comment faire.
Tomber c'est comme n eplus saisir la vie. On la sent encore courir dans son sang, pulser dans son coeur, briller dans ses yeux, mais on ne respire pas. C'est l'instant où on aurait besoin de sa volonté et de sa conscience pour activer les poumons. Parce que quand on respire, on le fait sans réfléchir, la respiration est comme la pensée: elle se produit. Elle se produit quand on est distrait et qu'on vit.
Tomber, ça fait frôler la frontière de la vie. Et pendant qu'on pense, en tombant, à comment ça a pu se passer et à ce qui se passera, la vie discute avec le destin pour décider de notre sort. Entre-temps, on ne respire pas. Et ce n'est qu'au dernier moment qu'on le regrette.
La vie c'est aujourd'hui, non ? Hier est déjà passé et demain n'existe pas encore. Un jour demain deviendra hier, et ainsi de suite.
En servant son cafe au deuxieme client qui attendait, Elena sourit. Pout-être que la source de son amour pour Michele venair de là : deux douleurs qui se rencontrent, se reconnaissent et cherchent, ensemble, à devenir un même espoir. Un vol vers le ciel de deux moineaux aux ales brisées. Alors, quelle importance si les gens la trouvaient « un peu timbrée »?
Tout le monde croit que ceux qui essaient d'être heureux sont fous.