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Critique de alouett


A l'approche de la trentaine, Elisa a des doutes. Elle qui a pris l'habitude de vivre au jour le jour, dans l'insouciance et sans s'engager, elle commence à changer son fusil d'épaule. Et s'il était temps de penser à un plan de carrière ? Et si le moment était venu de s'assumer enfin, comme tout adulte est censé le faire ?

Quoiqu'il en soit, cette crise existentielle marque la fin des petits jobs alimentaires dont elle se contentait jusqu'à présent. Et c'est sans nul doute le moment opportun de regarder sous un autre angle la relation qu'elle a depuis plus de 10 mois -un record pour elle- avec Paul. Mais que va-t-il advenir de cela ?

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Pour quelles raisons ais-je souhaité découvrir cet album ? Tout d'abord, parce qu'il est dessiné par Michel-Yves Schmitt qui m'avait déridé, ainsi que Monsieur Lutin, avec Où es-tu Léopold ? Ensuite, le sujet de l'album m'intéressait : une quête identitaire, une quête de repères affectifs et professionnels. le dossier de presse de l'éditeur était alléchant sur ce point. Enfin, et parce que je ne suis jamais avare en découverte, c'était l'occasion de découvrir Isabelle Bauthian que j'avais croisée dans En chemin elle rencontre… et que je souhaitais découvrir suite à des avis que j'avais lus sur un autre de ses albums : Anathème.

Me voici donc partie à la rencontre d'Elisa. Je me suis attachée à ce personnage fictif… pire, je me suis reconnue en elle. Rien d'étonnant lorsqu'on lit la dédicace que la scénariste a rédigé en préambule :

“à tous les amis, connaissances et rencontres de passage, adultes, ados attardés, inadaptés involontaires, rebelles malgré eux, idéalistes, ambitieux, naturels, artistes réalistes, terre à terre décalés, inquiets de l'avenir ou confiants en eux-mêmes, qui m'ont permis de créer le personnage d'Élisa”.

Je ne sais pas à quelle catégorie j'appartiens, mais ce qui me plait le plus chez Elisa, c'est sa franchise. Un personnage touchant, sincère et qui porte très bien cette quête féminine que nous partageons toutes plus ou moins. Cette audacieuse héroïne a de la prestance et une force de caractère appréciable. La survenue de ses doutes existentiels ne la contraint pas à piétiner ses propres convictions. Elle n'y va pas par quatre chemins pour dire aux autres ce qu'elle a sur le coeur, ce qui a tendance à heurter les gens de son entourage, à commencer par ses collègues de travail qu'elle côtoie quotidiennement.

Le scénario d'Isabelle Bauthian mêle dialogues et voix-off d'Elisa. A feuilleter, l'album semble verbeux mais ce n'est pas l'impression que l'on a lorsqu'on est dans la lecture. La narration à la première personne permet à l'auteure de développer un personnage assez critique sur lui-même, son introspection est intéressante d'autant que la jeune trentenaire est loin d'être dupe quant au bilan à faire sur son parcours. Ce qui motive Elisa n'est donc pas la question du paraitre mais bel et bien de se donner les moyens de construire une vie qui lui ressemble. Et force est de constater que si son comportement a tendance à la desservir dans les relations qu'elle peut nouer avec les uns et les autres, au final… elle atteint ses objectifs. Petit bémol de lectrice : je trouve que le récit manque de rythme. A plusieurs reprises, on hésite quant à la manière d'accueillir l'état d'esprit du personnage : mélancolie ou simple passage à vide ? Aigreur passagère ou difficulté à assumer ses choix ? En somme, on est face à une banale « tranche de vie ». Il n'y a pas de suspens à cette histoire si ce n'est la question de savoir ce qu'il va advenir de cette prise de conscience individuelle. La force du récit tient au fait qu'il s'appuie sur une jeune femme crédible, censée et plus mature qu'elle ne le laisse à penser. Isabelle Bauthian a trouvé un bon compromis pour traiter son personnage : entre doutes identitaires, respect de ses convictions et inscription dans la vie active, cette lecture ludique aborde assez finement un sujet de société actuel.

Coté graphique, je découvre le travail de Michel-Yves Schmitt (puisqu'il signe Où es-tu Léopold ? en tant que scénariste). le trait est parfois maladroit sur certaines expressions, j'ai notamment eu du mal à accepter l'absence de jeux de regards entre les personnages. du moins, le fait que le dessinateur leur ait placé de simples billes blanches et vides à la place des yeux a tendance à déposséder ces individus d'une quelconque âme. Dans cet album, les visuels sont totalement au service du scénario et la découpe efficace des planches donne finalement rythme et fluidité à l'ensemble. La mise en couleur est assurée par Virginie Blancher. La grisaille et le côté conventionnel de la colorisation des premières planches laissent peu à peu la place à des teintes plus toniques, ce qui fait écho au processus dans lequel le personnage principal est inscrit. A mesure qu'il s'affirme, les couleurs gagnent en force et en contraste.

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Lien : http://chezmo.wordpress.com/..
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