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Critique de domi_troizarsouilles


En cette période estivale où les cosy mysteries sont plus que jamais mis en avant (dans les librairies près de chez moi ou dans mon catalogue été de Belgique Loisirs), et notamment la nouvelle série historique de cette autrice dont les deux premiers opus en traduction française sont désormais publiés à titre posthume, il était temps que je me lance dans cette saga qui semble la plus connue, la plus longue aussi (et en plus je viens de voir qu'elle continue, en vo du moins ! forcément avec un autre auteur désormais), et certainement celle qui a donné ses lettres de noblesse à ce genre pourtant si éloigné d'un policier plus traditionnel.

Cette saga est d'ailleurs si connue qu'il me semble utile d'avancer quelques précisions avant d'approfondir mon avis sur ce premier tome :
- J'ai vu il y a quelques années (probablement en 2017, année renseignée pour la diffusion sur la chaîne publique française) les premiers épisodes télé tirés de cette série… et j'ai le souvenir que, s'il y avait bien un petit côté intriguant, je me suis surtout profondément ennuyée ! Bon, je ne suis pas très télé, si ce n'est en bruit de fond, mais pour le coup, je n'ai pas terminé ladite série, et n'ai aucune envie de la poursuivre maintenant que la saison 3 est en train de repasser sur la même chaîne publique française…
- Les policiers et thrillers sont incontestablement mes deux genres de prédilection, sans trop distinguer l'un de l'autre à vrai dire (même si, parfois, la différence saute aux yeux, dans beaucoup d'autres polars on est à la limite de l'un vers l'autre !)… mais j'accuse une assez grande méconnaissance du genre cosy en particulier, même si j'en ai déjà lu quelques-uns d'auteurs divers désormais. Mes héros favoris sont plutôt un commissaire Adamsberg ou un commandant Servaz : on n'est clairement pas dans le même monde qu'Agatha !
- Dans le même ordre d'idées, j'ai lu bien peu de « classiques » ! Ainsi, quand je lis çà et là qu'Agatha Raisin est une version moderne d'une certaine Miss Marple… dont j'ai certes déjà entendu parler, mais dont je n'ai jamais lu aucune aventure ! – pour ma part, je passerai mon tour pour une telle comparaison, que je suis bien incapable de soutenir ou contredire…
- En revanche, il y a quelques semaines seulement, j'ai lu le premier tome d'une autre série de la même autrice, le fameux Hamish Macbeth, et celui-là pourrait sans aucun doute me servir de référence, tant on y retrouve les mêmes ingrédients de base… mais dans des univers suffisamment différents pour ne pas le confondre, ni jamais s'ennuyer !

Bref, j'ai beaucoup aimé suivre les aventures de cette Agatha, « jeune » retraitée volontaire de 53 ans, qui a suivi aveuglément son rêve d'enfant d'acheter un cottage dans un village anglais des Cotswolds, elle profondément citadine et londonienne, et n'ayant jamais « vérifié » d'une quelconque façon si une vie à la campagne pourrait réellement lui convenir. D'emblée ça donne le ton : on rencontre une femme d'âge presque mûr (et pas très éloigné du mien, j'étais trop heureuse de trouver enfin une personnage principale à qui je pouvais m'identifier au moins par l'âge, avec même la petite délectation de penser que je suis un peu plus jeune !), dure en affaires, ne vivant que pour son travail, sans famille ni vrai ami, mais fonceuse et un brin écervelée dans ses choix, et pourtant assumant parfaitement ce caractère de battante à la limite de l'antipathie. On l'a compris : elle est particulièrement typée, presque caricaturale, mais cette analyse sans concession de ses forces et de ses faiblesses, ainsi que de son évolution (particulièrement lente et pourtant peu à peu visible) au fil de l'histoire, la rendent tout à fait crédible malgré ses côtés stéréotypés. C'est même pire : tous les autres personnages qu'elle croise, et qui auront plus ou moins d'importance dans l'histoire, sont abordés d'une même façon très « cliché » et pourtant qui passe, tant c'est humanisé à coups de traits qui font écho à telle ou telle personne que l'on connaît, et dès lors ça devient plus que crédible et en tous points acceptable.

À partir de tels personnages, on est véritablement – comme je l'avais déjà souligné pour le tome 1 de Hamish Macbeth – dans ce qui s'apparente à une étude sociale d'un microcosme particulier, ici un village anglais de cette région typique champêtre du sud-ouest de l'Angleterre, où on reste un nouveau-venu si on n'y est pas né (même après 20 ans d'installation), où l'accueil semble sympathique mais reste superficiel à moins de mettre les bouchées doubles, ce qu'Agatha va s'employer à faire avec de très gros sabots. C'est l'histoire de la vie quotidienne de ce village, ses rituels et fêtes, ainsi que l'intégration lente d'Agatha, assortie d'une découverte touristico-culturelle assez légère mais bien présente des environs – c'est tout cela qui est mis en avant dans ce roman assez court en plus. Et c'est vraiment réjouissant car c'est écrit dans une langue très visuelle, et ça « sonne vrai » : on a vraiment l'impression d'être aux côtés d'Agatha à l'assaut de ce village où elle a décidé de se plaire coûte que coûte, malgré ses déboires et ses doutes. On retrouve cette « ambiance anglaise » d'un petit village que d'autres séries ont montrée d'une façon ou d'une autre ! eh oui : si je n'ai pas accroché à la série télévisée de cette saga, comme dit plus haut, j'ai suivi avec beaucoup d'intérêt, par exemple, les enquêtes d'un Insepcteur Barnaby (Midsomer Murders en vo), dont le « décor » est assez similaire.

À côté de ça, paradoxalement, l'intrigue policière (indispensable, sinon on ne serait pas dans un « mystery », aussi cosy qu'il soit !) paraît presque anecdotique. Elle ne prend guère de place, elle est là comme en arrière-fond, elle paraît presque insignifiante. On comprend vite que c'est une certaine obsession dans l'esprit d'Agatha, mais ça n'empiète pas vraiment dans son quotidien ; il n'y a pas de crescendo, pas de suspense insoutenable, et on est même tenté de croire la police qui a conclu que le meurtre (qui fait l'objet principal de l'enquête) était un accident, et qu'Agatha perd son temps à s'entêter, résultat de son ennui profond alors qu'elle peine à s'intégrer vraiment au village… Et pourtant ! c'est sans doute là qu'est tout l'art de l'autrice, et l'élément majeur « l'air de rien » qui a fit le succès d'une telle série : toute discrète qu'elle soit, l'enquête est bien là, et les pages se tournent toutes seules sans qu'on ait même l'impression d'être dans un [i]page-turner[/i]. Mais voilà : on est devenu un presque-ami d'Agatha, on est véritablement entré dans son cottage, dans sa vie, dans son quotidien, et on a envie de passer du temps avec elle… que ce soit dans son aventure villageoise ou dans son entêtement à résoudre un mystère auquel personne (à part la femme du pasteur, bien sympathique quant à elle, et j'espère qu'elle prendre au moins autant de place dans les prochains tomes !) ne semble croire vraiment.

Bref, c'est une première incursion réjouissante dans un univers très particulier mais tellement crédible tant il est empli d'humanité, malgré ses caractères (volontairement) stéréotypés. Je lirai la suite (bien à l'aise, car on est quand même à plus de 30 tomes, dont une grande partie sont déjà traduits !) avec grand plaisir et intérêt, en espérant que ces aventures à suivre garderont les mêmes ingrédients qui marchent si bien.
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