AccueilMes livresAjouter des livres
Découvrir
LivresAuteursLecteursCritiquesCitationsListesQuizGroupesQuestionsPrix BabelioRencontresLe Carnet
>

Critique de Andromeda06


Si ce livre a attiré mon attention, c'est parce que ma grand-mère aimait beaucoup Danielle Darrieux. Je l'avais donc déjà repéré avant qu'il ne soit proposé lors de la dernière opération Masse critique (Non-fiction de juin 2023). C'est tout naturellement que je l'ai coché, avec quelques autres propositions, sans grand espoir d'être sélectionnée, puisque je faisais déjà partie des gagnants le mois précédent. Ce fut donc deux surprises coup sur coup : je remporte une nouvelle fois un livre et en plus l'un des deux qui me tenaient le plus à coeur.

Jérôme Bimbenet, historien du cinéma et déjà auteur d'un livre sur Leni Riefenstahl (réalisatrice allemande qui a participé à la propagande du Troisième Reich), se consacre ici, par le biais de la biographie de Danielle Darrieux, à l'histoire du cinéma français sous l'Occupation allemande. À n'en pas douter, il connaît son sujet.

Il choisit de démarrer et de terminer son livre en évoquant le « train de la honte », train à destination de Berlin en 1942 dans lequel sont montés quelques vedettes du cinéma français, dont Danielle Darrieux. Officiellement partie pour la promo de l'un de ses films, c'est en fait un accord qu'elle a passé avec la Continental (société de production française financée par l'Allemagne nazie) : officieusement, elle part rejoindre l'homme qu'elle aime et qu'elle épousera plus tard, ce dernier étant retenu prisonnier là-bas pour avoir eu des propos anti-allemands.

Jérôme Bimbenet éclaircit donc cet événement afin de remettre les choses à leur place. Il précise également que Danielle Darrieux n'a jamais voulu lui accorder de son temps et qu'il a donc dû s'appuyer sur d'autres sources pour étayer ses arguments (sources nombreuses listées en fin d'ouvrage).

Mais il n'est pas uniquement question de ce train dans ce livre biographique. Il est d'abord question de cinéma, et plus particulièrement de cinéma français des années 1930 à l'Occupation allemande. L'auteur est précis et passionné par son sujet, ça se ressent et on ne peut le lui reprocher. Il y a tout un étalage de noms d'acteurs et d'actrices, et de titres de films. C'est là que ça a un peu pêché pour moi, puisque je ne connaissais pas la moitié des gens et films mentionnés (pour ma défense, je suis née presque cinquante ans après la fin de la guerre). Ce fut donc quelque peu ardu ou lourd par moments.

Ce n'est que dans la seconde moitié du livre que le ton devient plus personnel, quand Danielle Darrieux et sa carrière sont davantage mises en avant, tout comme sa vie privée d'ailleurs puisqu'elle ne tournera plus de films de 1942 jusqu'à la fin de la guerre. La lecture se veut plus limpide, plus intéressante aussi (en ce qui me concerne en tout cas).

J'ai quand même été mal à l'aise, parfois même outrée, de constater que l'actrice évoluait dans un monde hors réalité. Totalement insouciant et inconscient de la réalité de la guerre, ça fait la fête, ça se paie des voitures de luxe, ça se pavane devant les caméras, ça part au ski, ça mange et boit plus que de raison. le peuple a faim, les Juifs sont exterminés et pendant ce temps-là, on signe des autographes aux Nazis venus réquisitionner deux chambres de votre villa.

« le monde du spectacle va devoir rendre des comptes sur son attitude durant les quatre ans d'occupation. Il est dorénavant livré à lui-même, face à ses accusateurs, face à la société, face aux Français. Ce monde insouciant et privilégié qui, au mieux, a traversé les années sombres avec des ornières, au pire, s'est donné aux Allemands, doit maintenant renaître sur de nouvelles bases. »

On n'ouvre les yeux et on ne regrette qu'à la fin de la guerre, quand on vous demande de rendre des comptes lors des commissions d'épuration. J'ai eu énormément de mal avec cet aspect-là.

Dans l'ensemble, même si je ne me passionne pas plus que ça pour le cinéma, j'ai apprécié ma lecture dans laquelle j'ai beaucoup appris. Malgré les lourdeurs, cela reste bien écrit, sacrément bien documenté également. le contexte historique est bien expliqué, notamment tout ce qui concerne la collaboration artistique franco-allemande. On cerne la personnalité des uns et des autres facilement, qu'on adhère ou pas.

Reçu et lu dans le cadre de la masse critique Non-fiction, je remercie Nicolas de Babelio pour la sélection et les éditions Tallandier pour l'envoi de cet ouvrage abouti et intéressant.
Commenter  J’apprécie          6511



Ont apprécié cette critique (65)voir plus




{* *}