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Critique de nilebeh


Décidément, Olivier Bleys aime nous emmener dans des pays au froid polaire : après la Sibérie de « Concerto pour la main morte », et le village glacé de Mourava, nous voici à plus de 3800 mètres d'altitude, dans les solitudes enneigées de la Cordillère des Andes, là où elle fait office de frontière entre le Chili et l'Argentine. Et nous sommes au refuge Maravilla (consonances similaires, et petit clin d'oeil de l'auteur : maravilla = merveille en espagnol, ce que la suite va - ou non - confirmer...).

Des choses étranges et comme prémonitoires, il y en a un certain nombre dans la vie de Jonas. Sa mère a rencontré son père grâce à un nid de poule jamais réparé dans la chaussée, résultat du gel et de la fonte de la glace. La ville d'Uspallata fleure bon le benzène et l'huile chaude et on y meurt fréquemment de cancer. Pourtant, elle est environnée de hautes montagnes que personne ne regarde plus depuis longtemps, non plus pourvoyeuse d'oxygène, juste obstacles à la circulation.

Quand Jonas est venu au monde, un peu plus tard, une escadrille d'hélicoptères, tels des anges protecteurs, ont survolé sa maison. Devenu adulte, pour faire vivre sa femme Catilina et sa petite fille Rosario, il est devenu pilote d'hélico, livreur de refuges d'altitude et sauveteur de blessés en haute montagne. Il aime « prendre le ciel », comme le marin prend la mer et ce jour-là, il s'envole, confiant, vers un refuge pour livrer le gardien. Un regard rapide vers Rosario, la promesse que papa sera là pour lui faire le bisou du soir et le voilà parti.

Mais rien ne se passe comme prévu. Il trouve sur place un étrange personnage nommé Jésus (en milieu hispanique, ce n'est pas un prénom rare) qu'il nomme « Le Prophète ». Et les faits étranges s'accumulent comme autant d'indices : la tempête se déchaîne alors que rien ne l'annonçait, l'hélico est recouvert de glace, la radio ne fonctionne plus et quelle que soit la fréquence, on entend la même musique de Haydn : « L'Horloge » (on pense au poème de Baudelaire sur l'inéluctable fuite du temps), le gardien s'enivre de multiples verres de piscos, un alcool fort, Jonas découvre d'étranges lampions multicolores dans un meuble : tout dans cette cabane en bois perdue au milieu des neiges, semble lourd de menace...Il est comme pris sous la coupe du gardien et du Prophète, avec le vieux chien Coca, une sorte d'encerclement amical dont il voudrait s'échapper. Il refuse le rond de serviette (ce « collier d'esclavage » que lui offre le gardien. En vain. le piège se referme sur lui.

Et quand enfin, il réussit à faire redécoller son hélico, le roman quitte le monde de l'étrange pour basculer dans un univers onirique, mystique, poétique qui nous tient en haleine. Car que signifie cette étrange mission que le Prophète, présenté comme « vérificateur de frontière », impose à Jonas, tout d'abord rétif, puis soumis, enfin pénétré d'une sorte de grâce toute nouvelle ? La portée du roman nous apparaît progressivement.

Ce livre ne manque pas de charme, tant par son écriture que par les images qu'il propose et la voie qu'il ouvre devant le personnage. Devant le lecteur aussi, peut-être.
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