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Critique de asphodele85


Editions Buchet Chastel, © septembre 2011, 245 pages. Premier livre lu pendant le Read-a-Thon d'octobre dernier, premier choc sur lequel je n'ai pas eu le temps de m'attarder, donc pour faire ce billet, j'y suis revenue, décryptant les post-it jalonnés de ci de là mais surtout pour y retrouver l'intense émotion qui m'avait saisie du début à la fin de cette confession. Comment en effet rester insensible à ce témoignage autobiographique ? Dans un autre cadre de lecture, j'aurais attendu de m'en remettre pour passer à autre chose, donc pour lui, pour restituer au mieux ce livre profond en émotions qui m'ont touchées j'ai laissé décanter, comme un bon vin…

Je comprends que l'auteur ait laissé passer vingt-quatre ans pour pouvoir l'écrire aussi intimement. Car perdre sa mère et son frère à dix-huit ans, puis son père quatre plus tard, et les trois dans un accident de voiture, sans tomber dans la guimauve dégoulinante et larmoyante, ne prête pas à sourire. Pourtant le tour de force de ce roman est là : dans le ton ironique de Jean-Philippe Blondel, mêlé à son incompréhension et à son incrédulité souvent : “J'ai vingt-deux ans et je suis le dépositaire de leurs histoires inachevées. J'ai vingt-deux ans et je suis un reliquat de récits. Une survivance. Un putain de séquoïa.”

Avec l'argent de l'héritage, il se sent ivre de liberté mais empêtré aussi avec elle. Il décide alors de partir à Morro Bay en Californie comme dans la chanson (Rich) de Lloyd Cole, Lloyd Cole étant une histoire à lui seul de ce roman, avec Samuel son meilleur ami et Laure, son ex, qui passe des bras de l'un à ceux de l'autre sans que cela ne remette en question l'amitié du trio !

Commence un étrange voyage à bord d'une Thunderbird où notre héros, invariablement reste couché à l'arrière, retenant sa peur et ses a priori sur ce moyen de transport. Et pour cause…” D'habitude, dans les voitures, je passe mon temps à prier pour que tout se passe bien.” de motel miteux plantés dans le désert californien en franches parties de rigolade avec ses amis, c'est en parallèle une réflexion sur ce qui lui arrive, l'état d'esprit dans lequel il était après le décès de son père, un état d'hébétude où les images lui reviennent en “stroboscope”. Vers la fin , il s'émancipe de ses deux amis, loue enfin une voiture seul et met le cap sur Morro Bay, la quête initiatique et mystique de départ.

Il y a une très belle image dans un motel paumé où il séduit la tenancière, Rose, un peu fanée, un peu pianiste, qui en lui jouant la valse n° 12 de Chopin (dans le désert ça m'a semblé presque irréel !) le projette l'année de ses huit ans : il roule à Solex avec sa mère qui était fanstasque (aux yeux des autres) serré contre elle sur le porte-bagages. Une image forte, en noir et blanc dans laquelle on perçoit la volonté de l'auteur à se raccrocher au peu de souvenirs qui lui restent. Ceux qu'il ne pourra plus se faire. Ceux qu'il ne peut plus développer, les négatifs ont disparu. “Les rues défilaient. Nous n'allions jamais loin. Nous ne partions jamais longtemps. C'était pourtant la plus belle des conquêtes.”

Il retrouvera ses amis et nous dira ce qu'il est devenu. Comment les rencontres faites au cours de ce voyage, le soutien inconditionnel des amis, la musique de Lloyd Cole et surtout d'avoir été à Morro Bay, d'avoir au moins réalisé un rêve ont été déterminants dans sa vie. Et comment et pourquoi il a commencé à écrire des romans, pour ne pas se perdre, pour s'y perdre aussi et prendre la mesure du temps nécessaire qu'il faut pour “rester vivant”.

Une lecture forte, un style imagé et concis avec des phrases courtes, où la frontière entre le rire et les larmes est ténue, mais Jean-Philippe Blondel maîtrise son sujet de main de maître en parvenant à nous faire sourire sans jamais s'apitoyer… J'ai beaucoup aimé. Merci à George qui m'a poussée (pas trop non plus) à l'acheter. Delphine a aimé également, ICI. Mais également, le beau billet de Mind the Gap, aujourd'hui, nous aurions pu faire une LC !
Lien : http://leslecturesdasphodele..
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