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Critique de NMTB


NMTB
20 décembre 2014
Une vingtaine de préfaces, d'introductions, de conférences publiées de 1968 à 1993 sont réunies dans ce livre et ont principalement pour sujet la renaissance et l'art contemporain, mais aussi Mozart, le désert de Retz ou Henri Cartier-Bresson. On peut considérer le Nuage rouge comme la suite de L'improbable. Inutile d'insister sur la langue très maitrisée de Bonnefoy, ni sur son érudition, on apprend énormément. Beaucoup est dit en très peu de mots, ce qui procure à l'ensemble de ces textes une densité qui demande de la patience, même si ce ne sont que de petites études. Par contre, il faut souligner sa volonté d'aller vers l'autre, l'artiste, de le comprendre dans son ensemble et de l'accepter même dans les aspects qui lui déplaisent. Il a - pourquoi ne pas employer ce mot puisque lui le fait volontiers - une vraie compassion, c'est-à-dire, comme il le signale à propos de Cartier-Bresson, « cet élan de tout l'être vers ce qui lui vient du dehors de soi ». Ceci est trop rare pour ne pas le saluer. Et donc, si d'autres grands exégètes préfèrent s'en tenir aux faits ou s'éloigner le moins possible d'une certaine objectivité, ce n'est pas le cas de Bonnefoy qui n'hésite pas à mêler sa sensibilité à des connaissances très pointues. Il n'y a absolument rien à redire sur sa vision des artistes, leurs vies et leurs oeuvres. Sa brève histoire du portrait de l'antiquité à nos jours, par exemple, avec cette révolution que fut l'autoportrait, « mettant à découvert la dimension où le sujet parlant et son idée de soi se combattent », c'est-à-dire cette séparation entre le Je et le Moi, est tout à fait éclairante et intéressante. Ses avis sur Poussin, Giacometti et tous les autres artistes sont très profonds, mais sont aussi très personnels, mettant à jour ses propres préoccupations. Préoccupations liées à une signification du réel le plus simple. Ce qui amène Bonnefoy à creuser des tranchées parfois surprenantes, à s'intéresser particulièrement à des périodes que l'histoire de l'art officiel peut parfois négliger ou considérer comme moins importantes. Et même, j'oserais dire que Bonnefoy à tendance à faire des généralisations un peu trop abruptes sur des mouvements qu'il considère comme utopistes ou idéalistes. Mais, comme il le dit à propos d'un autre critique d'art : « Ses beaux refus, étendus à tant d'oeuvres de l'Occident, montraient d'abord qu'il savait juger par soi-même, et avec tous le sens du concret de la véritable expérience ; et ses exigences, si impraticables fussent-elles, parlaient au nom d'une ardeur qui est un des lieux de la poésie. » Et puis, « Entre les subjectivismes vite médiocres du symbolisme – ce maniérisme, en somme, sans les sursauts d'une foi – et l'intuition de « vraie vie » dite par Rimbaud, qui veut agir, qui sait le prix de la finitude, il peut y avoir la querelle, l'incompréhension, l'impatience, mais ces deux façons d'être ne font qu'un même pays, menacé aux mêmes frontières, et pourraient constituer toutes deux un jour, enrichies l'une de l'autre, la seule vraie civilisation. »
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