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Critique de Cassiopee42


Une vingtaine de pages avec des photographies en noir et blanc, des documents en annexe et un livre témoignage bouleversant.
Elena Bonner et son époux, Andrëi Sakharov, sont en exil à Gorki, surveillés, pistés, prisonniers, dans un simulacre de vie libre lorsqu'elle obtient de se faire opérer du coeur à l'étranger. Elle y reste six mois et met cette période à profit pour écrire « Un exil partagé ».
Elle a rencontré Andrëi dans le comité pour la défense des droits de l'Homme et la défense des victimes politiques qu'il a créé et où il militait. Ils sont restés mariés vingt ans (il est décédé en 1989 et elle en 2011). Il est connu comme le père de la bombe H et surtout pour sa prise de conscience humaniste lorsqu'il a compris les dangers de cette « conquête » de pouvoir par son pays. Il a eu le prix Nobel de la paix en 1975 (mais le gouvernement russe lui avait interdit de sortir du pays pour aller le chercher).
Ce livre est le récit de leur quotidien pendant leurs années d'exil « interne » à Gorki de 1980 à 1986. Ils étaient isolés pour n'avoir aucun contact avec l'étranger et seulement ceux voulus par les gouvernants dans leur pays. Autrement dit, aucune liberté, aucun choix….
Filmés sans arrêt, n'ayant pas le droit d'envoyer du courrier, de téléphoner, de recevoir de la visite, seule Elena peut « bouger » un peu mais sous surveillance. Elle arrive à tricher, à poster quelques télégrammes… Elle a deux alertes cardiaques sérieuses et doit rester au domicile. C'est là que son mari, malgré sa santé faible, décide de faire une grève de la faim pour qu'elle puisse se faire soigner à l'étranger. Il obtiendra gain de cause, elle pourra partir et ce recueil verra le jour.
Ils subiront tout. Des informations mensongères sur eux seront relayées par des « officiels » (infirmières, médecins disant que tout va bien), mal soignés volontairement, tout est mis en place pour les détruire (et c'est vraiment ce mot qu'il faut employer) physiquement et moralement. Tout est truqué : les procès, les dialogues, les échanges. On les vole, on fouille chez eux, on les nourrit mal, on les insulte, on les traite avec mépris.
Beaucoup se seraient effondrés, laissés aller devant tant d'horreurs mais ils ont tenu encore et encore, repoussant leurs limites, ne lâchant rien, tenant tête. Lui re écrivant ses « Mémoires » chaque fois que le manuscrit en cours disparaît. Elle, restant près de lui, prodiguant des soins, de l'amour, faisant tout pour offrir un peu de sérénité.
Je pense que si ces deux-là n'avaient pas eu l'un pour l'autre un amour immense et une volonté hors normes, ils n'auraient pas tenu. Mais, un jour après l'autre, ils ont avancé ….
« Je ressentais alors une telle fatigue que j'avais l'impression que je ne pourrais plus tenir. Mais tous les jours, je me répétais : « Allez, encore un jour ou deux, et tout sera réglé. » C'est ce qui me faisait vivre.
Cet exil me semble encore plus pervers que la prison ou le camp, car c'est plus manipulateur pour l'opinion publique et pour le couple. Fausses promesses, fausses informations ….rien ne leur sera épargné.
Cette lecture n'est pas gaie, elle montre la cruauté des hommes mais elle nous éclaire sur le destin de ce couple. L'écriture (la traduction est de qualité car je n'ai pas ressenti de lourdeurs ou de déséquilibre) nous procure diverses émotions : empathie, colère, respect, admiration …
Un coup de coeur !

Lien : https://wcassiopee.blogspot...
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