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Critique de Pecosa


"Toutes les familles possèdent, dit-on, d'épaisses strates de silence tendu, des souffrances engluées dans des secrets cachés bien au fond de belles armoires à linge. » (Philippe Claudel)
Ce n'est pas dans une armoire mais dans une boîte à cigares que le médecin allemand Robert Lubisch découvre à la mort de son père, l'homme d'affaires Friedhelm Lubisch, une carte d'immatriculation SS au nom d'un inconnu, Wilhem Peters, un laissez-passer, un certificat de libération d'un camp de prisonniers de guerre ainsi que la photo d'une belle inconnue. Pendant quelques mois Robert laisse sa découverte de côté mais ce petit grain de sable a priori insignifiant dans son existence bien réglée ne tarde pas à faire son effet. « L'idée que ce père si droit, si irréprochable, ait pu cacher un secret ne déplaisait pas à Robert. Peut-être allait-il enfin découvrir une faiblesse, une faille à ce modèle si parfait auquel il avait été confronté pendant tant d'années. Robert sourit. Quelle libération ce serait pour lui de pouvoir donner à ce père tout puissant une dimension plus humaine! Il avait envie de savoir. Rien que pour lui-même ».
Trois mois plus tard, Robert décide de se rendre dans la petite ville de Kranenburg où le portrait de l'inconnue a été réalisé, retrouve le nom de la femme et la maison où elle résidait pendant la guerre. En confiant la nature de sa quête à la nouvelle locataire du lieu, une journaliste tenace du nom de Rita Albers, Lubisch ne se doute pas qu'il a ouvert la boite de Pandore et que son secret ne lui appartient plus. La journaliste cherche, interroge et le drame arrive."Secret de deux, secret de Dieu . Secret de trois, secret de tous. » En voulant tuer le Père, c'est tout un village qu'il a réveillé.
Les secrets de famille en temps de guerre sont pain bénit pour les romanciers, et on les adore dans Purge de Sofi Oksanen ou Flétrissure de Nele Neuhaus. Rompre le silence commence d'une manière relativement abrupte et quelque peu déconcertante, mais trouve rapidement son rythme de croisière, de l'enquête journalistique et policière aux incursions dans les années 30 et 40. Mechtild Borrmann dresse le portrait saisissant d'une petite ville allemande où la montée du nazisme puis la guerre exacerbent les sentiments et les passions. Avec elle, point de révélations tonitruantes, de manichéisme facile et de suspens haletant. L'intrigue chemine lentement mais sûrement à l'image de ses protagonistes qui tâtonnent et s'obstinent. Le vrai héros de Rompre le silence est finalement le secret qui comme un virus, passe de métabolisme en métabolisme, grandit, et devient incontrôlable. On le pressent dès le début du roman, Robert Lubisch ne peut faire marche arrière quand le doute est semé. On aurait bien envie de lui dire pour le réconforter cette phrase tirée des Pensées de Blaise Pascal "Console toi. Tu ne me chercherais pas si tu ne m'avais trouvé. »
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