AccueilMes livresAjouter des livres
Découvrir
LivresAuteursLecteursCritiquesCitationsListesQuizGroupesQuestionsPrix BabelioRencontresLe Carnet
>

Critique de Choupaille


Ce livre, c'est une bombe ... un peu du genre de celles que des incendiaires balancent justement aux quatre coins du royaume pour ouvrir le roman.

Cinq années après son élection, le Chancelier Ransard d'Alverny a multiplié les plans destinés à relancer l'économie du royaume. Des zones économiques franches et des grands projets publics fleurissent de-ci de-là mais pourtant rien n'y fait : la relance tant espérée tarde à venir. Alors quand un groupuscule d'incendiaires aux revendications floues se met à semer la terreur parmi la foule et les honnêtes travailleurs, la tension monte et la grogne populaire avec. La Confrérie naine oeuvre avec les puissants d'Olangar pour tenter de démêler la situation ... et enquête au passage sur une affaire que le gouvernement d'Alverny souhaite taire à tout prix : celle d'une guerre imminente avec les elfes du Pradennad, furieux de voir leur fleuve pollué par les industries du fer en amont. Les deux camps sont à couteaux tirés et c'est aux nains Kalin et Nockis qu'il advient de mettre en lumière le dramatique complot visant à monter les uns contre les autres, avec l'appui inattendu de la milice citadine, d'une certaine Evyna d'Enguerrand des provinces du sud et d'un elfe renégat de retour sur le continent. Une vraie poudrière prête à vous exploser à la tronche !

Vous l'aurez compris, il s'en passe des choses, il s'en passe beaucoup, et ça sent encore une fois le roussi pour Olangar. A cinq années des évènements De Bans et Barricades qui avaient vu la Confrérie naine obtenir gain de cause et les géants de la pègre se faire botter le cul, le royaume galère toujours. Les points qui posent problème au Chancelier d'Alverny et autres grands pontes du Parlement rappellent les gros titres habituels qu'on lit dans la presse : il y a la question environnementale, celle de la pénurie d'emplois et des inégalités sociales, la lutte sans merci que se livrent les partis régionalistes, unionistes et autonomistes, les différents diplomatiques, la crise économique et enfin la course au profit quel qu'en soit le prix - pour autant que ce prix, bah ce soient les autres qui le paient, naturellement. Je ré-insiste là dessus parce que ça m'avait déjà fait grande impression la première fois avec Bans et barricades, mais rencontrer tous ça dans un roman de Fantasy où se mêlent hommes, elfes, nains et orcs, c'est franchement super fort et c'est d'ailleurs pour cette raison que cette saga restera l'une de mes meilleures découvertes francophones. J'avais parlé de social-fantasy quand j'avais chroniqué l'opus précédent et j'ai bien envie de recycler mes propos pour Une cité en flammes (à une nuance près puisque ici on joue dans la cour des grands et pas des petits salariés) : la social politique-fantasy francophone est de retour !

L'ami d'Alverny pensait pas à mal quand il a eu cette grande idée supposée relancer l'économie, mais en autorisant l'implantation de zones économiques franches (comprenez par là des zones de non-droit échappant à toute autorité, oui oui), il a donné l'opportunité aux plus grands magouilleurs du royaume de bidouiller en toute impunité, avec pour conséquences un bordel sans nom du côté des elfes. Heureusement les nains de la Confrérie, pour la plupart toujours galvanisés par leur victoire il y a cinq ans, sont prêts fureter et à mettre la main à la pâte (faut dire que la guerre, ça arrange jamais personne). En les suivant dans leur enquête incognito, on se rend compte que la Confrérie naine autrefois unie est très largement divisée. Une cité en flammes permet de faire le point sur les acquis sociaux De Bans et barricades avec le recul de cinq années d'une politique nouvelle pas au goût de tous, et de deux nains aux opinions divergentes pour se donner la réplique. Ça s'invective, ça se fait des reproches et surtout ça montre bien que Bans et barricades était déjà vachement abouti : les romans où tout est bien qui finit bien, ça n'existe pas - et Une cité en flammes poursuit dans cette lignée-là. Un très, très bon point.

De la plus suspecte des zones économiques franches aux arènes de combats clandestins d'Olangar, c'est la course aux réponses pour Evyna, Kalin, Nockis et Torgend !

Mais outre les enjeux sociétaux, ce roman c'est aussi une histoire de camaraderie perdue et de persos qui en ont gros sur la patate. Un peu comme le duo de nains Kalin-Nockis, tous les protagonistes qu'on connaissait déjà ont fait du chemin... et pas forcément pour le meilleur, ce qui me plaît vachement. Je ne vous cache pas que ce sont les deux nabots qui m'ont le plus tapé dans l'oeil, mais le récit fait aussi la part belle à Evyna. En début de roman l'héritière de la province d'Enguerrand doit quotidiennement composer avec des nobles mécontents de voir une jeune femme tirer les rennes. Et comme elle sait qu'on n'est jamais mieux servi que par soi-même, c'est elle-même qui part enquêter à la capitale sur le groupuscule incendiaire qui vient de semer la mort sur ses terres - un personnage téméraire comme je les aime ! Torgend en a lui après des orcs fraîchement débarqués de leurs lointaines terres et se fait très discret tout du long... mais qu'à cela ne tienne, son heure il l'a déjà eue dans Bans et barricades alors moi ça m'a convenu. Toujours est-il que chacun finit par apporter sa pièce au grand puzzle d'ensemble et ça a de la gueule - on ne voit rien venir et ça tient sans longueurs les six-cents-septante pages du roman ! Bref c'est franchement bien amené et j'ai apprécié que l'auteur nous ramène quelques personnages qui nous étaient un peu passés par dessus la jambe précédemment ; c'est cool et ça laisse espérer que la suite nous ramènera quelques abonnés absents que j'ai super hâte de revoir.

La suite, oui, parce qu'il y en aura manifestement une - et là j'attaque avec quelques bémols purement éditoriaux (aïe aïe). Je suis pas une lectrice super organisée, j'avoue, mais j'aime bien savoir un minimum dans quoi je me lance quand j'attaque un bouquin. Ce qui me désole un poil ici, c'est que clairement on est sur un diptyque (voire une trilogie, ce sera selon les plans de Clément Bouhélier), et que rien en couverture ne l'indique. Moi ça m'aurait plu de le savoir parce que si ç'avait été le cas, j'aurais certainement différé ma lecture de quelques mois histoire de pas avoir à poireauter trop longtemps d'ici à ce que sorte la suite - et puis bon, juste pour le principe ça m'agace. Sachez donc qu'on est sur la même mouture que Bans et Barricades : deux tomes minimum. Ensuite, il y la carte qui sert à rien. Dans Une cité en flammes l'intrigue est décentralisée : on cause de terres orcs outre-mer et d'îles lointaines à coloniser, on fait entrer les dûchés voisins dans l'équation complexe de la politique olangardaise ... et tout ce beau monde, on a un mal fou à le situer. D'un parce que ça apparaît nulle part sur la carte ; et de deux parce que les indications textuelles sont hyper confuses - surtout au début du roman quand t'essaies déjà de te dépatouiller pour dresser un tableau mental de la situation politique du royaume. En bref, ça m'a agacée. C'est qu'avec un roman aussi bon on s'attend forcément à ce que les à-côtés le soient aussi ... avec chez moi une tendance à tacler d'autant plus fort que le roman me plaît. Soyons donc positif : si tout le reste n'avait pas été aussi réussi, je râlerais pas autant (ceci est donc un compliment ~ vous avez vu comme je me rattrape bien ?).

Vous qui n'avez pas lu Bans et barricades et à qui cette chronique met l'eau à le bouche (j'aime me jeter des fleurs et croire que je vous influence, laissez-moi rêver !), ne paniquez pas : on peut s'enfiler Une cité en flammes indépendamment du reste - parole ! Faudra juste accepter quelques petits raccourcis et faire l'impasse sur deux-trois moments émotion, mais c'est très largement faisable si tel est votre souhait. Toutefois l'opus précédent est tellement bon que je vous recommande de commencer par le commencement : cet auteur est une vraie mine d'or, alors ne vous privez surtout pas d'aller y piocher un coup !
Lien : https://la-choupaille-lit.bl..
Commenter  J’apprécie          20



Ont apprécié cette critique (1)voir plus




{* *}