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Critique de 5Arabella


Boulgakov a commencé ce roman en 1928 et seule la mort survenue en 1940 a mis fin aux travaux de correction et de révisions qu'il faisait encore sur ce livre. Roman long, dans lequel plusieurs récits se trouvent enchevêtrés, même s'ils se rejoignent tous à un moment où un autre.

Dans la première scène du récit, Ivan Biezdomny, un jeune, mauvais et officiel poète se fait faire la leçon par le président de l'association des écrivains: Micha Berlioz. Notre jeune homme devait fabriquer un grand poème antireligieux, mais Berlioz n'était pas content du résultat et explique à Ivan ce qu'il aurait dû écrire, lorsqu'un inconnue s'est mêlé à leur conversation.

Ce homme mystérieux, qui s'avère par la suite n'être personne d'autre que le diable, s'est mis à raconter à nos deux littérateurs ce qui s'est vraiment passé entre Ponce Pilate et un certain Yeshoua. Et avec l'apparition du démon et de ses acolytes dont Béhémoth, un chat noir parlant et marchant sur ses pattes de derrière, un vent de folie souffle sur Moscou. de respectables matrones se retrouvent à moitié nues dans les rues. Des comptables se transforment en vampires. Des présentateurs de spectacles perdent leurs têtes au sens propre du terme. Des directeurs de théâtre se trouvent transportés en un clin d'oeil à l'autre bout du pays. En bref, la ville prend feu et la milice est complèment dépassée, d'autant plus que les mystérieux visiteurs ne craignent pas les balles.

L'hôpital psychiatrique du docteur Stravinski n'arrête pas d'admettre de nouveaux malades, dont notre malheureux Ivan, qui rencontre là le Maître, un écrivain qui lui aussi a composé un roman sur Yeshoua, et qui s'est trouvé interné et séparé de Marguerite, son très grand amour. Mais Marguerite n'a pu renoncer à lui, et pour pouvoir le récupérer, se livre au diable, se transforme en sorcière, chevauche nue sur un balai au dessus de Moscou et assiste au bal du diable...

J'avais lu ce roman lorsque j'étais au lycée et j'en avais gardé un souvenir émerveillé, je me souvenais de la très belle histoire d'amour et surtout d'un récit d'une drôlerie irrésistible. J'ai retrouvé ces deux composantes. L'arrivée des démons à Moscou où il est interdit de croire à leur existence est hilarante, surtout que nos diables sont taquins voire méchants et qu'il se livrent sur les moscovites à des expériences plutôt cruelles. Mais comme les dits moscovites ne sont pas des anges, mais qu'ils trafiquent, dénoncent leurs voisins et ne cherchent qu'à tromper leurs légitimes épouses, finalement ils n'ont que ce qu'ils méritent. Boulgakov se moque des petites et très grandes misères de la vie des soviétiques de l'époque, mais aussi tout simplement des petits défauts des humains de tout temps et de toutes époques.

Et puis il y a dans tout ce récit une magie, une poésie, tout est possible et l'esprit est plus fort que la réalité, et un écrivain, un artiste sont des enchanteurs, des démiurges et rien ne leur est impossible.

Evidemment que Boulgakov est un homme d'une culture incroyable et qu'il est par ailleurs possible d'écrire une thèse sur un seul chapitre de son livre, je me suis d'ailleurs rendue compte à quel point plein de choses m'avaient échappé à la première lecture. Bien sûr Woland (le diable) ressemble terriblement au Méphisto de Gounod que l'auteur adorait. de même Béhémoth fait penser au chat Murr de Hoffman, et l'on pourrait rajouter Berlioz, qui en plus d'être un personnage du roman est aussi un compositeur qui a composé une Damnation de Faust...

Mais on a pas besoin de saisir toutes les allusions de Boulgakov pour apprécier ce livre, il faut se laisser emporter par ce récit si drôle et si merveilleux, par ses personnages enchanteurs et comiques. Je trouve infiniment touchant que le vieil Boulgakov, au soir de sa vie si amère, où il s'est vu petit à petit interdire toute possibilité de publier, ait pu écrire un livre si jubilatoire, tellement jouissif et plein d'amour, et finalement d'optimisme dans l'homme.
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