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Critique de Jolap


« Ils voulaient une vie insolite. La vie les a rattrapés au-delà de ce qu'ils espéraient. »

C'est l'enfant qui parle. L'enfant qui prend appui sur les carnets intimes de son père, Georges et sur sa propre mémoire, pour nous raconter son histoire faite d'amour et de désespoir.

Georges voue un amour fou à Louise, sa femme, qui change de prénom au fil des événements et qui a décidé une fois pour toutes « de botter le cul à la raison ». Ils dansent leur vie sur une chanson Nina Simone dont la mélodie masque le bruit que pourraient faire les à-coups d'un quotidien trop pesant. La routine n'a pas sa place dans cette famille pas plus que les factures contraignantes et superflues qui s'empilent dans un coin. Mademoiselle Superfétatoire, une grue exotique, tient une place de choix auprès de ce trio extravagant.

L'enfant lui s'adapte à ce manque de repères. Il suit d'un pas décidé la danse de ses parents. L'emploi du temps d'un enfant classique : l'école, le goûter, les punitions, les copains, tout cela est jeté aux orties. Il danse comme ses parents, et comme ses parents il n'a que la fantaisie et l'inversion des codes à se mettre sous la dent. Il se demande d'ailleurs comment les autres enfants peuvent vivre sans ses parents. Il est heureux. « Les gens excentriques vivent ce dont nous n'osons rêver de la provocation comme un des beaux art » Cette constatation de Florence Müller aurait pu s'appuyer sur ces vies, autant qu'Erasme qui constate que « la folie est la source des exploits de tous les héros » ou encore que « la folie est une ivresse sans fin où la joie, les délices, les enchantements se renouvellent sans cesse ».

Mais voilà, dans toutes les histoires figurent des chapitres. Dans tous les romans il y a un début et une fin. La danse devient peu à peu nettement moins harmonieuse, la voix de Nina Simone s'étouffe, devient inaudible et les pas de danse ralentissent au point de devenir incohérents. L'amour reste. L'amour quoi qu'il arrive. Aveugle de ce qui pourrait l'entamer. Sourd à ce qui pourrait le ternir. L'amour reste…

J'ai aimé ce livre parce qu'il m'a mise à l'endroit, à l'envers, parce que je suis entrée dans la danse et parce que j'ai conclu qu'après tout oui : il faut sans cesse inventer sa vie pour qu'elle ait plus de goût et faire de sa vie un paradis tout simplement parce qu'on l'a décidé. le mensonge est fait aussi pour ça. Il est dans ce cas digne et nécessaire.

J'ai aimé ce livre qui m'a permis de m'évader loin, très loin de la réalité. J'ai aimé cette musique « pour les sentiments », ce livre tourbillon, extravagant, fantasque à souhait, pétillant comme du champagne où les soucis meurent étouffés par les bulles.

« La déprime, la peur peuvent être contournées, piétinées » nous dit Béatrix Beck. Il vaut mieux la croire. le papier cadeau est à ma portée ! le temps des tourments a fait vibrer mes cordes sensibles, mais comme elles étaient protégées d'un film étanche la fantaisie a irradié les mauvais moments, les a protégés.
J'ai entendu ici ou là que cet ouvrage avait quelque chose de l'Ecume des jours de Boris Vian.
La musique oui. le jazz pour Boris Vian . Nina Simone pour Olivier Bourdeaux. L'extravagance je veux bien en partie. L'amour, aucun doute. Mais je préfère m'arrêter là.
Boris Vian a fait un travail de haute couture. du sur mesure pour le pays d'Absurdie. Olivier Bourdeaux a raconté une histoire toute empreinte de fraîcheur, de légèreté, d'émotion. Un excellent moment d'évasion. Mais, sauf à peiner l'auteur, ce livre ne deviendra jamais un classique. (à mon humble avis)
Boris Vian pour moi, c'est tout autre chose. Entre les lignes figurent en bonne place la société, le travail, l'argent, l'amour. Tout cela traduit dans une langue très adaptée, travaillée à l'extrême. Chaque mot est inventé pour coller au plus juste à la situation. C'est tout autre chose ! C'est une oeuvre qui fait référence.

Mais je suis là pour parler de « En attendant Bojangles » et ne pas déborder. Déroutant, saugrenu mais terriblement attachant…….Je terminerai par une phrase de Pierre Jules Stahl qui me semble bien résumer la situation : « On s'explique que la raison soit le pis aller des femmes quand on voit combien la folie réussit à la plupart ».
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