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Critique de Patoux16


Franck Bouysse
Sa marque de fabrique : un univers glauque, noir et pourtant illuminé d'une poésie charnelle, humaine !
J'aime son style, la force de son écriture qui traite de l'essentiel. le témoignage de ce monde qui disparaît.
Il creuse les sillons de l'âme humaine :
"Il creuse l'obscurité pour donner du travail à la lumière"
Il creuse toujours au même endroit mais de plus en plus profond.
Grossir le ciel
L'auteur nous conte merveilleusement la rugosité des paysages Cévenols, le monde paysan traditionnel qui se meurt lentement, silencieusement.
Il fait entendre la voix de gens qui n'ont jamais la parole.
De ces hommes rustres qui foulent, travaillent cette terre austère depuis la naissance.
Dans cet univers : "la vie ne fait pas de cadeau"
Un hameau perdu, les Doges : deux fermes éloignées de quelques centaines de mètres, de grands espaces, des montagnes, des forêts ...
Gus, figure centrale de ce roman, son regard, vit ici depuis plus de cinquante hivers, pas malheureux, pas vraiment heureux non plus.
Le récit commence avec la mort de l'abbé Pierre :
La tristesse l'envahit, sans prévenir ! Il est impressionné par la vie de cet homme.
Et puis il y a Mars, son chien, son meilleur compagnon
Il n'a que lui à qui parler !
Mais Gus aussi taiseux soit-il, a de l'humour, de la répartie quand il rencontre "des grands airs", des banquiers, des institutions ...
Un moment savoureux entre Gus et "le pingouin" du crédit des agriculteurs :
" - Une banque comme la nôtre, c'est bien plus qu'un endroit où on dépose son argent, surtout pour les agriculteurs.
- ça tombe plutôt mal, parce que moi, je suis paysan...

Abel, plus âgé, rugueux et mystérieux vit dans l'autre ferme.
Aucun des deux hommes n'est causant,
Il s'entraident :
Des coups de main et des coups de rouge !
Gus et Abel, deux ours mélangeant leurs solitudes en buvant un coup, chez l'un ou chez l'autre.
Ce moment de fraternité, ils le vivent à trois, le troisième, leur fidèle ami : le rouge ! alcoolisé et sans modération !
Car ces instants sont propices aux mots, phrases, conversations ... Mais avec modération !
"Buvons puisqu'il est l'heure
Buvons rien que pour boire
Je serai bien dans une heure
Je serai sans espoir
Ami, remplis mon verre
Encore un et je vas
Encore un et je vais"
Ces êtres au passé lourd, cabossés par la vie, par leurs souvenirs crasses sont peu enclin à exprimer leurs souffrances et leurs émotions.
Les face à face entre Gus et Abel, faits de silences et de soupçons insidieux, sont superbement orchestrés.
Car ce roman est puissant, chaque mot est à sa place dans une proximité de ces deux solitudes qui s'affrontent, celle des hommes et leurs orages intérieurs !
L'écriture est impressionnante de maîtrise, sobre, juste
magnifique !
A consommer Nature Brut ! D'une traite !



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