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Critique de Toocha


Passée la scène initiale du prologue, glaçante au milieu du désert algérien, la bombe d'Alger commence doucement, presque pédagogiquement, et prend le temps de mettre à niveau les non-lecteurs de Djihad à Paris (dont je fais partie) en leur présentant Aymar de Milandre. Mais le roman connaît une brusque accélération avec un enlèvement qui prend par surprise les protagonistes et le lecteur, et des scènes de torture assez saisissantes. La dernière partie enchevêtre, démêle et ré-entortille les ramifications de l'enquête ; ce n'est pas le moment de se laisser distraire, car ça géopolitise, espionne, stratégise et monte des opérations spéciales à loisir.
Plusieurs intrigues sont en effet entrecroisées dans ce roman d'espionnage (la course au nucléaire, la lutte anti-terroriste, la disparition d'un savant français fortement soupçonné de collusion avec l'ennemi, et l'affaire personnelle que fait Aymar de Milandre de l'arrestation du terroriste Enoch avec lequel il a été aux prises dans le précédent opus), qui se conclue efficacement à leur intersection. L'intérêt de l'enquête ne réside pas dans son suspense, mais plutôt dans le traitement et l'imbrication maîtrisés qui sont faits d'enjeux politiques et diplomatiques complexes.
La force de ce roman tient à son réalisme : du fonctionnement de la DGSE au montage d'une exfiltration en passant par les petits jeux de pouvoirs entre services et autres conflits de hiérarchie, tout paraît terriblement crédible et "ne s'invente pas". L'écriture, brève, prosaïque, efficace, parsemée de quelques pointes d'ironie et d'humour sec bienvenues, concourt également à cet effet de réalisme (même si, parfois, c'est aussi une limite, le style étant par moment un peu sec).
Les personnages d'Aymar et de Botini, son supérieur, sont intéressants, complexes, et bien traités. Malheureusement, à part Meslet (le chef fin stratège de Botini, qui se la joue perso), ce n'est pas le cas des autres personnages qui gravitent autour d'eux, qui sont au mieux des figurants. J'ai été déçue par Enoch, le terroriste dont on adopte parfois le point de vue, dont les motivations me sont restées obscures et la consumation par la vengeance m'a parue trop monolithique (je mesure toutefois mon jugement au fait que je n'ai pas lu le précédent opus, ce qui pourrait changer mon appréciation). Surtout, j'ai eu beaucoup de mal avec les personnages féminins, plutôt fades et superficielles. Julie, l'ambitieuse compagne d'Aymar au début de l'histoire, passe hors-champ et disparaît de la circulation sans qu'Aymar ne s'en rende même compte. Marion, censément agent de terrain ultra-entraînée, est finalement dépeinte comme une gourde (qui en oublie de retirer la sécurité de son arme en situation de crise, on repassera pour la rentabilité de ses heures d'entraînement) ; ses préoccupations sentimentales d'adolescente (elle ne sait plus trop qui lui plaît d'Aymar et de son ex, en gros) tombent comme un cheveu sur la soupe au milieu du récit.
En résumé, j'ai apprécié l'intrigue d'espionnage, servie par son réalisme criant de vérité et sa précision. On n'atteint pas le coup de coeur, les personnages manquant trop de consistance en dehors d'Aymar et de Botini, mais la lecture est agréable.

Et je remercie Babelio et les éditions Pierre de Taillac de m'avoir permis de découvrir ce récit et cet auteur dans le cadre de masse critique !
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