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Critique de Christophe_bj


Je vous présente la famille Cleverley : le père, George, présentateur vedette de la BBC depuis des décennies, a interviewé toutes les célébrités de ce monde dans tous les domaines, mais, quoique de gauche (caviar) a une grande carence en wokisme, ce qui va l'entraîner dans une épouvantable tourmente. La mère, Beverley, romancière célèbre, fait depuis longtemps écrire ses livres par des « écrivains-fantômes » qu'elle tyrannise (« Il faut que je vous dise. Je suis une personne incroyablement créative. Je l'ai toujours été. L'inspiration me coule dans les veines. Et j'adore totalement la littérature. Je lis six ou sept livres par an, incroyable, non, ce qui est probablement la raison pour laquelle je suis l'une des autrices les plus populaires du pays. Mais voyez-vous, avec mes responsabilités familiales et mes obligations caritatives, je n'ai simplement pas le temps d'écrire mes livres moi-même »). La fille aînée, Elizabeth, 22 ans, experte en wokisme, est accro à Twitter où elle détient deux comptes, ce qui lui permet parfois de dialoguer avec elle-même. Nelson, 21 ans, enseignant, adore porter des uniformes et ne sait pas trop où il en est dans sa sexualité. Achille, 17 ans, profite de son extraordinaire beauté pour soutirer de l'argent à des hommes plus âgés sans même coucher avec eux. ● Oui, c'est bien le roman d'une famille dysfonctionnelle, encore un, mais, comme d'habitude avec John Boyne, il est particulièrement réussi et vraiment, vraiment très amusant. ● Les délires du wokisme sont battus en brèche en même temps que la folie des réseaux sociaux. A cet égard, le titre original, The Echo Chamber (La Chambre d'écho) me paraît meilleur que le titre français. D'autre part, les problèmes de Nelson ne viennent pas des réseaux sociaux, et ceux de Beverley pas vraiment non plus, ce qui nuit quelque peu à la cohérence du roman, qu'on sent pourtant voulue par l'auteur, notamment à la fin. ● Comme dans les autres romans de cet auteur, les pages se tournent toutes seules et on a toujours envie de savoir comment les Cleverley vont pouvoir s'enfoncer encore un peu plus dans les ennuis. ● Bien sûr, c'est une satire sociale et parfois les ficelles sont un peu grosses, les personnages assez caricaturaux, mais comme cette fable est rafraîchissante et agréable à lire ! Comme les outrances de notre temps sont bien observées et bien racontées ! Par exemple :
« — Vous lisez beaucoup de romans, alors ?
— Pas vraiment. Je dis toujours, si un livre est bon, ils en feront forcément un film. » ● On pourrait rapprocher ce roman du Voyant d'Etampes d'Abel Quentin (2021), on a dans les deux cas un homme blanc vieillissant, historiquement de gauche, qui se laisse complètement dépasser par les nouvelles normes totalitaires du wokisme, relayées par les réseaux sociaux, et se retrouve dans une « tempête de merde ». Voici l'échange de George avec son agente :
« — Reconnaissez simplement que vous vous êtes mal comporté, c'est bien plus facile ainsi. Les gens l'accepteront et passeront à autre chose [dit l'agente].
— Mais je ne me suis pas mal comporté, protesta-t-il. Ça ne compte pour rien ?
— Non, pratiquement rien. »
● Ou encore cette réflexion : « Avec la droite, tu sais où tu te situes. Mais avec les gens de gauche… Mon Dieu, si tu es en désaccord avec eux, même un court instant, si tu oses poser une question ou dévier de la ligne officielle, ils se jettent sur toi comme des mouches sur une bouse de vache. Ils ne supportent pas un iota de désaccord, implorant la bienveillance tout en masquant leur propre intolérance avec leur pharisaïsme. C'est du maccarthysme caché sous le parapluie du mouvement woke. »
● Et sur les réseaux sociaux : « J'en veux à Steve Jobs. Et à ce Zuckerberg. Tous ces petits psychopathes hyper-intelligents qui n'arrivaient pas à baiser au lycée mais qui compensent leur inadaptation sexuelle en inventant une technologie qui détruit l'humanité. Ce sont les Oppenheimer du XXIe siècle. »
● Bien sûr, le roman de John Boyne est moins subtil que celui d'Abel Quentin, il est aussi moins abouti littérairement, c'est certain, mais pour ma part je m'en suis délecté et le conseille vivement.
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