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Critique de frconstant


Sandrine Gatti”, premier roman, autopublié par Vincent Brems, mérite le label de “pirouette belge”. Histoire tragique faisant la part belle à un humour décalé, le récit n'en traduit pas moins les humeurs déjantées qui transforment toute vie en catastrophe, tout rêve en cauchemar, toute espérance de libération en emprisonnement et tout essai de s'en sortir en enfoncement plus radical encore.
Autour de Sandrine Gatti, anti-héroïne, à la fois fille, femme, mère, chacune plus amère l'une que l'autre, l'auteur fait nager en eau trouble une série de personnages glauques, interlopes, tantôt amis, aidants ou opposants et ennemis. Tous, veulent entraîner Sandrine là où ils vivent. Elle, ne sachant ni nager, ni respirer dans ce monde, ne peut que couler et s'enfoncer de plus en plus bas. Noyade assurée ! le lecteur se demandera quand elle va, enfin, toucher le fond et si elle aura encore la force de donner un bon coup de talon au fin fond de cette vase nauséabonde, espérant jusqu'au bout la voir remonter à la surface.
Situant son récit dans une région liégeoise à la fois pétrie de désillusions économiques, de frictions entre quartiers, de rivalités claniques et de manque d'envergure pour se redresser, mais, tout en même temps, riche du sens de la fête, de ferventes traditions folkloriques et d'une incroyable facilité à effacer ce qui ne va pas par un bon coup bu entre amis, l'auteur donne aux cramignons de la Bassse-Meuse l'occasion de rivaliser avec les virées nocturnes dans le Carré de Liège, à la pègre liégeoise de vouloir prendre le contrôle des dancings de Tongres et aux gens de la rive droite de la Meuse de se mesurer à ceux de la rive gauche pour prendre le contrôle de la région. de la même façon, il mêle ce qui devrait être éducation et stabilité familiale avec les apnées en alcool, les nuits sans fin et les liaisons n'offrant que des lendemains qui déchantent. de là à basculer dans les rencontres glauques, le commerce illicite et le milieu interlope de la prostitution, des durs et des petites frappes, il n'y a qu'un pas, faux pas faut-il le préciser, que Vincent Brems franchit allègrement. C'est noir, c'est dur, violent... et pourtant, le lecteur se surprend à aimer cette Sandrine, se montrant souvent irresponsable, qui, malgré tout, rêve d'un ailleurs, d'un autrement, d'un avenir à ouvrir encore et à offrir à sa fille.
C'est qu'avec l'air de jeter tout, de façon quelque peu pêle-mêle à la face de ses lecteurs, Vincent Brems construit une réplique certes noire mais juste de ce qui fait le monde, la vie, le quotidien des petites gens d'en bas. Ceux qui n'ont pas les moyens d'avoir un coup d'avance sur l'échiquier de la vie, ceux qui ne parent rien, cherchent seulement à pouvoir sortir, sans trop de retard, une réponse aux coups du sort, du hasard et de la vie. Et même si, tout le monde en est conscient, ils n'ont que ce qu'ils construisent pour eux-mêmes, le lecteur est prêt à convenir que ces gens n'ont, et ce n'est pas de leur faute, aucune notion d'architecture pour établir les plans d'une situation de vie qui tienne la route et le temps.
Au-delà de l'histoire apparaissant au premier plan, “Sandrine Gatti” est un livre qui peut étonner, questionner le lecteur et l'ouvrir à l'attention nécessaire à la conduite de nos existences .
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