Tous leur efforts pour protéger cette maison du soleil n'ont fait que permettre aux ténèbres de l'envahir.
Elle se sent vide et perdue, elle n'est plus qu'un assemblage de peau, d'os et de tendons. Elle n'a aucune chaleur, bonté ou intégrité en elle. L'Eve d'avant, quelle qu'elle ait été, a disparu, rayée, oblitérée. Sa vraie nature, égoïste et inconséquente, s'est enfin révélée. Elle est l'incarnation du mal. Elle regarde sa main tourner la page d'un classeur. Comment peut-elle avoir l'air si normal ?
J’existe, pense-t-il. Je suis ici, je fais partie de tout ce qui m’entoure.
Chaque exposition est différente : parfois elle est dangereuse, parfois elle ne l’est pas. Ce qui est terrible, c’est l’impossibilité de savoir.
Ce moment de la journée où ils ne sont que tous les deux, seuls au monde, est toujours le meilleur, son préféré. Ils peuvent parler de tout et de rien, et pendant ces quelques heures, la vie semble riche de possibilités illimitées.
Les enfants sont bien plus résilients qu’on ne le pense.
Lorsque l’obturateur claque comme un pétard, les trois biches s’enfuient à travers les arbres. L’instant d’après, c’est comme si elles n’avaient jamais été là. Il se sent coupable d’avoir interrompu leur repas et espère avoir pris une bonne photo. Il se lève, s’étire. Il lui reste une vingtaine de minutes avant que son écran solaire ne fasse plus d’effet.
Les arbres à feuilles caduques produisent une enzyme qui empêche ces dernières de s’alimenter et cause leur mort. Il n’a jamais entendu parler d’un seul arbre qui en soit dépourvu, mais peut-être en existe-t-il un, quelque part, qui n’a pas cet enzyme, et qui reste vert toute l’année. Les êtres humains comptent presque soixante mille enzymes différentes et il ne lui en manque qu’une seule.
A l'exception de la lune qui fait luire les pierres du patio, et les bras métalliques des fauteuils, le jardin est plongé dans le noir. Tyler inspire à fond, emplit ses poumons. Pourquoi l'air semble-t-il tellement plus pur quand il est le seul à le respirer ?