" Tu sais comme moi que la principale difficulté de ce métier ( avocat ), c'est la "distanciation " par rapport à celui que l'on défend . Ça implique que chacun ait bien en tête la place de l'autre .Qu'ils comprennent bien qu'on est là pour les défendre , mais qu'on n'est pas leur " pote " .
- Le problème , c'est qu'on a affaire à des générations qui n'ont plus de barrières . Qui ne sont même pas éduquées . Qui n'ont que le mot " respect " à la bouche . Mais qui ne savent pas ce que c'est .
- Alors , bon courage à nos successeurs ! C'était déjà un métier difficile , il va surtout devenir dangereux ....." ( p 170 )
"Je vous jure que je ne l'ai pas tuée. Vous me croyez ?
Sa voix avait un accent de vérité troublant.
-Vous voulez que je vous parle franchement ? J'en sais rien et je m'en fous . Vous m'avez demandé de vous défendre , d'être votre avocat . Je le serai . Sans états d'âmes . Ma seule préoccupation est et sera de vous sortir de là. Ne me demandez pas de vous croire ou d'être votre ami . En revanche , vous pouvez compter sur moi .
J'ai eu l'impression que mon manque d'enthousiasme à me montrer convaincu de son innocence l'irritait . Moi , ce qui m'a toujours énervé, c'est ce besoin qu'ont les accusés de vouloir vous convaincre de la vérité de l'histoire qu'ils vous racontent .( p 124)
Même s'il n'y croyait plus (le procureur), même si, au fond de lui, il n'était plus sur de la culpabilité de..., il allait tout faire pour... faire condamner. Les magistrats fustigent souvent ces avocats qui sont prêts à tout pour faire acquitter des coupables, qui ne soucient pas de la vérité, alors qu'eux... Et bien, ils font la même chose. Ils ont la même envie de gagner, de voir triompher la thèse qu'ils défendent ! Le jeu, toujours le jeu, plus fort que la vérité.
- Comment devient-on avocat ? Pour défendre la veuve et l'orphelin ?
- Quand on est pénaliste, pour défendre ceux qui les ont fait tels...
J’ai attendu que le premier juré tiré au sort se lève du banc où il était assis au milieu des autres, se fraye un chemin parmi eux, et entreprenne, comme le président l’y invitait, de rejoindre son siège. Alors qu’il avait fait la moitié du chemin, sans même lui jeter un regard, j’ai crié d’une voix forte : « Récusé ! » D’une voix presque désolée, le président a renchéri : « Juré numéro 11, vous êtes récusé par la défense. » Penaud, le malheureux a regagné sa place.
Je récuse systématiquement la première personne dont le nom sort de l’urne. Cela provoque tout de suite l’émotion et d’abord parmi les jurés. Tous se demandent pourquoi je viens de récuser l’un des leurs, quelle tare il pouvait bien présenter. Du coup, c’est avec soulagement qu’ils accueillent leur désignation ultérieure. Et éprouvent un peu de sympathie pour cet avocat qui ne les a pas, eux, renvoyé. Mais comment savoir qui sera un bon juré ? Quelqu’un de suffisamment cultivé pour comprendre les arguments qui seront échangés ? D’assez rigoureux pour ne pas condamner s’il a le moindre soupçon ? De jeune, qui n’aura pas d’idées préconçues ou d’âgé qui ne se laissera pas facilement influencer par le représentant de l’État qu’est le procureur ? Un homme ou une femme ? L’expérience prouve qu’il n’y a pas de règle.
Bonheur de ces instants où le temps n'existe plus et où seules comptent l'excitation partagée, la prise de possession du corps de l'autre et un peu de son âme. Cette peau qu'on caresse, cette chair qu'on malaxe comme pour se l'approprier. Ce mélange de tendresse et de violence qui conduit à ce court moment d'éternité où plus rien d'autre n'a vraiment d'importance.
Rien ne ressemble à la première journée d’un procès pour meurtre.
Quelle est la part de jeu dans tout ca ?
J'ai hésité à répondre. [...] Comment répondre à cette question sans choquer. Et pourtant. La part du jeu est inhérente au fonctionnement même de la justice. Loterie du choix de l'avocat, des magistrats qui vont gérer un dossier, tirage au sort des jurés, loterie des verdicts. Avec comme enjeu, combien excitant, le sort de vies humaines qui se décident. Sur un détail, sur rien.
Être avocat, c'est défendre sans états d'âme celui dont vous avez accepté la défense. C'est faire acquitter des coupables si l'accusation n'a pas pu prouver qu'ils l'étaient. Parce que c'est une garantie, aussi, pour chacun d'entre nous. Qu'on ne puisse pas être condamné seulement parce qu'on est soupçonné.