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Critique de GuillaumeTM


"Junky" est le premier roman de William Burroughs, rédigé dans le contexte difficile de l'Amérique puritaine des années 50, surtout quand il s'agit de traiter du sujet de la drogue sous l'angle du consommateur. Dans la préface, Allen Ginsberg (agent littéraire improvisé de la Beat Generation) nous fait part d'ailleurs de la difficulté que fut de parvenir à publier ce texte controversé pour l'Amérique blanche bien-pensante.

Bill Lee, issu d'une famille aisé, décide un beau jour de s'essayer à la came pour une raison qui lui échappe totalement. Pour se faire, il essaie le vol de portefeuilles dans le métro mais abandonne très vite. Il tente alors de refourguer de la drogue, ce qui lui permet d'en garder pour sa propre consommation. On le suit dans cet enfer, où les junkies essaient d'obtenir de fausses ordonnances pour de la morphine auprès de médecins peu scrupuleux quant à l'éthique de leur profession et où la prison guette à chaque pas. L'aventure se poursuivant jusqu'à la Nouvelle Orléans puis au Mexique pour se terminer sur le projet de trouver du yage (l'ultime défonce selon lui), destination la Colombie, ce qu'il racontera dans d'autres livres.

Burroughs n'oublie pas aussi de digresser sur ce qu'il appelle un style de vie, sur cette fascination qu'il a pour l'univers de la came sans jamais se faire moralisateur, rédigeant finalement une chronique d'un accro à la drogue dans les Etats Unis des années 40 et 50.

Chose curieuse : sa femme est quasi inexistante, ses apparitions se faisant sporadiquement à quelques rares occasions, son nom n'étant jamais mentionné.

Dans un passage fameux où le "cold turkey" (manque) se fait sentir, Burroughs, sans le savoir, nous donne une des clés pour mieux comprendre ce qu'il fera ultérieurement (dans le "Festin nu" par exemple), décrivant un cauchemar ou une vision hallucinée proche du délirium tremens des alcooliques, des rues pleines de scolopendres géants et des scorpions énormes sortant des bars, des cafétérias et des drugstores de la 42e rue, dans un New-York apocalyptique. Il ne sait pas encore à ce moment à quoi cela aboutira par la suite.

La question qui nous vient aux lèvres, à la lecture de ce livre, est qu'est-ce qui pousse une personne venant de la bourgeoisie à se droguer ? La réponse est peu aisée d'autant plus que l'auteur ne le sait pas lui-même. Cette réponse est peut-être à chercher du côté du caractère névrosé du personnage que l'on sait peu doué pour les relations avec autrui, probablement la peur d'être aimé puis d'être abandonné ensuite ou une sorte de mal-être vécu depuis son adolescence, sans oublier son homosexualité inavouable dans un monde fortement homophobe. Ce sont toutes ces petites choses qui ont fait de William Burroughs, l'écrivain que l'on connait aujourd'hui.

C'est un roman, in fine, qui se fait clair, limpide, dans une écriture narrative agréable à lire; la première pierre déposée dans l'oeuvre de ce grand écrivain du XXe siècle.
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